Créé en 1979 et après avoir passé plusieurs années dans l’ombre, le Centre d’Étude et de Documentation Universitaire, Scientifique et Technique (CEDUST) se réinvente avec une nouvelle équipe dirigeante.
Cette équipe dirigée par M. Abdoul Gadiri Kaba est parvenue à doter l’institution, d’outils adéquats et à la pointe de la technologie, pour l’atteinte des objectifs assignés. Depuis la nomination de la nouvelle équipe et dans l’élan de la refondation prônée par les autorités de la transition, le CEDUST dispose aujourd’hui de plus de 20.000 ouvrages dans sa bibliothèque physique et plus de 250 millions d’ouvrages dans la bibliothèque numérique, premier du genre en République de Guinée. Impressionnés par cet état de fait, nous nous sommes approchés des autorités de cette organisation au service du développement pour en savoir davantage.
Dans une interview qu’il a accordée à notre rédaction cette semaine, le Directeur général de cette institution, M. Abdoul Gadiri Kaba est revenu sur le bilan de sa gestion, les perspectives mais aussi et surtout l’élan très promoteur de l’institution.
D’entrée, parlez-nous du CEDUST, de ses missions et objectifs ?
Le CEDUST est une institution qui a été créée en 1979 dans le cadre de la coopération franco-guinéenne et est venue pour appuyer le système d’enseignement supérieur et de de recherche scientifique de notre pays. Le CEDUST a pour mission principale d’offrir des services et ressources documentaires de qualité aux utilisateurs comme soutien au système d’enseignement et de recherche à travers l’étude, la collecte, le traitement, le stockage et la diffusion de l’information scientifique et universitaire ainsi que tout autre documentation actualisée ou mise à jour. Notre vocation est d’offrir à l’ensemble des utilisateurs, une documentation de qualité, actualisée susceptible de contribuer durablement au développement du capital humain et qui pourra résoudre les problèmes dans leurs différents secteurs.
Nous sommes en fin d’année et cela fait environ un an que vous êtes à la tête de cette nouvelle équipe du CEDUST. Quel bilan peut-on faire de votre gestion aujourd’hui ?
Dès notre prise de fonction, nous nous sommes appesantis sur trois principaux piliers pour engager les réformes.
Le premier a été d’améliorer la gouvernance, le second de renforcer les capacités des ressources humaines et le dernier a été de mettre en place une planification opérationnelle et stratégique. Dans le cadre de l’amélioration de la gouvernance, il était question pour nous de mettre en place un ensemble d’outils, notamment, le manuel de procédure administrative, comptable et financière de notre institution. Ensuite, la création d’outils de gestion, notamment, la matrice de suivi & évaluation du personnel, la matrice de suivi des décisions et recommandations, la mise en place du comité d’auto-évaluation et celui de gestion des AGR (activités génératrices de revenus), etc. Toujours dans le cadre de l’amélioration de la gouvernance, il y a la rationnalisation des ressources humaines, financières et matérielles. Il faut souligner à ce niveau, l’optimisation par la qualification des dépenses. Notre institution n’est pas suffisamment dotée, alors que nous avons de grandes ambitions pour mettre en œuvre les réformes nécessaires. C’est pourquoi, pour nous aider à produire plus de résultats probants, nous nous sommes engagés à nous baser sur la rationalisation et l’optimisation pour une meilleure gouvernance. Tout cela, c’est pour faire en sorte que nous parvenions à réaliser plus d’activités avec moins de ressources possibles. Cette politique nous a permis de faire plus de résultats que les années antérieures.
Le second point concerne le renforcement de capacités. À ce niveau, il faut noter que dès notre prise de fonction, nous avons fait un diagnostic pour voir réellement quels sont les problèmes dont souffre notre institution. Cela nous a permis de mettre en lumière les défis à relever, notamment, la formation du personnel, surtout la formation continue à travers les séances de renforcement de capacités.
A la suite de cela, nous avons mis en place un programme de formation du personnel, qui cadre parfaitement avec la lettre de mission de Madame la Ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche Scientifique et de l’Innovation, Dre. Diaka Sidibé. A ce jour, nous avons réalisé beaucoup de formations en faveur de l’ensemble du personnel. À ce niveau, et vu les challenges, nous avons estimé que, puisque nous sommes dans la refondation, il est absolument nécessaire d’utiliser des outils qui permettent d’avoir des résultats tangibles. Ce qui nous a amené à réaliser des formations sur le « Leadership et la conduite du changement », la « GAR », qui veut dire, Gestion Axée sur les Résultats. Il faut rappeler qu’avant aujourd’hui, la gestion était axée sur les moyens et les activités, mais aujourd’hui le paradigme a changé, l’approche GAR est en train de prendre le dessus dans le monde entier. Il faut également noter que le développement du capital humain est une des dimensions de la refondation, c’est aussi une dimension incontournable de l’évolution des sociétés et du développement des nations. C’est pourquoi nous avons planifié beaucoup de formations que nous sommes en train de réaliser pour renforcer les capacités du personnel, en vue de les rendre plus performants. Les formations étant continues, nous rassurons qu’il y en aura encore et toujours. Certaines seront même réalisées à court et moyen termes à l’étranger, notamment, en France, au Canada, en Côte d’Ivoire, au Burkina, etc. où nous avons des partenaires. Mais aussi et surtout, il faut souligner l’existence d’opportunités de formations en ligne que nous allons également exploiter dans le cadre des partenariats déjà scellés.
