La septième (7ème) édition du salon international du livre de jeunesse se tient du 07 au 11 novembre prochain à Conakry. En prélude de l’ouverture de cette grande manifestation autour du livre de jeunesse, le directeur général des éditions Ganndal a accordé une interview à la rédaction de Mosaiqueguinee.com. Mamadou Aliou Sow redit l’importance de lire à un âge très précoce, annonce l’arrivée à Conakry d’une dizaine d’auteurs. Celui qui s’attelle à favoriser la lecture dès le plus jeune âge depuis plus d’une décennie en Guinée estime qu’il ne peut pas y avoir meilleur branding Guinée que des livres écrits par des auteurs guinéens, produits par des éditeurs guinéens, imprimés sur le sol guinéen. Aliou Sow répond aux questions de Mohamed Bangoura.
Mosaiqueguinee.com : Aliou Sow Bonjour ? Pourquoi un salon international du livre de jeunesse en Guinée ?
Aliou Sow : La septième édition cette année, puisque ce salon a été mis en place depuis 2017, nous avons profité du fait que Conakry était capitale mondiale du livre pour nous intéresser à la couche qui constitue l’avenir de ce pays, et tenant compte du fait de la rareté de matériels de lecture et de la faiblesse des habitudes de lecture chez les jeunes Guinéens, nous avons dit pour pouvoir inculquer des habitudes, des compétences de lecture dès le plus jeune âge et pour que les enfants puissent développer des habitudes tout au long de la vie, des habitudes de lecture et l’amour du livre, il faut créer un instrument spécial et c’est ce qui nous a motivé à créer ce salon international du livre de jeunesse de Conakry qui est aujourd’hui grâce à Dieu la manifestation la plus importante en Afrique francophone concernant les livres de jeunesse. Au point que certains pays comme le Maroc, le Cameroun, la Côte d’Ivoire et d’autres sont en train de créer leur salon de livres de jeunesse s’inspirant de l’exemple guinéen, donc pour nous, c’est une fierté et ça prouve que nous avons eu raison de nous intéresser à ce secteur spécifique du domaine du livre. On ne s’occupe pas que des adultes, il faut s’occuper des enfants, et nous produisons des livres et en français et des livres de jeunesse dans les langues nationales et nous allons le prouver cette année.
Pourquoi s’intéresser à la couche juvénile ?
Le premier facteur que je vais citer, c’est que très certainement comme vous le savez bien c’est dès le plus jeune âge que l’on peut inculquer les habitudes qui vont être les plus durables dans la vie future jusqu’à la vie adulte de l’enfant. Si l’on veut construire des sociétés de lecteurs, on doit commencer par les enfants et donc ceux qui sont à l’école. Nous nous considérons que les livres de jeunesse sont des compléments de manuels scolaires parce qu’ils sont des facteurs importants d’amélioration des apprentissages scolaires, c’est vérifié partout. Les élèves, on nous dit souvent ne lisent pas. Comment les élèves vont lire quand ils ne savent pas lire? Comment vont-ils savoir lire s’ils n’ont rien à lire? Il faut donner d’abord de quoi lire, donc des livres de lecture pour la lecture plaisir, ça n’a rien de coercitif. Les manuels scolaires nous sommes obligés de les lire, les évaluations pédagogiques à la fin du primaire, du secondaire etc. Les examens nationaux sont basés sur les programmes. Les programmes eux-mêmes sont basés sur les manuels. Et nous nous prenons l’autre aspect. Parce que figurez-vous, lorsqu’on dit qu’on a eu 9% d’admis a un examen national dans le pays mais les gens oublient qu’au moins 8 enfants sur 10 jusqu’au collège actuellement ne savent pas lire et comprendre actuellement un texte basique. De cette manière, comment peut-on espérer qu’un enfant lise et comprenne un sujet d’examen ? C’est impossible, s’il ne sait pas lire et comprendre ce qu’on lui demande il ne pourra jamais répondre convenablement aux questions posées. C’est ça d’abord le premier facteur que les gens négligent. Nous nous mettons tous ces facteurs ensemble et nous focalisons sur les aspects fondamentaux dire donnons de la lecture aux enfants. Des livres de jeunesse récrits par des auteurs guinéens, produits par des éditeurs guinéens pour du lectorat guinéen. Donc nous connaissons le niveau de nos élèves guinéens, donc nous faisons en sorte la lecture qu’ils apprennent soit quelque chose de constructif pour le reste de leur vie scolaire et bien entendu que ça se répercute dans leur vie active. Si on veut une société guinéenne solide et ancrée dans un processus de développement durable demain il faut construire une enfance solide, une enfance avisée, une enfance déjà compétence de son niveau et ça ce sont les livres qui doivent le faire et qui peuvent le faire. C’est pourquoi nous disons organisons cette manifestation pour montrer aux enfants qu’il y a des livres de jeunesse qui s’adressent à eux, écrits pour eux, que ce n’est pas seulement la Guinée, il y a dans beaucoup d’autres pays des éditeurs qui font la même chose