Kidnappés depuis le 9 septembre 2024, Foniké Menguè et Billo Bah restent sans nouvelles, malgré les multiples appels à leur libération.
La situation devient de plus en plus inquiétante d’autant plus que d’autres portés disparus, ont été retrouvés morts, déclare le président de l’ONG « Avocats Sans Frontières Guinée », qui s’est confié à notre rédaction ce mardi 8 octobre 2024.
« La situation était inquiétante, mais elle est devenue encore plus inquiétante quand on a rendu le corps du colonel Célestin Bilivogui. Ces trois personnes (Célestin, Billo et Foniké) ont disparu de la même manière. Quant à Célestin, ça été dit qu’il a été arrêté à son bureau après une convocation du Général Balla Samoura. Son avocat a crié sur tous les toits, et on nous a fait savoir qu’on ne connaissait pas son lieu de détention. Personne ne savait où il était jusqu’au jour où quelqu’un a appelé sa femme pour qu’elle vienne identifier un corps qui pourrait être celui de son mari. Et cette pauvre s’est rendue à l’évidence. C’est malheureux ! La question que je me suis posé était de savoir qui a fait cet appel-là, si on nous a fait croire que ce numéro ne passe plus, où il a vu Célestin. Il l’a vu vivant ou mort et dans quelles circonstances. Personne ne nous a élucidé. », regrette-t-il d’entrée, avant de rappeler les circonstances dans lesquelles, les leaders du FNDC ont été également kidnappés.
« Quant à Billo et Foniké, arrêtés au domicile de Foniké par des hommes en cagoulés, leurs femmes ont crié sur tous les toits, et le barreau de Guinée avait fait une sortie. Suite à cette sortie du barreau, le procureur général près la cour d’appel de Conakry s’est réveillé brusquement pour dire à l’opinion nationale et internationale qu’il venait de s’informer, comme s’il ne vivait pas en Guinée. Mieux, ce jour, il a dit qu’il allait mettre en branle les services de sécurité pour qu’on puisse chercher à voir où ces deux-là se trouvent. Jusqu’à présent rien. », déplore Maître Christophe Labilé Koné au micro de mosaiqueguinee.com.
L’activiste dit être sidéré par le comportement du gouvernement de transition face à un phénomène aussi grave.
« Le 5 septembre, quand il fallait faire le bilan de l’an 3 du CNRD, j’ai écouté de façon sidérée, le général Amara sur le plateau de la télévision guinéenne, qui a dit que les disparitions et les tueries existent partout dans le monde. Donc, la Guinée n’en faisait pas exception, et qu’en République de Guinée on ferait mieux pour protéger les hommes et leurs biens. Il y a aussi cette sortie malencontreuse du ministre porte-parole du gouvernement, Ousmane Gaoual, qui disait qu’il y avait le droit de disparaître. Quand je recoupe tous ces faits-là, je ne peux que m’inquiéter du sort de nos deux compatriotes. », a-t-il fustigé.
Maître Aimé Christophe Labilé Koné se demande d’ailleurs comment la Guinée a pu atteindre un tel niveau d’insécurité.
« Que des extra-terrestres puissent enlever des citoyens sans que les autorités ne sachent où ils se trouvent ? C’est inquiétant ! Je crois que ceux-là sont des cas emblématiques, parce qu’eux ils sont visibles. Mais, j’ose croire qu’ils ne sont pas les seules personnes qui sont portées disparues aujourd’hui. Il y a des anonymes. J’ai encore en mémoire un autre militaire qui travaillait au camp Kwame Nkrumah de 36. Un certain Kalivogui, qui a aussi été enlevé dans son lieu de travail, et jusqu’à présent on ne sait pas où il est. Lui, il n’est pas connu du grand public. Mais est-ce que ce sont les seuls portés disparus? Je m’interroge. », s’est-il interrogé.
L’activiste des droits de l’homme rappelle que la Guinée est un État régi par des règles et principes, qui doivent être obligatoirement respectés.
« Si un guinéen commet une infraction, nous avons un mécanisme qui est gouverné par le code de procédure pénale et le code pénal. Toutes les infractions sont listées et réglementées. Le mieux serait d’appeler ces personnes-là pour qu’elles puissent répondre devant la loi. Qu’un jugement équitable soit rendu dans un délai raisonnable. Si au terme du procès, les prévenus sont reconnus coupables de quoi que ce soit qu’ils puissent être condamnés conformément aux dispositions qui se trouvent dans les différents codes. », rappelle-t-il.
Le président de l’ONG « Avocats Sans Frontières » plaide donc pour le respect de la dignité humaine en Guinée.
« Enlever des individus, les faire disparaître, après rendre les corps, c’est inquiétant. Il y a eu deux cas : Sadiba et Célestin. La liste est longue. Il faudrait quand même respecter la vie de l’être humain en République de Guinée. Ces frères et sœurs qui disparaissent sont des pères de famille et des mères de famille. Leurs familles ont besoin de leur affection, il ne faudrait pas qu’on puisse chagriner toutes ces familles. Nous ne sommes pas des extra-terrestres, nous devons être soumis aux mêmes lois, et qu’on nous accorde les mêmes droits. », a-t-il plaidé.
Hadja Kadé Barry