Le troisième point concerne la mise en place d’un plan d’action opérationnel (PAO) qui est annuel et d’un plan d’action stratégique, qui est quant à lui pluriannuel. Nous avons commencé par mettre en place le PAO qui fait mention des activités planifiées par notre institution. À ce niveau, il noter par exemple, la mise en place de deux programmes majeurs, à savoir le « déploiement de notre bibliothèque numérique » dans nos institutions d’enseignement supérieur, nos institutions de recherche scientifique et nos centres de documentation et d’informations . Ceci vise à créer un environnement aménagé au sein de ces institutions qui permettra à l’ensemble des travailleurs, notamment, les enseignants, enseignants-chercheurs, chercheurs, étudiants et autres d’avoir accès à la documentation de qualité en temps réel.
Aujourd’hui, votre bibliothèque numérique défraie la chronique, parlez-nous de vos bibliothèques, numérique et physique et leurs capacités respectives ?
Aujourd’hui, notre bibliothèque physique contient plus de 20.000 ouvrages physiques et la bibliothèque numérique, quant à elle, contient plus de 250 millions d’ouvrages, toutes disciplines confondues. Au regard des enjeux liés à l’accès et l’accessibilité, nous sommes entrain de créer des bibliothèques virtuelles à l’intérieur de nos institutions, à l’image de notre bibliothèque numérique, puisque tout le monde ne peut venir forcément au CEDUST. Donc, il faut créer des duplicatas un peu partout en Guinée pour rendre accessible la documentation de qualité à tous et à toutes. C’est ce qui fait qu’aujourd’hui que nous sommes présents dans toutes les quatre régions naturelles de la Guinée et nous sommes en train d’aller au-delà. In fine et de façon holistique, l’objectif est de déployer la bibliothèque numérique dans toutes les institutions d’enseignement supérieur, les institutions de recherche scientifiques, mais également, les centres de documentation et d’information, avec la possibilité d’avoir les mêmes documents de façon instantanée.
Il faut noter également à juste titre que nous avons un autre programme qu’on appelle communément « Tous connectés ». À la différence du premier programme, qui consiste à installer sur un espace aménagé et connecté, pour la circonstance, une bibliothèque virtuelle, faisant office de bibliothèque numérique, dans ce ce dernier programme, nous n’avons pas besoin de nous déplacer pour aller dans une bibliothèque. Où que nous soyons, nous pouvons avoir accès à la bibliothèque numérique à travers les terminaux digitaux, tels que les smartphones, qu’ils soient sous Android, Windows ou IOS. Pour ce faire, il faut juste installer l’application « CEDUST-PRO ». Elle est disponible sur toutes les plateformes de téléchargement d’application. Son usage est simple et aisé. À l’intérieur, il y a des ressources documentaires gratuites et une bibliothèque numérique qui nécessite un abonnement forfaitaire. Quand vous entrez dans cette application, vous avez accès à des centaines de millions la documents de tout genre et vous avez également accès au contenu de 612 revues scientifiques référencées et indexées, à dimension internationale. Ces revues produisent des articles les plus récents et les plus pertinents. C’est une grande opportunité pour les enseignants et chercheurs guinéens.
En fin, nous avons aussi mis en place un espace d’échange et de synergie entre les institutions. Ceux qui sont à Kankan, à Nzérékoré, Boké, Labé, Mamou ou à Faranah, ne peuvent avoir accès aux documents physiques des uns et des autres. Pour y pallier, nos ingénieurs travaillent avec nos partenaires pour créer un espace d’échanges et de mutualisation des ressources documentaires dans le cloud via un serveur local et à travées My SQL. Il s’agit d’une plateforme d’échange et de mutualisation des ressources documentaires qui, associée à la bibliothèque numérique va révolutionner l’univers de la documentation et favorisera la qualification de l’enseignement et la recherche en Guinée. C’est-à-dire que ceux qui sont à Kankan ou Boké, pourront mettre leurs documents à la disposition de ceux qui sont dans les autres institutions. L’objectif est de permettre aux chercheurs, enseignants et étudiants, d’avoir accès aux documents d’autres institutions sans avoir à se déplacer. Ladite plateforme s’appelle C-INNOV et pourra être utilisé à travers notre borne interactive, multimédia et intelligente qu’on a mise en place. Cet autre outil vient dématérialiser l’accès à la documentation et révolutionner carrément cet univers. Nous sommes vraiment dans l’innovation à travers la digitalisation et nous pensons que c’est un passage obligé et un processus irréversible aujourd’hui. Avec la digitalisation, nous avons pu faire beaucoup de choses en peu de temps.