et qu’ils peuvent avoir ces livres. L’atout majeur c’est qu’en faisant le salon, nous avons aussi des partenaires comme le PNUD, l’UNICEF, l’institut français qui nous aident et nous distribuons des chèques livres. Nous avons une quarantaine d’écoles dans la zone de Conakry qui sont affiliées au salon chaque année que nous faisons venir et on a un jeu de lecture pour le primaire et un jeu de lecture pour le secondaire. Chaque école participante envoie une équipe quatre élèves deux garçons et deux filles qui vont compétir avec d’autres écoles d’autres Communes. Tous ceux qui se manifestent avec de bons résultats, nous leur offrons des chèques livres et ils sont capables avec ces chèques livres d’aller acheter n’importe quel livre de jeunesse qui leur plaise ils vont faire le tour des stands, des éditeurs guinéens et étrangers. Ils achètent des livres qu’ils veulent et ils mettent dans leurs cartables c’est pour eux, l’enseignant qui les accompagne ne peut pas leur retirer l’école non plus. Donc, pour nous, il faut que les livres commencent à entrer dans les familles. Et puisqu’en général les parents n’achètent pas, nous on va donner et c’est par le biais du salon, les activités éducatives et d’animation de nos auteurs, nous offrons ces livres et nous allons plus loin, nous offrons aussi des biblio manuels , on est dans un contexte où il n y a pas de bibliothèque dans les écoles, là aussi les enfants n’ont pas accès à de la lecture. Donc nous offrons aussi des biblio manuels qui sont un ensemble d’environ 250 livres de jeunesse qui sont dans une malle métallique qui peut circuler chaque jour à travers les différents classe de l’école pendant les heures de lecture donc nous offrons de la lecture concrète et par derrière nous formons les enseignants des écoles à qui nous donnons à l’utilisation judicieuse de ces manuels pour que le processus enseignement apprentissage puisse bénéficier et que les cours de lecture soient efficaces.
Êtes-vous soutenus par les autorités éducatives guinéennes? Quel est leur apport ?
Théoriquement Oui comme toujours mais pratiquement c’est non alors que ça c’est une activité à intérêt éducatif et à intérêt culturel aussi bien pour la Guinée que pour les autres pays. Lorsqu’on parle du Branding Guinée je suis désolé, il ne peut pas avoir meilleur branding Guinée que des livres écrits par des auteurs guinéens, produits par des éditeurs guinéens, imprimés sur le sol guinéen, il n’y a pas mieux et ça c’est durable parce que c’est une nourriture de l’esprit, on ne peut pas avoir mieux que ça mais on nous regarde comme si nous visons le ciel. Mais qu’à cela ne tienne, nous sommes forts aussi du soutien de nos partenaires internationaux qui font confiance à ce que nous faisons; qui mesurent la juste valeur éducative et pour l’avenir de ce pays qui nous soutiennent. Mais c’est évident que tant que l’État guinéen ne va s’impliquer à soutenir ce salon pour que les livres soient visibles, que les livres arrivent dans les écoles, on va tourner en rond pendant longtemps, en terme de qualité de l’éducation, en terme d’environnement lettré et en terme de construction d’une société de lecteurs dans ce pays.
Un appel à l’endroit de la junte qui dirige la Guinée ?
Je dirai aux autorités qu’on est là actuellement en pôle position pour que l’État intervienne. Nous prenons en compte les bonnes dispositions qui sont annoncées et nous espérons qu’avec les nouvelles orientations surtout au niveau du ministère de l’enseignement pré-universitaire nous voyons quand-même des gestes d’ouverture et nous souhaitons que ça se concrétise davantage pour que les livres de jeunesse, des éditeurs de Guinée et des éditeurs de la sous-région parce qu’il faut en même temps ouvrir l’esprit de l’enfant aux réalités de la sous-région environnante que ces livres puissent être achetés par l’État et mis à la disposition des élèves dans les écoles publiques au moins. Ensuite, il y a un appel très fort que nous lançons à l’endroit des parents d’élèves, il faut que les parents accompagnent leurs enfants au salon. Il ne faut pas croire qu’un parent parce qu’il n’a jamais été à l’école qu’il ne peut pas aider son enfant à choisir et à lire ne ce reste que décrypter de belles illustrations (…). La présence d’un parent même analphabète avec un enfant dans un salon prouve à l’enfant que c’est quelque chose d’important. Donc, il faut que les parents soient là. Les enseignants, les chefs d’établissements, nous leur envoyons des courriers tous, pour qu’ils viennent comme d’habitude et cette année, en plus des 16 pays qui sont attendus, ça fait quand même un vivier énorme d’ouvrages de jeunesse et aussi des auteurs de livres de jeunesse qui arrivent d’autres pays ; donc il faut qu’on puisse profiter de ça pour le bonheur de la lecture de nos plus petits et qu’on essaie d’inculquer l’amour du livre et le goût de la lecture à tous les enfants de ce pays commençant par Conakry.