A l’occasion du 59ème anniversaire de l’indépendance de la Guinée, célébré ce lundi, 02 octobre 2017, le Colonel El Mohamed Camara, ancien combattant, Imam et conseiller théologique des forces armées guinéennes, a accordé une interview à notre rédaction.
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Mosaiqueguinee.com : Comment avez-vous perçu l’indépendance de la Guinée en 1958 ?
Colonel El Mohamed Camara : C’est une date historique qui vient de loin. Nous étions très petits, mais on savait ce qui se passait à l’occasion de la fête de l’indépendance. Cette célébration se déroulait dans la joie, dans la fraternité, dans l’amour et dans l’amitié.
Quand cette date arrivait, on nous emmenait des cadeaux, on jouait aussi à plein de choses. Une festivité de coursiers, de danseurs.. Chez nous à Boffa, on effectuait des courses dans les pirogues sur la Fatala. L’indépendance, c’est se mettre à l’abri de tout, être libre, avoir son honneur et sa grandeur. Car un pays non indépendant ne peut pas se mouvoir comme il veut, il n’a pas aussi la voix plus haute, parce qu’il est sous le joug colonial. A l’arrivée de cette liberté, toute la Guinée l’a appréhendée dans la joie, la gaieté, dans l’unité et la fraternité
L’indépendance de la Guinée est le résultat du concours de tous les fils du pays. Cette lutte était dirigée par un syndicaliste que nous avons nommé Ahmed Sékou Touré (paix à son âme).
Même nos anciens combattants, qui étaient sous le drapeau colonial à cette époque, ils étaient un peu partout en France, au Sénégal… Ils étaient les premiers intégrés de l’armée française dont faisait partie mon oncle feu Commandant Ibrahima Katty et son équipe qui était un peu nombreuse. Ils ont dit non à la communauté française. Ils sont revenus pour former la jeune armée guinéenne.
Mosaiqueguinee.com : Comment se célébrait cette fête de l’indépendance ?
Colonel El Mohamed Camara : Au sein des forces armées, quand la fête approchait, les autorités d’alors se réunissaient et décidaient de quelque chose. Toutes les garnisons avaient quelque chose. Il y avait le repas qu’on appelait le repas du corps, c’est Lassana Conté lui-même qui venait goûter, même s’il n’aimait pas le manger.
Comme c’est l’armée, on disait toujours ‘’faites comme moi’’, il était toujours le premier à se servir. On organisait des danses et des galas de football. Après l’agression du 22 novembre 1970, la plupart ont reçu leur grade le 02 octobre. Moi personnellement, j’ai reçu le mien après la fête de 22 novembre.
Le trajet est long, ce que nous pouvons dire sur la situation guinéenne de 1958 à nos jours, c’est qu’il y a eu beaucoup de choses et du progrès. Nous voyons le progrès que les Guinéens ont fait dans les domaines de la culture, de l’art et des sports. Jusqu’à nos jours, nous sommes là. On voit la situation mais on ne fête plus le 02 octobre comme avant.
Dans les temps anciens, les 33 préfectures fêtaient de la même manière cette date. A Conakry ici, tous les habitants de la capitale sortaient.
Toutes les armées défilaient, toutes les couches sociales, les civils, les militaires, les paramilitaires. Nous les parachutistes, nous venions clore le défilé, parce que quand on passait avec la marche cavalière, en ce moment, on était très jeunes, on sautait, on bondissait comme des chevaux qui passaient. Et quand on quittait, les blindés arrivaient avec les armes lourdes.
Mosaiqueguinee.com : Quel message avez-vous pour le peuple de Guinée à l’occasion de ce 59ème anniversaire ?
Colonel El Mohamed Camara : Je m’incline pieusement devant la tombe de nos prédécesseurs qui ont donné de leur sang, qui ont mouillé le maillot pour que la Guinée soit la Guinée d’aujourd’hui.
Je dirais à tous les Guinéens d’ici et d’ailleurs, bonne fête. Je les encourage à s’unir sans distinction d’ethnie, de sexe ou de religion. Je dirais aussi à l’autorité de veiller sur son peuple, car le prophète (PSL) a dit que tout berger sera interrogé sur comment a-t-il abreuvé son troupeau. Donc, quand on est responsable d’une chose, il faut suivre d’abord sa nourriture, sa sécurité et sa santé.
J’appelle tous les Guinéens à se ressaisir, ne détruisons pas la Guinée à cause de quelqu’un ou pour quelqu’un, aimons nous et resserrons les rangs. Il faut que nous soyons tous tailleurs pour coudre le tissu social.
Interview réalisée par Kanté Mariam et Saidou Gaya Diallo