Les sociétés africaines d’hier avaient dans leur fonctionnement une grande influence sur les générations montantes. L’éducation des enfants et des jeunes par les anciens reposait sur la connaissance des conduites en société (les rôles et responsabilités en famille, le vivre ensemble, le respect de la parole des sages, la résolution des problèmes sous l’arbre à palabre, etc.).
Au fil des ans, elles connurent des mutations qui prennent appui sur la mondialisation avec sa cohorte de mode de pensée, de vie et de fonctionnement (démocratie, internet etc.), en déphasage avec le processus de socialisation des peuples noirs.
Cette forme de gouvernance de nos sociétés qui a pourtant aidé de manière conséquente à l’éducation des moins âgés, n’est qu’un souvenir de nos jours.
Avec la nouvelle ère, certains acquis des temps modernes (la liberté, la démocratie etc.) sont parfois utilisés de manière extravagante et exagérée. Parlant de la liberté, elle est vécue par beaucoup d’Africains en général et beaucoup de Guinéens en particulier comme une fin en soi. Ils ne donnent aucune limite à leur liberté et cela engendre parfois des clivages aux conséquences énormes.
Ce libertinage est constaté dans presque tous les domaines de la vie humaine et plus précisément dans le jeu démocratique où d’ailleurs il connait une hausse apercevable instantanément.
Mais posons la question à savoir comment nous en sommes arrivés là depuis quelques décennies ?
Après les anciens schémas de socialisation qu’employaient nos sociétés et qui favorisaient une intégration effective et une maturité agissante, le relais de l’éducation est revenu aux familles (père et mère), dans un contexte moderne. Ce contexte moderne est surtout marqué par la vitalité démocratique qui se manifeste par la conquête du pouvoir à partir des urnes. Mais combien ont la maturité citoyenne et politique dans cette nouvelle façon de vouloir gérer la cité ?
De toute évidence pas beaucoup. Alors, les leaders politiques et autres leaders friands des positions d’honneur, utilisent tout le temps les communautés ethniques pour s’assurer des couvertures populaires impressionnantes. Cette situation a pris de l’ampleur à telle enseigne que dans les familles les opinions anti ethniques sont devenues les sujets de causerie les plus prisés. Les propos des parents dans les causeries dénigrent plutôt telle ou telle communauté en présence malheureusement d’adolescents qui progressivement s’habituent aux enseignements diviseurs développés par leurs parents et par la suite, installent en eux des pensées et des sentiments de rejet des communautés dénigrées. Dans ce cas, où se trouvent la maturité et la responsabilité parentale ?
Pour qui connait ce que représentent les parents biologiques pour des enfants, il est aisé de comprendre que les propos et messages exprimés par ceux-ci, sont d’une extrême influence. Imaginons que toute l’enfance et l’adolescence de la plupart des jeunes sont marquées par des discours haineux, des propos séparatistes, des messages de diabolisation de telle ou telle communauté surtout si elle a déjà eu un antécédent avec la communauté de son dénigreur.
Des jeunes qui ont grandi dans une telle atmosphère peuvent être comment sinon que violents vis-à-vis des fils et filles des communautés dénigrées. Aujourd’hui, aucun fils de la Guinée ne peut avouer avoir échappé à cet état de fait en raison des proportions que connait l’ethnocentrisme en Guinée.
Néanmoins, des options courageuses telle le dialogue culturel, les sensibilisations par voie de presse etc. Peuvent s’ils sont employés à temps inverser la tendance et permettre la consolidation du tissu social dans l’intérêt de tous les fils et toutes les filles de notre pays.
Jean Paul Lamah (Sociologue, acteur Peacebulding)