Il est difficile pour le plus malin des guinéens, de prédire au juste, l’aboutissement de l’évolution sociopolitique actuelle. Notre inquiétude devient de plus en plus grande au regard de la situation actuelle qui jugule les belles perspectives d’avenir de la nouvelle génération. L’exercice de l’action politique a contribué sans nul doute à fissurer le fondement de notre vivre ensemble, car, notre coexistence sociale commence à être conditionnée par le soutien que nous apportons aux actions des acteurs politiques, même si ces actions contribuent à mettre en péril notre république. Le principe que « nous sommes des adversaires politiques et non des ennemis » ne s’applique plus. Nous sommes dès lors entrain d’entretenir les germes de la haine et de l’hypocrisie collective dangereuses pour notre génération et celle à venir.
Que pouvons-nous dire ?
De l’histoire récente de notre pays, jamais la concorde sociale n’a été autant ébranlée par les stratégies politiques dénudées de toute rationalité. Pire, le Mythe de l’Etat a cédé au détriment de la profusion de souhaits malveillants d’acteurs égocentriques et extrémistes. Notre Etat se voit découvert de son manteau de puissance public qui, de par ses missions régaliennes devrait assuré la protection des personnes et de leurs biens entre autres. Nos institutions se fragilisent et la défiance caractérise le rapport entre acteurs sociaux et dépositaires de la puissance publique.
Il est vrai que, l’élection de S.E le professeur Alpha CONDE, il y’ a près de 10 ans, devrait permettre aux acteurs sociaux d’observer une trêve sociopolitique afin, d’aller vers la stabilisation de notre pays et garantir sa croissance économique. D’autant plus que, les récents stigmates de la révolution de janvier et février 2007 et du carnage du stade de 28 septembre 2009, restent encore vifs dans les cœurs et les esprits des guinéens ; des victimes et parents de victimes. Cependant, il faut reconnaitre que, la gouvernance actuelle, s’est heurtée à la ferme résolution de la classe politique de l’opposition de rendre cette gouvernance difficile. La philosophie politique actuelle en Guinée, repose uniquement sur les stratagèmes de conquête de pouvoir quel qu’en soit le prix à payer et sans jamais proposer de solutions alternatives.
Dans la forme et dans le fond, la méthode et la stratégie actuelle adoptées par les politiques, paraissent pour bon nombre d’observateurs périlleuses pour la république et d’ailleurs pour l’existence de notre démocratie. Les évènements successifs illustrent cette situation de fait qui impliquent, désormais les différentes structures sociales et de professions indépendantes, amenés à prendre parfois des positions les plus extrêmes. Nous vivons désormais dans un écosystème social et professionnel hautement politisé.
A qui la faute me dira-t-on ?
Pour ma part, la responsabilité est partagée. D’un côté, nous sommes en face d’une stratégie de l’opposition agressive et violente dont le seul but consiste à chasser Alpha Condé du pouvoir sans offrir une alternative crédible. Plus grave encore, elle prône la dictature de la pensée unique. Nul désormais, ne doit apprécier les avancées enregistrées par le régime CONDE sans se faire lyncher sur les réseaux sociaux, les radios et télévisions. D’ailleurs, il n’est pas rare de voir le président lui-même se défendre et défendre son bilan et pourtant élogieux sur bon nombres de secteurs. Le récent rapport du FMI classant, la République de Guinée au rang de 4ème pays d’Afrique ayant une forte capacité de résilience de l’impact négatif de la covid-19 sur les économies, avec un taux de croissance d’après covid-19 qui avoisinerait 7,6% (Financial afrik, consulté le 12 Mai 2020), confirme la diversification des activités économiques du pays.
De l’autre, la lenteur des autorités publiques dans la manifestation de la vérité sur les tueries jusque-là non élucidées lors des marches de l’opposition et sans qu’aucune procédure judiciaire n’aboutisse, consolide la banalisation de la vie humaine. Cela, contribue à la radicalisation des parents des victimes et favorise le repli identitaire. Il est de l’unique responsabilité de l’Etat, de dénicher les auteurs et commanditaires et de les traduire devant les juridictions compétentes. La manifestation de la vérité contribuera à l’apaisement et à la stabilité, mais son refus n’engendrera que haine et désordre.
Au centre enfin, nous sommes en face d’une jeunesse désorientée et pris au piège d’une classe politique égocentrique et affairiste. Bref, une jeunesse sans repère donc sans vision.
Quid de l’engagement de la nouvelle génération ?
La jeunesse doit avant tout, chercher à comprendre et à maîtriser les enjeux d’une lutte politique avant de s’engager, au risque d’être toujours victime du suivisme. L’éducation politique doit être d’abord la priorité. C’est pourquoi, nous devons au préalable apprendre à déconstruire nos mentalités qui reposent souvent sur des fondements subjectifs et irrationnels.
Il est bien de mentionner que, nous sommes heureux de voir les autres pays avancés et d’ailleurs nous les citons souvent en guise d’exemple et paradoxalement, nous sommes heureux de voir le nôtre patauger dans le meilleur des cas, au pire s’engouffrer. Nous devons agir pour la stabilité et la cohésion. Quid d’une loi d’amnistie générale par exemple?
A nos acteurs et leaders politiques à tous les niveaux, ce pays appartient aux générations actuelles et futures. Vous l’avez hérité de nos pères fondateurs, comportez-vous en bon père de famille.
Alpha Oumar Condé, Juriste