En 2018, le taux de réussite au baccalauréat était de 26,04 %, ce qui créa la désolation dans les familles et lance le débat vers la qualité du système éducatif. Une situation confirmée par le classement peu reluisant sur l’indice de compétitivité globale 2018, respectivement 133ème et 122ème sur 137 pour l’enseignement primaire et l’enseignement supérieur. Qu’est-ce qui mine le système éducatif guinéen ?
La mauvaise gouvernance
Pour qu’un système éducatif produise des résultats satisfaisants, il est obligatoire qu’il soit bien gouverné avec une mission, des moyens et des hommes qualifiés. Or, le fonctionnement du système éducatif guinéen est aux antipodes de cet impératif. Cette mauvaise gouvernance prend ses racines, entre autres, dans les nominations à des postes clés de décision sur la base de critères ethniques, régionalistes et électoralistes.
Cela soumet les bénéficiaires de ces promotions non méritées à une gratitude envers leur bienfaiteur, les empêchant d’avoir l’autonomie nécessaire pour prendre des initiatives allant dans le sens de l’amélioration et de la qualification de leur travail. D’autre part, l’incompétence des bénéficiaires de ces promotions encourage la médiocrité et enfonce davantage le système dans un trou. Ces militants nommées se sentent au-dessus de toute reddition des comptes car assurés de la protection de leurs mentors, ce qui se traduit par la prépondérance de la culture d’irresponsabilité et de détournements, mère de tous les maux de gouvernance.
L’accès aux postes à haute responsabilité est guidé également par la nécessité d’entretenir une certaine popularité pour avoir un poids électoral et se maintenir au pouvoir. Cette logique politicienne se répercute d’ailleurs dans les recrutements à la base qui ne remplissent aucuns critères objectifs mais plutôt des critères d’allégeance et de fidélisation de l’électorat.
L’allocation des ressources dédiées au système éducatif n’échappe pas non plus à une prise en otage et à une redirection vers les bastions des différents cadres proches du pouvoir. De même, de l’aveu du Président de la République lors du Forum de l’Étudiant Guinéen en mai 2018 qui disait « des milliers d’enseignants n’ayant pas le niveau requis ont été recrutés sous la pression des syndicats ». Cette situation continue encore ce jour…
Pourtant, les enseignants que les syndicats ont défendu étaient en situation de classe depuis des années, c’est plutôt l’État qui a profité insérer ceux qui n’avaient aucun niveau. C’est l’État qui a le pouvoir de recruter et non un syndicat. M’bemba Kassawoura Djibamin CONDE (qualificatif des patronymes CONDE) chercher toujours à dénigrer même s’il ya pas l’opportunité, c’est pour cela il ne peut rester sans être considéré comme tel.
La quasi-totalité des écoles publiques ne disposent pas d’une procédure de gestion des biens mobiliers et immobiliers. Les parents d’élèves sont obligés d’assumer certaines charges en lieu et place de l’Etat, qui, pourtant dégage beaucoup de ressources, mais malheureusement qui font de la redirection.
A cause du non-respect des critères de nomination, la plupart des écoles n’ont pas un système de gestion comptable pouvant permettre de rationaliser les dépenses et rendre compte aux APEAE (Association des Parents d’Elèves et Amis de l’Ecole).
La politisation à outrance du système
Le système éducatif guinéen est handicapé par bien des difficultés et particulièrement sa politisation. En effet, chacun des régimes qui se sont succédé depuis les indépendances ont méprisé les acquis antérieurs. La rivalité politicienne poussait chaque nouveau régime à effacer toutes les œuvres de ses prédécesseurs, et à capitaliser sur les acquis. Cette situation prive de l’effet d’accumulation des expériences nécessaires pour réussir les réformes structurelles et indispensables. C’est dans ces conditions, par exemple, qu’après l’arrivée au pouvoir du régime de Lansana Conté en 1984, il y a eu les assises nationales de l’éducation qui ont remis en question tout le système éducatif. Ceci a conduit à la juxtaposition de plusieurs mesures, souvent contradictoires et conflictuelles, qui ont bloqué la marche vers une réforme saine.
