Les gros porteurs continuent d’endeuiller des familles guinéennes. Six morts, plusieurs blessés dont certains grièvement, cinq véhicules endommagés, c’est le triste bilan d’un accident survenu dimanche à Dabondi-rails. A l’origine, un gros porteur qui s’est lâché sur une descente. Le système de freinage a dû lâcher.
C’est un euphémisme que de dire que rien n’arrête plus les engins lourds sur les routes guinéennes, ils y font la loi, la pluie et le beau temps, détenant s’il vous plait des permis de tuer délivrés à eux par celles qui font figure d’être nos autorités. Oui que ces forçats de la route n’ont plus de retenue, que voulez-vous ? Comment voulez-vous qu’il en soit autrement alors qu’ils ont roue libre et carte blanche, qu’ils agissent en territoire conquis où ils sont libres de tuer sans coup férir, où ils n’ont de cesse de broyer nos vies déjà miséreuses, déjà racornies par une pauvreté qui nous colle comme une seconde peau ? Il n’y a pas d’échappatoire, il n’y a rien à espérer que cela puisse changer, qu’un terme sera mis un jour à cette grosse pagaille, à ce désordre, à ce décor digne d’un pays abandonné à lui-même, d’un pays-jungle, où il est loisible à chacun et à tous de faire ce qu’il veut. C’est cela ma pauvre guinée, rien n’y fait ! Il en est ainsi depuis la nuit des temps, nos vies n’ont jamais rien représenté pour elles, ces pitoyables et inconscientes autorités, comment voulez-vous qu’il en soit autrement alors que nos vies n’ont pas l’équivalent d’un Kopeck à leurs yeux, elles peuvent être ôtées, hachurées, ratatinées sans que le moindre doigt n’ose se lever. Dans un tel univers de laisser-aller, de laisser-faire, on se croirait dans une pétaudière, comment voulez-vous que chacun ne veuille pas faire et se comporte comme bon lui semble ? Il en est ainsi des chauffeurs de ces forçats de la route, qui n’a pas été un jour ou l’autre confronté à leur indiscipline sans nom ? Oh qu’ils sont d’une effronterie, d’une insolence ineffable et inénarrable ! Croiser les, vous aurez la venette et le choc de votre vie. Mais rien d’étonnant à cela, eu égard le laisser-aller, le bordel foutu dans tout un secteur où l’incurie de celles qu’on appelle autorités le dispute à l’inconscience des citoyens qui se voient ainsi délivrer un blanc-seing à déconner à pleins tubes sans crainte d’être inquiétés outre mesure. Comment voulez-vous qu’ils ne se produisent à longueur de semaines des drames de l’acabit de Dabondi-rails, où six âmes humaines ont été déchiquetées à l’issue d’une cohue provoquée par encore un de ces mastodontes déchainés, ivre comme un bateau sans gouvernail à la dérive, écrabouillant au passage cinq véhicules, Dabondi-rails porte encore les stigmates de cette tragédie tombée sur lui comme un astéroïde dimanche soir. Avant lui, avant Dabondi-rails, que de quartiers ont subi leur bizutage amer, mais celui d’entre-eux qui s’en souviendra pour toujours, c’est bien Dabondi-mosquée où un carambolage emporta vingt six vies humaines, dans un décor de crânes broyés, de corps humains déchiquetés, exhalant une odeur acre de sang humain versé à tire-larigot. Dabondi, le martyr, Dabondi, le maudit, par son relief de colline escarpé, scrute son avenir dans un écran de fumée et de sang, oui Dabondi comme toute la guinée a de quoi être sur le gril, les vilaines pratiques ayant la peau dure et de beaux jours devant elles. Comment voulez-vous qu’il en soit autrement dans un pays où le contrôle technique est le cadet des soucis, on s’en moque éperdument comme de sa première chemise. Sivita, apparemment morte de sa belle mort, rechigne sous l’œil complaisamment complice de l’Etat, de passer la main ou tout au moins de permettre à d’autres sociétés de visite technique de fonctionner. La Socotac, ne demande pas plus, elle ne demande qu’à être opérationnelle et à contribuer à sauver des vies humaines guinéennes. Et quid de toutes ces mesures annoncées sous l’effet de l’émotion délimitant les heures de circulation des gros porteurs ? De Général Toto Camara à Resco, que de boniments, que de poudres jetées dans nos yeux ! Il ne saurait en être autrement quand on est capable de sacrifier des vies humaines sous l’autel de l’argent de la corruption, oui c’est cela la guinée de la malédiction, rien n’à faire !