Vous avez récemment pris part à 4ème édition du Forum de l’Etudiant Guinéen. Votre participation a-t-elle été remarquable ?
Oui, bien sûr, nous avons pris part à ce rendez-vous d’échange, de rencontre, d’exposition, de formation et de communication, avec efficacité, pour montrer à l’opinion nationale que le CEDUST existe et leur parler des opportunités que nous offrons. Et les retours, je veux dire les avis recueillis lors de ce rendez-vous démontrent à suffisance que des milliers de personnes personnes sont informés du potentiel que nous avons, ainsi que des opportunités que nous offrons. Certaines personnes ayant visité notre stand, ont mis à profit pour s’informer sur nos offres de services, notamment, sur l’utilisation de nos bornes, de notre application CEDUST-PRO, de notre scanner anti plagiat C-SCAN, etc. Beaucoup de responsables d’institutions ont également mis cette rencontre à profit pour signer des partenariats avec nous, et des étudiants pour installer le CEDUST-PRO. Par ailleurs, nombreuses ont été les autorités, au plus haut niveau, à visiter notre stand et à s’informer sur nos offres de services, notamment, Madame la Ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche Scientifique et de l’Innovation. Ce qui nous a beaucoup réconforté et a été une bonne chose. À part le FEG, il faut noter que nous prenons part à toutes les activités organisées par notre Ministère de tutelle.
À court terme, quelles sont les activités planifiées par le CEDUST ?
C’est d’abord de renforcer le déploiement de la bibliothèque numérique. C’est-à-dire, faire en sorte qu’elle couvre toute la République. Nous voulons réaliser cela d’ici à fin 2024. Notre deuxième chantier sur le court terme, c’est la vulgarisation de ‘’Tous connectés’’ même si la mise en place proprement dite n’a pas encore démarré. Nous voulons aussi renforcer notre partenariat sur le plan international. Nous avons besoin de partenariat pour nous accompagner dans notre démarche de réforme et de modernisation dans le cadre de l’innovation et la digitalisation que nous avons déjà entamées.
Le second point, consiste à doter, non seulement le CEDUST de scanner, mais aussi l’ensemble des institutions d’enseignement et de recherche de notre pays. Il s’agira des scanners qui permettront de scanner l’ensemble des documents physiques, afin de les numériser et donner la version digitale du document. L’autre projet qui est en cours et le restera longtemps, c’est le renforcement de capacités. Pour utiliser les outils dont j’ai parlé plus haut, il faut avoir la formation adéquate nécessaire pour les utiliser. On ne passera pas par mille chemins pour y parvenir. Nous allons continuer à renforcer les capacités du personnel pour nous permettre d’atteindre nos objectifs. Pour cela, nous avons déjà mis en place, un plan de formation dont l’exécution a déjà commencé. Comme ça sera le cas pour le renforcement de capacités, nous allons aussi continuer à renforcer la gouvernance.
Notre objectif est de devenir, dans 5 ou 10 ans, la plus grande institution de documentation de la Guinée, voire de l’Afrique de l’Ouest, pourquoi pas de l’Afrique. Nous allons fournir de la documentation numérique à tous nos partenaires présents en Guinée, mais aussi à l’étranger dans un élan de dématérialisation et de démocratisation de la documentation de qualité.
Votre mot de la fin
Je remercie les autorités de la transition qui ont mis tout en œuvre pour permettre à notre pays d’être sur les rails et d’avancer vers un développement harmonieux et inclusif. Quelle que soit votre volonté, si vous n’êtes pas dans les conditions requis et dans un environnement propice, vous n’atteindrez jamais vos objectifs. Les nouvelles autorités ont vraiment mis ce cadre pour nous permettre d’avancer. Je remercie aussi Madame la Ministre de l’Enseignement, Supérieur, de la Recherche Scientifique et de l’Innovation, Dre. Diaka Sidibé pour son leadership avéré et son sens de la responsabilité, afin que nous soyons performants.
Interview réalisée par Mohamed Nana Bangoura