C’est le tendon d’Achille de l’ère Condé. Depuis plusieurs années, pas grand monde n’échappe aux hors-la-loi qui écument nos grandes villes. Diplomates étrangers, fonctionnaires, banques, stations-services, citoyens ordinaires… tous vivent dans la crainte permanente d’être dépouillés de ses biens, voire de se faire ôter la vie. Les solutions tatillonnes élaborées par les pouvoirs publics restent d’une inefficacité grossière.
Si la Guinée désire encore être un pays qui se respecte et qui attire les investissements étrangers, il est plus qu’urgent que l’Etat s’attaque à cette lancinante question. Point besoin ici de s’étendre sur la psychose qui drape Conakry dès la nuit tombée. Les coups de feu dans les quartiers de la banlieue rivalisent désormais avec les crépitements de feux d’artifices de noël, prématurément déballés par les enfants. Même la proximité d’un commissariat de police ou d’un poste de gendarmerie ne suffit plus à rassurer les citoyens.
Les stratégies à deux balles vantées sans cesse à la télévision nationale n’ont pour seul objectif qu’à pomper l’argent public et à entretenir les nombreuses maîtresses de ceux qui nous gouvernent. L’enlèvement de l’opérateur économique El hadj Abdourahmane Diallo lundi, et le meurtre de l’étudiant Ulrich Yobouet Assui Jr, hier mercredi, rappellent à tous dans quelle jungle nous sommes désormais les squatters. Le vers est à chercher dans les services de sécurité, de la justice, de l’urbanisation et des services de renseignement.
On ne saurait endiguer le phénomène de l’insécurité tant que Conakry continuera de s’étendre dans l’anarchie, et au mépris de toutes les règles en matière d’urbanisation. Comment engager une course-poursuite dans nos ruelles défoncées et obstruées de nids de poules ? Comment déployer une opération de ratissage dans un quartier privé d’électricité et dont les maisons et les routes n’ont ni noms ni numéros ?
L’autre maillon faible est la justice. Longtemps aux ordres, elle reste encore minée par le faible niveau de formation des magistrats et leur nombre insuffisant, le trafic d’influence et la corruption d’une administration pénitentiaire qui n’a aucun scrupule à relâcher des criminels notoires ; comme le dénoncent tout le temps les services de sécurité.
Ces mêmes services de sécurité défaillantes à tous les niveaux, mais à qui on peut trouver comme excuse un manque criard de moyens. On se demande simplement où se trouvent les priorités du gouvernement qui préfère déplacer ou ajourner le problème. A peine 11 mille policiers pour une population qui avoisine les 12 millions d’habitants ! La rivalité instaurée entre la police et la gendarmerie, à laquelle on a maladroitement concédé une partie des missions de celle-ci, s’avère nocive pour la conduite de la lutte contre la criminalité.
L’Etat guinéen doit se reprendre et appréhender autrement le problème. Le trafic de drogue reprend du poil de la bête. Les lieux de consommation qui servent aussi de niches à la prostitution prolifèrent dans nos villes. Une véritable réforme du secteur de la sécurité, des services de renseignement et même de la gestion des mouvements migratoires s’impose. C’est une faute très grave pour notre Etat de faillir à sa mission première : sécuriser les guinéens !