Dans une interview exclusive accordée à la rédaction de Mosaiqueguinee.com le week-end dernier, dans les locaux du siège de son parti à Yembeya, Dr Faya Lansana Millimono, président du Bloc Libéral (BL) est revenu sur des sujets qui font l’actualité dont le processus électoral en cours, la composition du cabinet de chef de file de l’opposition et la montée de la violence dans le langage de certains acteurs politiques guinéens.
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Mosaiqueguinee.com : La CENI a proposé la date du 04 février 2018 pour l’organisation des élections communales. En tant que président du BL, croyez-vous au respect de cette date ?
Faya Millimono : Je ne peux pas croire au respect de cette date, mais je ne peux qu’espérer. C’est lié au contexte. En Guinée, on n’a jamais fait des élections à bonne date surtout les élections locales parce que les dernières remontent à l’an 2005. Donc, cela fait douze ans depuis qu’on n’a pas fait d’autres élections communales. Nous avons donc l’illégitimité au niveau de la base, et nous sommes en train de courir derrière ces élections depuis sept ans.
Est-ce qu’on peut croire en une unième date ? Non, je n’y crois pas, mais on peut espérer. M. Salifou Kébé (le président de la CENI NDLR) et ses amis sont passés nous voir, ils ont montré une volonté de développer un style différent de gouvernance de la CENI. Ils ont mis l’accent sur la transparence et sur la participation des acteurs devant compétir. C’est un discours qui nous a donné de l’espoir. C’est vrai qu’en Guinée, on ne croit plus beaucoup aux discours mais on ne peut pas aussi verser dans une situation où on ne croit plus en personne. Nous espérons et nous souhaitons surtout que ces élections aient lieu à cette date.
Mosaiqueguinee.com : Le chef de file de l’opposition, Cellou Dalein Diallo vient de mettre en place son cabinet composé de cinq conseillers dont des leaders politiques. Votre nom ne figure pas sur la liste. Est-ce que d’après vous ce n’est pas un mépris ?
Faya Millimono : Non, ce n’est pas un mépris. D’abord, il faut préciser que dans le parti que je dirige, nous ne contestons jamais les pouvoirs qui sont conférés à nos compatriotes par les lois et par notre Constitution. Il est dit que le président de la République nomme à toutes les fonctions civiles et militaires dans notre pays. Ça, c’est une compétence qui lui a été conférée par la constitution, on ne peut pas discuter de ça. De la même manière dont nous respectons ce que le Président fait, nous respectons ce qui est conféré de droit au chef de file de l’opposition.
Par rapport à nous en particulier, nous avons été contactés d’abord verbalement pour nous dire qu’il y a des efforts pour la composition du cabinet du chef de file de l’opposition et qu’on avait pensé que je pouvais figurer.
J’avais demandé qu’on me situe un peu sur ce que vont jouer les conseillers, et j’ai posé plusieurs autres questions. Mais ces questions avaient mis du temps à obtenir des réponses. Et entre temps, j’ai effectué beaucoup de déplacements qui m’ont un peu distrait par rapport à mon agenda quotidien.
Je me rappelle que c’est quand j’étais tout dernièrement au Liberia, que j’ai reçu un e-mail du chef de file de l’opposition me disant voici les rôles que vont jouer les conseillers et me demandant de dire si oui ou non je confirme mon appartenance au cabinet.
J’ai dit que je serais de retour sous peu et que je prendrais contact avec lui. Mais c’est quand je suis rentré, que j’ai vu le cabinet composé. Donc pour moi, la seule chose qui compte, ce que le chef de file de l’opposition en tant qu’institution joue son rôle constitutionnel. Et de par ce point de vue, je souhaite qu’il obtienne des conseils adéquats de la part des conseillers qui sont désormais dans le cabinet.
Mosaiqueguinee.com : Parlons de votre parti. Depuis plusieurs mois, l’opinion observe à la fois un silence et une sorte de méfiance entre votre parti et votre chargé de communication. Dites-nous clairement si le courant passe bien ?
Faya Millimono : D’abord je m’excuse, parce qu’en principe, quand je parle en tant que premier responsable du parti, je ne peux pas aborder des questions qui sont internes au parti.
A l’interne, il n’y a pas d’agenda caché, il n’y a pas de problèmes majeurs, et je crois qu’il y a toute la sérénité. Quand à parler spécifiquement des gens, je me réserve des commentaires. J’ai souvent parlé des idées et des valeurs que je défends. Je peux vous rassurer qu’il n’y a pas de méfiance… Tout ce qui concerne le fonctionnement interne de notre parti, nous préférons le traiter strictement à l’interne.
Mosaiqueguinee.com : Ces derniers temps nous constatons qu’au lieu d’une éducation politique et citoyenne de leurs militants, certains acteurs politiques guinéens versent dans des invectives, des injures parfois. Qu’avez-vous à dire à ceux-ci ?
Faya Millimono : Vous savez, sur l’échiquier politique guinéen, il y a beaucoup de choses que nous déplorons aussi. Quand on dit que je veux faire la politique, vous avez choisi de vous présenter comme un modèle pour vos populations. Nous avons, comme vous l’avez dit, la responsabilité de préparer nos jeunes à notre idéologie mais aussi aux valeurs communes (à la citoyenneté). Donc si nous sommes les premiers à donner de mauvais exemples à travers des invectives, des injures et autres, je crois que ce n’est pas très honorable de la part de la classe politique, de verser dans ces genres de choses. Il faut que le niveau du débat soit élevé dans notre pays. Et pour ça, les acteurs qui peuvent mieux aider la classe politique à le faire, c’est d’abord vous les médias. On veut et on cherche à ce que le niveau du débat dans notre société soit à la hauteur.
Interview réalisée par Mamadou Sagnane & Hassane Kolié