Au mois de juillet prochain, la gouvernance du secteur minier guinéen sera évaluée par l’Initiative de Transparence dans les Industries Extractives (ITIE).
A un mois de cette évaluation, nous avons tendu notre micro au Président de l’Organisations Publiez ce que vous Payez. Abdoulaye Diallo, vice-président du Conseil National des Organisations de la Société Civile (CNOSC), est aussi membre de l’ITIE-Guinée.
Avec lui, nous parlons également du trafic de drogue dans un contexte où le phénomène gagne du terrain en Guinée et Afrique de l’Ouest.
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Mosaiqueguinee.com : vous êtes président de la coalition Publiez ce que vous Payez, et membre de l’ITIE qui œuvre pour la transparence dans le secteur minier, comment se porte la gouvernance du secteur minier guinéen ?
Alpha Abdoulaye Diallo : la situation minière aujourd’hui, en termes de production, elle est très élevée. Mais aujourd’hui, le défi au niveau du secteur minier c’est le respect des obligations environnementales. Les ressources minières sont des ressources qui sont épuisables dans le temps et dans l’espace, il va falloir que l’exploitation à outrance de nos minerais respecte notre environnement. Il est prévu que chaque société puisse faire l’étude d’impact environnemental, présenter un plan de gestion de l’impact environnemental. Il faut aussi que le ministère des Mines puisse jouer son rôle à travers ses services déconcentrés et qu’il ait les moyens et les outils nécessaires pour opérer le contrôle et le pouvoir nécessaire pour y parvenir.
Le contrôle au niveau des préfectures sur les sociétés minières laisse à désirer et les services déconcentrés n’ont aucun poids, pas d’outils et aucun moyen. Tout est décidé à Conakry, ce qui fait que le contrôle devient très difficile. Il faut vraiment revenir sur ces questions et renforcer le contrôle à la base. Si on laisse les sociétés à elles, elles feront comme bon les semble alors qu’il y a des obligations à respecter.
Il est prévu dans le code minier que les sociétés en phase d’exploitation doivent créer un fonds fiduciaire qui sera alimenté par les sociétés, et ce fonds doit servir à restaurer tous les dégâts que la société a causés à l’environnement, jusqu’à la fermeture. Mais les textes d’application liés à ce fonds ne sont pas encore élaborés, donc c’est un vide.
Nous sommes aujourdhui sur une étude qui sera publiée dans les jours à venir. Cette étude prouve à suffisance que les obligations environnementales ne sont pas respectées, et même les obligations fiscales. Toutes les sociétés minières en phase d’exploitation, doivent signer une convention de développement local avec les collectivités. Et actuellement, il n’y a pas de modèle de convention. L’arrêté conjoint qui doit être pris entre le ministre de l’Economie et des finances, le ministère de l’Administration du Territoire et celui des Mines.
Nous estimons que cette année est très importante, parce que la Guinée doit être évaluée au mois de juillet 2018 pour une nouvelle validation (Dans le cadre de l’ITIE Ndlr). La Guinée était conforme en 2014, ça nous a apporté des éléments positifs qui ont été salués, cette validation a entraîné un appui budgétaire de la Banque Mondiale, des près de 40 millions de dollars US, la CBG a eu des facilités de prêts pour la société. Nous devons donc être évalués de nouveau en juillet 2018. Cette évaluation va se faire sur toute la scène de valeur de l’exploitation minière.
C’est-à-dire, depuis l’octroi des contrats jusqu’à l’utilisation des revenus. Nous la société civile, nous avons déjà fait l’auto-évaluation du processus, l’exigence ‘’UNE’’, portant sur l’engagement du groupe multipartite, l’évaluation sur l’exigence 7 portant sur les impacts et les résultats de l’ITIE. Sur ces deux évaluations, nous avons formulé des recommandations au secrétariat exécutif, nous leur avons fourni la documentation.
Certains dénoncent une certaine opacité qui entourerait l’octroi des licences dans le secteur minier, qu’en pensez-vous ?
Le cadastre minier a été mis à jours. Ensuite, il y a eu la politique ‘’premier venu premier servi’’ mais c’est vrai qu’il y a des interrogations sur l’octroi de certains contrats miniers. Depuis 2013, il y a des contrats qui ne sont pas publiés sur le site des contrats miniers. Il faut nécessairement renforcer la transparence à ce niveau, parce que la décision d’octroyer un contrat ou une concession minière est une décision qui doit s’accompagner de toutes les garanties de transparence. Il y a des critères qu’il faut respecter. Le rapport 2016 est attendu, c’est un rapport qui est aligné sur la norme 2016, et cette norme parle de la propriété réelle parce qu’il y a beaucoup de société écrans aujourd’hui. On ne connait pas les vrais propriétaires.
La nouvelle norme insiste beaucoup sur la propriété réelle, sur les informations contextuelles, les chiffres de production, les actionnaires à qui profite notre bauxite, et ceux qui emportent l’argent en dernier ressort, cette nouvelle norme s’intéresse aussi à toutes les questions d’octroi des contrats. Nous attendons ce rapport qui tarde encore à venir et qui est attendu la semaine prochaine.
La suite de l’interview, à suivre…
Interview réalisée par Saidou Barry