Quoique moins bruyante et moins tapageuse, il faut dire que la présence des entreprises françaises dans différentes secteurs de la vie économique de la Guinée, est une réalité de tous les temps.
Elle s’est même renforcée depuis près de dix ans, grâce à d’importantes réformes initiées et implémentées par le pouvoir d’Alpha Condé.
De grands groupes français comme Bolloré, Total, Vinci, COLAS et Orange, opèrent en Guinée et contribuent à l’animation économique du pays.
Dans une interview qu’il vient d’accorder à Mosaiqueguinee.com, au moment où certains médias évoquent un complot de la France ou des entreprises françaises contre le régime en place en Guinée, Barry Diawadou, consultant et expert en amélioration du climat des affaires, réfute ces accusations et affirme au contraire que la présence française en Guinée, s’est plutôt renforcée, sans forcément avoir la même amplitude qu’ailleurs comme en Côte d’Ivoire. Pour des raisons qu’il énumère.
Lisez plutôt !
Mosaiqueguinee.com : Bonjour Monsieur, voudrez-vous, vous présenter à nos lecteurs
Barry Diawadou : Bonjour Monsieur, bonjour aux nombreux lecteurs de Mosaiqueguinee.com et de la presse en ligne.
Je me prénomme Barry Diawadou, Coordinateur de projets au sein d’un groupement Conseil international.
Avant d’assumer cette responsabilité, j’étais de 2016 à 2018 Consultant/Expert en amélioration du Climat des Affaires en République de Guinée.
Plus précisément, j’ai exercé ces responsabilités au niveau d’un PROJET DU GOUVERNEMENT GUINEEN FINANCE PAR LA BANQUE MONDIALE; (le PAPME), et au niveau de la Cellule TECHNIQUE NATIONALE DU MCC (Millenium Challenge Corporation), sous tutelle de la PRESIDENCE et coordonné par la PRIMATURE.
Mosaiqueguinee.com : le Medef a été souvent sollicité par le président Condé en vue d’investir en Guinée, on n’a vu peu de patrons français sur le terrain. Cependant les opportunités existent. Pourquoi ?
Barry Diawadou : Tout d’abord, je voudrais faire des précisions majeures:
– Le MEDEF est un syndicat d’entreprises françaises. IL n’a pas vocation même à investir, mais à mettre en branle des actions en vue de favoriser les investissements des entreprises françaises. Pour mettre en place ces actions, réunions de concertations entre partenaires, la négociation de conditions ou de conventions visant à favoriser l’installation des entreprises françaises par la mutualisation des moyens, etc…
-Comme tout organisme, il scrute les indicateurs du DOING BUSINESS et sur des rapports, des analyses et études. Il s’appuie entre autres sur des analyses études et rapports/ climat des affaires de la destination du territoire ou investir.
Il faut noter que de 2010 à 2015, de nombreux efforts ont été effectués par le Président de la République pour l’amélioration du Climat des affaires en Guinée.
De nombreuses réformes ont été pensées et certaines ont été mises en branle; ce qui a valu à la République de Guinée, de gagner des places dans le cadre du DOING BUSINESS.
D’ailleurs, c’est cette volonté réformatrice qui a motivé les nombreux déplacements des délégations gouvernementale de par le monde; pour aller vendre la destination Guinée et pour montrer que la République de Guinée est en chantier et qu’elle est ouverte et qu’elle se veut attractive d’investissements.
C’est d’ailleurs dans cet élan que plusieurs missions du MEDEF ont fait le déplacement en Guinée pour venir rencontrer les autorités et le secteur privé guinéen.
Au compte de ses nombreuses rencontres, l’on peut noter :
– La présence du MEDEF au symposium des mines.
– La participation active du MEDEF au lancement du centre pilote d’appui aux Petites et moyennes entreprises (CAPME); d’ailleurs, un rapport a été élaboré par la mission du MEDEF pour proposer des actions concrètes dans le cas du contenu local avec les entreprises françaises déjà présentes en Guinée, et avec de nouvelles entreprises françaises qui viendraient investir en République de Guinée dans la cadre de Joint-ventures avec des PME guinéennes.
Mosaiqueguinee.com : pourquoi les patrons français (ou les entreprises françaises) sont plus visibles au Sénégal, en Côte d’Ivoire, qu’en Guinée ?
Il faut faire la distinction entre Patrons français (individus) et entreprises françaises (personnes morales). La croissance, c’est un système qui s’auto-entretient non pas par des hommes, mais par des institutions et des entreprises. Donc, ce qui nous intéresse, ce sont les personnes morales et non les personnes physiques.
Par conséquent, cette affirmation n’est pas forcément vraie, car en République de Guinée, des entreprises majeures faisant partie du MEDEF sont en exercice depuis bien longtemps et elles figurent parmi les plus gros employeurs de la République de Guinée. Il s’agit notamment de TOTAL, Bolloré, ADP, VINCI, COLAS, ORANGE, CANAL et j’en passe…
De plus, de grandes entreprises françaises sont impliquées dans les grands projets en République de Guinée dans les mines et l’Energie ; notamment KALETA, SOUAPITY, GAC. Vous avez aussi BOUYGUES BTP, COLAS, INDOSUEZ, Expertise France, EGIS, etc…On a tendance à l’oublier.
