Quatre mois après le renversement du régime d’Alpha Condé, le Comité National du Rassemblement et pour le Développement a finalement mis en place, le conseil national de transition.
Il s’agit de 81 membres, dont le président nommé par décret, qui vont siéger à l’assemblée provisoire.
La décision prise par le Colonel Mamadi Doumbouya à ce propos ne fait pas l’unanimité. Pendant que bon nombre de guinéens fustigent le processus de désignation des conseillers du parlement transitoire, d’autres s’opposent au choix porté sur Dansa Kourouma comme premier responsable de l’organe.
Pour Tierno Monénembo, la nomination du président du conseil national des organisations de la société civile guinéenne, qui selon lui fait partie des artisans du 3ème mandat d’Alpha Condé, justifie la volonté manifeste du président de la transition d’imposer un pouvoir autoritaire aux guinéens.
« Nommer par décret un organe censé faire office de parlement, c’est la plus belle manière de dire : « c’est moi le dictateur, qui n’est pas content ? ». Cette Transition est depuis le début une affaire de personne, une affaire de « Colonel », a-t-il déploré d’entrée de jeu, dans une interview accordée à un de nos reporters.
Ce célèbre écrivain guinéen reconnaît que « les principales forces politiques et sociales de ce pays ont été systématiquement écartées ».
« Mamadi Doumbouya voulait une chambre d’enregistrement, il l’a », a-t-il avancé.
L’auteur du Roman « les crapauds brousses » pense que le changement de régime en Guinée n’est que peine perdue. Le Colonel tant ovationné est sur le point de s’égarer.
« Et puis il y a un autre gros problème dans cette nomination, le président du CNT fut un ardent thuriféraire du 3ème mandat d’Alpha Condé. Le Colonel Mamadi Doumbouya nous avait pourtant promis qu’il n’y aurait pas de recyclage. C’est la preuve que l’on ne peut croire ni en ce qu’il dit ni en ce qu’il fait ».
« Quel dommage ! Cet homme que nous avions tous applaudi, cet homme qui aurait pu devenir notre sauveur, s’est dérouté, il a complètement raté son destin. Il s’est foutu une balle dans la tête. II ne compte plus et dans nos cœurs et dans nos têtes. Tant pis pour lui ! », a-t-il regretté avant de rappeler l’espoir que le Colonel Mamadi Doumbouya suscitait à sa prise du pouvoir.
« Voilà à peu de chose près, ce que je disais après son arrivée au pouvoir que du reste, j’avais chaudement applaudi : «si vous continuez comme ça, vous serez le plus grand guinéen des temps modernes mais si vous vous amusez à imiter vos horribles prédécesseurs, vous finirez pire qu’eux. » Eh bien, Colonel Doumbouya, vous finirez pire que Dadis Camara, pire qu’Alpha Condé ! », a-t-il rappelé.
Le récipiendaire du Grand prix littéraire d’Afrique noire en 1986, n’a également pas manqué de dénoncer le retour d’anciennes pratiques consistant à fragiliser le tissu social.
« Depuis le monstre Sékou Touré, chaque gouvernement guinéen porte la couleur ethnique et l’odeur familiale de celui qui le compose. Ce genre de mesquinerie n’augure de bon. Ce n’est pas comme ça qu’on fait l’unité nationale et donc la paix. Le gouvernement est le miroir de la société. Toutes les ethnies, toutes les régions et toutes les religions doivent pouvoir s’y refléter », a-t-il estimé.
Selon Tierno Monénembo de grands présidents comme Senghor, Modibo Keita et Houphouët-Boigny se sont illustrés dans le maintien de la cohésion sociale dans leurs différents pays, contrairement aux dirigeants guinéens.
Hadja Kadé Barry