Depuis ta mort, je cherche à écrire, mais je manque d’inspiration pour parler de toi au passé. Aussi , il y a beaucoup à dire que je ne sais par où commencer. Mais il le fallait. D’abord pour la postérité. Ensuite pour te faire plaisir, car tu ne manquais pas de me dire que tu aimes me lire. A outre-tombe, je suis certain, que tu apprécieras cette ultime plume. J’allais dire cette plume, qui sera la première d’une série que je vais m’employer à griffonner pour parler de toi, comme on s’était convenu un matin de 2022, dans ton salon cossu du quartier sacré cœur, à Dakar, où tu t’es établi, après que l’éternel a décidé la fin du règne de ton patron à qui, comme rarement on peut le voir sous nos cieux, tu es resté fidèle et loyal jusqu’à ton dernier souffle. Mais cela, non sans risques de préjugés et de susceptibilité dont t’as été victime. Alors que c’était une décision juste conforme à ta conviction qui n’avait rien à voir avec une volonté revancharde visant à s’engager aux côtés de ceux qui sont constamment reprochés d’être dans cette logique. Tu n’en avais que faire. Tu me l’as dit.
Ton riche et très varié carnet d’adresses qui t’a permis de maintenir le contact avec des grands hommes et chefs d’Etat de notre continent, ont facilité ta métamorphose, sans entrave vers le monde des affaires. Et ça, tu as toujours voulu que je me fasse écho de cette réalité, afin de démentir ces perceptions et préjugés négatifs qui ont fondé certaines croyances.
C’est ce que tu as appelé, la vie après le pouvoir.
Ce fut d’ailleurs le titre d’une grande interview que je devais faire avec toi à propos, au prochain rendez-vous qui n’aura jamais lieu dans ce monde ici-bas. Cette vie, tu s’y étais préparé. Tu savais et tu y croyais que quand l’hypothèse d’un retour au pouvoir est exclue, l’autorité qu’on a sur les hommes et le cours des choses s’en trouve irrémédiablement ébréchée.
Au-delà, tu n’étais pas sans l’ignorer, qu’il y a ensuite le regard des autres, mélange d’hypocrisie et de commisération, insupportable pour qui a un brin de fierté.
C’est pourquoi rien ne t’a surpris. Et comme si Dieu voulait que ce qui a bien commencé finisse bien, tu as vécu avec les privilèges d’un ambassadeur loin de ton pays qui t’a propulsé à cette altitude.
Ton contact avec les puissants du continent, hommes d’affaires et politiques, ainsi que ton mode de vie, dans un cadre policé sont restés intacts. Ce qui a changé, et qui était fort appréciable, c’est de vivre avec un naturel qui n’a cure du protocole.
Ainsi s’arrête l’aventure.
Avec moi aussi, ton Ndo, ce samedi matin, quand ton jeune frère Abdoulaye, DG du garage gouvernement, m’a annoncé la triste et bouleversante nouvelle de ta disparition. Comme par hasard, c’est le même qui m’a parlé de toi la première fois, et avec lui, plus tard, on a formé, pendant des années, avant que ta nomination n’intervienne, un trio presqu’inséparable.
On aura plus ces nuits blanches et les très longs échanges au téléphone en train de deviser des sujets de toute nature. Rien que pour ne pas se lasser.
Car entre nous, il n’y avait rien de tabou. Et pourtant, ces derniers jours, rien dans ton attitude ne laissait transparaître que la fin était proche. Comme quoi tu auras gardé la tête haute jusqu’au bout. Ainsi en a voulu l’éternel.
Va en paix Dimama, comme on aimait aussi t’appeler.
Mognouma Cissé