Si vous parlez de visibilité, c’est autre chose. On parle peut être alors de communication ou de visibilité des nouveaux arrivants ?
Pour cet aspect, sachez qu’avec les réformes mises en application depuis 2010, on peut créer très facilement une entreprise en 48 h.
En outre, des directions régionales d’entreprises ont vocation à créer des succursales.
Maintenant, pour qu’une entreprise s’installe dans un pays, on n’a pas besoin nécessairement que le PDG vienne faire une conférence de presse. Ce n’est pas leur finalité. Les coups d’éclat médiatiques, ne sont pas la panache de tout le monde.
EN 2012 dans le transport terrestre, le contrôle technique, e groupe AUTOVISION, après une visite de son Directeur General en Guinée, une convention avec l’Etat guinéen devait être signée. Elle prévoyait le développement de 33 centres de contrôle technique sur toute l’étendue du territoire guinéen par le biais d’un Partenariat Public Privé tripartite incluant les PME guinéennes qui avaient le projet d’ouvrir un centre de visite technique.
En 2017, le groupe Bouygues a décroché un contrat d’un peu plus d’un milliard d’euros dans le cadre du projet GAC.
Le MEDEF avait validé avec le Conseil d’administration de BOUYGUES, la mise à disposition dans le cadre de la sous-traitance d’un volume de contrats allant jusqu’à 800 millions d’euros.
En fonction de la qualification des entreprises et de leur capacités, si celles-ci n’auraient pas été au niveau, il y aurait eu la mise en place de JOINT-VENTURES entre PME guinéennes et PME françaises pour non seulement accéder à ces marchés, mais de plus aller à la conquête d’autres marchés sous-régionaux dans les zones enclavées des pays limitrophes.
Toute cette stratégie du MEDEF a été présentée au gouvernement guinéen et aux Partenaires Techniques et Financiers dans un rapport que vous pourrez consulter en vous adressant au gouvernement.
Si cela ne s’est pas fait, c’est uniquement parce que le projet qui était censé coordonner ce programme est arrivé en fin de vie en décembre 2018.
Le temps qu’un autre projet soit mis en place a pris deux ans et ce projet n’est pas encore opérationnel dans toutes ses composantes.
Ensuite, par rapport au manque de visibilité dont vous parlez, il ne faut pas faire abstraction de ce qui caractérise la République de Guinée et de ce qui en fait sa singularité en Afrique Francophone, son tissu économique et son histoire.
Le tissu économique et industriel est plus dense dans les pays que vous avez cités, où nous avons des économies où nous allons vers la production…alors qu’en Guinée, en dépit des efforts de ces dernières années, nous sommes encore dans une économie fortement orientée vers les activités de commerce. Même si le gouvernement affiche sa volonté de développer le secteur industriel.
Les infrastructures en énergie et la fourniture en électricité étant plus présentes dans ces pays, les entreprises de toute taille, s’orienteraient vers ces destinations, car les facteurs de production sont à portée et par voie de conséquence elles peuvent envisager l’installation d’unités productives ou de services délocalisés.
Et deuxièmement il y a l’histoire de la Guinée. Dans les pays que vous avez cités, la présence des entreprises françaises et par ricochet le volume de leur investissement, ont suivi une courbe continue.
Alors que je vous rappelle qu’en Guinée, avec le référendum de 1958, il y a eu une discontinuité de la présence des entreprises françaises. Ceci a duré quand même quelques longues années.
Mosaiqueguinee.com : certains pensent que c’est parce que les entreprises françaises (pour des raisons politiques) que le président Condé s’est orienté vers les anglo-saxons, les asiatiques et autres, pour les amener à investir en Guinée. Qu’en dites-vous ?
Ce sont des affirmations gratuites et irresponsables. Je parle d’affirmations, parce que lorsqu’elles sont écrites l’on ne parle plus de pensées. Il est tout à fait normal pour un équilibre et pour accroitre le volume et la croissance que l’on s’adresse à plusieurs investisseurs, quels que soient leurs pays de provenance.
Le danger avec ce genre d’affirmations, c’est que tout cela freine les ambitions et les intentions de ceux qui veulent investir en République de Guinée. Pas seulement de ceux que l’on indexe, mais aussi les autres qui se diraient qu’ils s’exposeraient à des pressions si leur chronogramme d’exécution n’est pas réalisé, quels que soient les cas de forces majeures et les blocages qui pourraient se présenter.
Il faut chasser les ombres du passé pour aller de l’avant…La République de Guinée n’a pas besoin de cela.
Le travail qui a été fait ces dix dernières années, permettra aux générations futures, à vos enfants, aux nôtres de bénéficier des fruits de ce qui a été fait depuis 2010.
Les partenariats qui peuvent exister entre les institutions de la République de Guinée et d’autres institutions, survivront aux défis politiques de nos pays africains.
Interview réalisée par Mohamed Bangoura