Après ton assassinat à Canteleu en banlieue rouennaise par un égaré raciste, j’avoue que j’ai eu du mal à écrire ces quelques mots, comme j’en ai d’ailleurs été confronté, ce samedi 22 juillet, en début d’après-midi, quand on m’annonçait ta mort, et qu’à mon tour, je devais informer l’opinion sur ce qui venait de se produire au pays des droits de l’homme, en France.
Près de deux heures, dans les locaux de mosaiqueguinee.com, je m’étais enfermé, les larmes aux yeux, pour mentionner les circonstances dans lesquelles tu as été arraché à notre affection par celui qui est présenté à l’opinion, comme un malade mental.
J’avoue que ce jour, j’ai d’abord pensé à ta famille, à notre dernière conversation quelques jours plutôt, à nos moments inoubliables à la faculté des sciences juridiques et politiques de Sonfonia en 2007 et jusqu’à ce jour.
Mamoudou Barry, homme de conviction
C’est en novembre ou décembre 2007, que nous nous sommes rencontrés après notre orientation en Droit à la faculté des sciences juridiques et politiques de Sonfonia.
Des étudiants qui venaient de réussir le baccalauréat que nous appelions à l’époque : ‘’le Bac Lansana Kouyaté’’.
Très tôt, nous cultivions à l’époque des débats, même si Mamoudou, Mamadouba Condé, beaucoup d’autres étaient encore et moi, étions timides à la différence d’autres comme Samouka, Oumar Kane, Diawo, Alpha Oumar Condé, Bachir, Mohamed Djibril…, qui aimaient déjà discuter.
Avec des valeurs qu’il respecte, Mamoudou était foncièrement attaché au Droit et ne manquait pas d’admiration pour l’UFDG dont il disait qu’il n’était pas un militant mais un sympathisant.
Il n’hésitait pas non plus de dénoncer certaines pratiques lorsqu’il estimait que certains actes posés par le parti, violaient la loi.
L’enseignement, c’était son dada
Quand nous terminions en 2010 avec une licence en Droit, alors que nous autres étions animés par le souci de rapidement décrocher un emploi, Mamoudou, comme très peu d’entre nous, avait lui décidé d’y rester, pour parfaire leur formation et éventuellement, dispenser des cours de Droit et savait surtout ce qu’il voulait.
Il deviendra par la suite enseignant assistant de cours de droit avant de rejoindre en 2012 la France pour ses deux masters et son doctorat qu’il a bouclé le 27 Juin dernier avec une mention très honorable, avec autorisation de publier sa thèse telle qu’elle.
Mamoudou, quelqu’un de très attachant
Même étant hors du pays, Mamoudou n’a jamais rompu les liens avec ses amis. C’est lui qui vient aux nouvelles de ses camarades de promotion, de ses amis, de ses proches.
En 2017, l’enseignant de Rouen m’appelle et me signifie qu’il veut vraiment échanger avec ses camarades de promotion qui sont à Conakry et de très rapidement organiser une rencontre.
Avec le concours de plusieurs d’entre nous, nous nous sommes rencontrés à Prima Center. Ce jour, Mamoudou qui ne s’est jamais gêné de payer pour la vingtaine d’amis, a tout simplement souhaité qu’il faut que nous multiplions ce genre de rencontres et d’où l’idée de créer une association qui regroupe actuellement les camarades de cette première promotion LMD/ DROIT de l’université de Sonfonia.
En 2018, Mamoudou avec certains amis de la promotion, est encore à l’origine d’une initiative de mobiliser 1000 ouvrages de Droit pour l’Université de Sonfonia au nom de la promotion.
Il réussira à le faire avec brio. Il va d’ailleurs faire un déplacement de Rouen pour Conakry, cette même année pour remettre la première partie en présence du Recteur et des plus grands responsables de l’Université de Sonfonia.
C’est encore Mamoudou qui va d’ailleurs parler au nom de la promotion, après qu’on lui ait forcé la main, puisse qu’il est d’une modestie et d’une humilité, sans faille.
Ayant appris que j’avais maille à partir avec la justice, Mamoudou qui a vu mes photos sur les réseaux sociaux et dans les médias, m’a écrit plusieurs fois via Messenger, sans réponse. Il décida alors de m’appeler, sans succès là-aussi.
Cet ami qui n’abandonne jamais, me rappelle et ainsi s’engagea une conversation de près d’une heure pour me témoigner son soutien et m’encourager.
Notre conversation se termine par cette phrase : « Je vais rentrer le 15 Aout prochain, tu vas préparer une autre rencontre avec tous les amis et camarades de promotion. On va une nouvelle fois, parler de tout et de rien » m’a-t-il demandé. Et j’étais loin de m’imaginer ce jour, que c’était nos derniers échanges sur terre.
A jamais dans nos cœurs, cher ami !
Repose en paix, Mamoudou Barry !
Amine !
Ton ami, Mohamed Bangoura