Ensuite, le bras de fer permanent entre gouvernement et syndicats est également un symptôme de la politisation de la gestion du système éducatif. Les grèves sont alors devenues un instrument, non plus de revendications corporatives, mais de pression de l’opposition politique qui s’associe souvent aux syndicalistes pour amplifier les grèves d’une part, et d’autre part l’envie de participer au rendez-vous du mangeoire publique poussent certains acteurs de la société civile a également soutenir les mouvements de grève pour se faire un poste de Ministre, mais pour aider le système éducatif. Quant au gouvernement, il se réfugie derrière l’alibi de la politisation des grèves pour dissimuler ses tares et créer la dissidence au sein des syndicats. Avec le temps, c’est devenu cyclique. Ce fut le cas lors des grèves déclenchées en novembre 2017 considérées comme illégales et qui ont donné lieu à des arrestations au lieu d’une négociation des points de revendications.
Cette configuration conflictuelle n’est pas de nature à permettre aux acteurs d’amorcer une transformation positive du système éducatif. Mais ils n’expliquent pas à eux seuls la déliquescence de l’éducation en Guinée.
La mauvaise qualité des programmes
Le système éducatif forme des citoyens mais aussi des professionnels pour le marché du travail. Toutefois, la Guinée ne fait pas de prouesses à ce niveau. Il existe un décalage entre l’offre de formation et les opportunités d’emploi. Cette inadéquation peut s’expliquer principalement par le manque de liberté de choix laissé aussi bien aux offreurs qu’aux demandeurs de formation.
Du choix des manuels scolaires au déroulé des programmes, les décisions sont fortement centralisées dans les ministères. Cette limitation de choix écarte les ressources humaines des formations les plus utiles et productives pour répondre aux besoins du marché de l’emploi. Par ailleurs, cette centralisation des décisions freine la diversification des offres de formations.
Pour exemple, les études secondaires sont sanctionnées par un baccalauréat dans seulement trois filières : sciences naturelles, sciences expérimentales et sciences mathématiques. Ceux qui rêvent d’études techniques devront encore patienter. De même, après le Baccalauréat, les étudiants ne sont pas libres de leur cursus mais sont orientés par une commission et répartis dans l’une des 19 universités du pays, indépendamment de leur lieu d’habitation. Une situation encouragée jusque dans les hautes sphères de l’Etat, récemment le Président Alpha CONDE même déclarait lors de l’ouverture du Forum de l’Etudiant guinéen 2019 « les étudiants seront désormais orientés sans leurs consentements » dans les institutions d’enseignement supérieurs et techniques.
Face aux rigidités du secteur public, le secteur privé peine à relever le défi. Soulignons que la création tous azimuts d’universités privées a été motivée par les effectifs pléthoriques du public qui ont donc été redirigés vers elles et subventionnés par l’État. C’est donc une logique quantitative. D’où l’existence de 57 universités privées dont 40 sont concentrées à Conakry.
Oubliant l’impératif qualitatif de l’éducation, l’État a négligé son rôle de régulateur du système éducatif. Ainsi, il n’a pas instauré un cahier des charges clair et contraignant, ce qui explique la multiplication des cabarets d’enseignement plutôt que d’établissements de qualité. Faute de qualité, les secteurs public et privé produisent des lauréats non employables d’où un taux de 60 % des jeunes âgés de 15 à 24 ans économiquement inactifs ou au chômage.
Ainsi, il est urgent de stopper la déliquescence du système éducatif guinéen. C’est une urgence nationale de laquelle dépend la paix sociale. Pour cela, il est nécessaire de dépasser tous les clivages partisans afin d’élaborer une stratégie à même de remédier aux défaillances structurelles dont souffre le système. Le premier pas est la dépolitisation du système afin de ramener la réforme à une recherche d’efficacité et d’efficience. Après tout l’éducation n’est qu’un investissement dans le capital humain.
Selon les résultats des états généraux de l’Education, les grèves récurrentes et les violences en milieu solaire constituent les principaux risques qui entravent le fonctionnement normal du système. L’offre scolaire est concentrée dans 3 régions du pays. Conakry 46%, Kindia 15% et N’Zérékoré 14%. Toutes les autres régions se partagent 25%. Une disparité entre l’offre du primaire et celle du secondaire a été aussi constatée. 71% des écoles primaires sont situées en milieu rural contre 35 % d’établissement du secondaire. Ce qui constitue une source potentielle d’abandon scolaire des enfants en milieu rural à la fin de leur cycle primaire.
