Les débats dans la procédure judiciaire engagée contre Ahmed Kanté, Claude Lorcy et Philippe Roger ont été clos à l’issue de l’audience de ce lundi 17 mars 2025, soit une année après l’ouverture du procès devant le tribunal de première instance de Kaloum. L’ancien ministre des Mines et ses coaccusés sont poursuivis pour abus de confiance et concurrence déloyale.
Lors de cette audience, le représentant de la société African Bauxite Corporation (ABC), Alexandre Zotov, partie civile dans cette affaire, répondait aux questions de ses avocats. Pendant une heure et demie, Me Alkhalay Mohamed Touré s’est employé à convaincre le tribunal de la pertinence des chefs d’accusation retenus contre les prévenus, à travers un feu roulant de questions.
Devant les juges, Alexandre Zotov a affirmé qu’Ahmed Kanté avait usé de ses relations au ministère des Mines pour partager le domaine qu’il exploitait. Il a dénoncé la mauvaise foi de ce dernier, qui se serait, selon lui, servi des documents d’ABC pour créer la société GIC.
« Ahmed Kanté, Claude Lorcy et Philippe Roger n’avaient aucune part dans mes sociétés. Ils travaillaient pour moi. C’est en vertu de cela que nous nous sommes rendus ensemble en Chine pour conclure l’accord de partenariat avec les investisseurs chinois. Cet agrément devait apporter 36 millions de dollars US pour finaliser le projet. On ne pouvait pas parler de difficultés d’exécution, car il était entièrement financé. C’est moi qui ai introduit Ahmed Kanté dans le projet, il était mon consultant, il travaillait pour moi. Il a participé à toutes les rencontres et connaissait bien le projet. Pourtant, il a utilisé l’argent de mes partenaires pour créer son propre projet. Il a usé de ses relations au ministère des Mines pour se partager le domaine. Il a pris toutes les données, abusé de la situation et fondé GIC pour remplacer ABC, devenant ainsi propriétaire majoritaire. Quant à la lettre d’amodiation émise par le ministre des Mines, Ahmed Kanté était derrière cette décision. Il sait exactement ce qui se passe dans ce ministère », a-t-il expliqué.
D’après lui, les actes posés par Ahmed Kanté et ses coaccusés prouvent à suffisance leur mauvaise foi. Alexandre Zotov met en avant les voyages effectués ensemble, les données qu’il leur a fournies, les photos prises, les contrats signés en leur présence et les documents de sa société dont ils se sont servis.
« Ces documents sont des preuves qu’ils travaillaient avec moi et connaissaient parfaitement le projet. S’ils n’avaient pas collaboré avec moi, ils n’auraient jamais eu accès à toutes ces informations. Nous nous sommes rendus en Chine pour signer l’accord de partenariat. Quant au document d’amodiation présenté par leur avocat, il n’a aucun sens. Ahmed Kanté l’a conservé pendant cinq ans avant de le produire aujourd’hui. Cela démontre qu’Ahmed Kanté et ses complices n’ont jamais agi de bonne foi. Mon projet n’était pas menacé, nous disposions de tous les documents techniques. Dire qu’il était mort-né, c’est une contre-vérité. Ils se sont précipités pour créer une nouvelle société, c’est purement de la mauvaise foi », a-t-il déploré.
Il ajoute qu’Ahmed Kanté est même allé jusqu’à faire croire à l’un de ses partenaires financiers qu’il agissait au nom d’Alexandre Zotov. C’est le cas de la société SMD Mining, dont la déposition à l’enquête préliminaire en atteste.
Au terme de cette déposition, le juge audiencier a interrogé les parties sur l’opportunité d’entendre les témoins.
Sur cette question, l’avocat de la partie civile a déclaré s’en tenir aux déclarations déjà faites par ces témoins devant les magistrats instructeurs, sollicitant ainsi du tribunal la clôture des débats.
De leur côté, les avocats de la défense ont demandé la récusation des témoins, estimant qu’ils étaient trop proches du plaignant. Ils ont néanmoins invité le tribunal à s’en tenir uniquement aux documents fournis à l’audience par les parties.
L’audience a finalement été renvoyée au 7 avril prochain pour les réquisitions et plaidoiries.
Rappelons que la société African Bauxite Corporation (ABC) reproche à Ahmed Kanté et ses coaccusés d’avoir perçu plusieurs dizaines de millions de dollars « en violation manifeste de la loi et au détriment d’Alexandre Zotov ».
Alhassane Fofana