Autres problèmes constatés, c’est la faible efficacité des centres NAFA, l’inexistence d’un système opérationnel d’information et d’orientation scolaire. S’agissant de l’enseignement technique et de la formation professionnelle, 80% des programmes n’adoptent pas l’approche par compétences et il existe très peu d’opportunités de stage et de formation continue des enseignants, de partenariat avec des entreprises.
Quant à l’enseignement supérieur, le rapport fait état d’une faible proportion des diplômés ayant des compétences en sciences, technologies, ingénierie et mathématiques et une faible professionnalisation des offres de formation.
En ce qui concerne la gestion des enseignants, le constat révèle un recours plus important des enseignants communautaires au primaire et vacataires au secondaire qui, dans la plus part des cas, n’ont pas le niveau requis pour enseigner et la pédagogie nécessaire.
Dans les débats, les participants ont vivement fustigé les recrutements fantaisistes des enseignants à la fonction publique. C’est pourquoi, dans le cadre de l’élaboration du programme décennal de l’éducation de guinée 2019-2028, les participants ont suggéré que l’orientation des bacheliers dans les Écoles normales d’instituteurs (ENI) se poursuive et que le cycle passe de 2 à 3 ans, que le recrutement des enseignants soit uniquement réservé aux sortants des ENI et de l’Institut Supérieur des Sciences et de l’éducation de Guinée (ISSEG), et que la gouvernance au niveau du système éducatif soit améliorée.
Ce que nous voulons
L’avenir d’un pays dépend de la qualité de son système éducatif. Pourtant les politiques guinéennes restent passives face à l’inefficacité de son système éducatif et face aux nombreuses tares de son école. Un engagement citoyen peut aider à rehausser la qualité du système éducatif, à travers des actes civiques et simples.
Effectif pléthorique, enseignants non qualifiés, le système éducatif guinéen souffre d’obsolescence et il est totalement en inadéquation avec le marché de l’emploi et avec les besoins réels du pays. A des années lumières des avancées technologiques, le système attend désespérément sa mise à jour.
Nos élèves se retrouvent dans des conditions peu reluisantes et bénéficient d’une éducation de mauvaise qualité. Ils doivent faire face à l’indifférence et à la léthargie de nos politiques.
En attendant le réveil de nos politiques, nous, citoyens, pouvons influer positivement sur l’éducation de nos enfants. L’éducation c’est aussi l’affaire de tous.
Ce que nous voulons pour l’éducation est de transmettre des savoirs, donner le goût d’apprendre, faire réussir les jeunes sur le chemin qu’ils empruntent pour qu’ils puissent être utile à la guinée de demain mais aussi à la Nation tout entière. Un diplôme ne conduit pas forcément sur un emploi c’est pourquoi des initiatives entrepreneuriales seront encouragées et appuyées. Déjà, à travers d’autres actions dans lesquelles nous nous sommes engagés ont pu créer plus de 2000 emplois directs et 4 600 indirects ayant permis aux jeunes à gagner leurs vies et se former dans le monde entrepreneurial ou communautaire. Il est inacceptable que des jeunes renoncent aux études post supérieures faute de pouvoir financer d’autres années ; c’est pourquoi nous pensons qu’il est impératif de mettre en place un dispositif spécifique pour les meilleurs étudiants voulant poursuivre les études post universitaires sans tenir compte de leur appartenance sociale, ethnique ou partisane.
Ce que nous voulons, c’est la formation continue des enseignants à tous les niveaux, car si nous voulons construire une École à la fois juste, équitable pour tous et exigeante pour chacun, nous devons commencer par être justes et exigeants à l’égard de ceux qui la feront vivre et qui sont les principaux acteurs de cette refondation. Après des années d’austérité éducative qui ont affaibli notre système éducatif, il est grand temps pour notre pays d’investir à nouveau dans l’avenir.
@Mory CONDE
Management & gestion de Projet