Alpha Condé aura attendu son troisième mandat, pour changer de fusil d’épaule, dans sa manière de gouverner. Cette abjuration se fait toutefois, à pas comptés, pour un président dont les deux premiers mandats n’auront été qu’une période de probation, au grand dam d’un pays, qui a pourtant soif de changement.
C’est à la faveur de son troisième mandat, arraché à la hussarde, que le président de la République veut enfin sortir de sa torpeur. C’est du moins ce qu’il laisse entendre à travers son « gouverner autrement ». Cette révolution culturelle, tarte à la crème, devenue le slogan du gouvernement.
Monsieur le président de la République affiche ainsi l’image d’un potasseur, constamment sur la brèche, ce, depuis sa réélection pour un troisième mandat.
Répétant à l’envi sa détermination à sortir des sentiers battus. Cette profession de foi du Professeur Alpha Condé, est en effet la petite musique qu’on entend dorénavant au gré des conseils des ministres. Comme lors du dernier conseil, tenu le jeudi dernier. Réunion ministérielle lors de laquelle le président aurait insisté sur « le caractère irréversible de son programme de ‘’ Gouverner autrement’’. Exhortant au passage le Gouvernement à entreprendre une véritable révolution culturelle afin de moraliser la vie publique ».
Alpha Condé aurait aussi invité ses ministres « à mettre le patriotisme au cœur de toute action publique et de garantir une transparence totale dans la gestion des affaires du pays. »
Le chef de l’État se serait dit « attentif à tout cela et prévenu qu’aucun manquement ne sera toléré, ni pardonné », à en croire le compte rendu du conseil ministériel.
En attendant de voir à quoi mènera cette cadence accélérée du changement dans le mode de gouvernance actuel, les contempteurs du régime qualifient ces annonces présidentielles, de propos d’estrades. Allant jusqu’à caricaturer le président sous les traits d’un vendeur de fumée.
A dire vrai, ces observateurs ne font que juger sur pièces, ce qui est posé comme acte par le président dans le cadre de sa révolution culturelle. Ils arrivent ainsi à la conclusion que rien n’est visible sur le terrain. Que des effets de manche.
Comme si le casting avait été faussé dès le départ, avec la reconduction du gouvernement, quasiment dans son entièreté. Le grand soir qui devait provoquer l’électrochoc au sein de l’opinion n’a pas eu lieu.
S’ensuivra l’omerta du gouvernement sur l’affaire « Nabaya Gate », une ministre soupçonnée d’avoir détourné 200 milliards GNF. L’exécutif préfère plutôt bander les muscles contre les opposants au troisième mandat, qui sont cueillis et emprisonnés. Quand ils ne sont simplement pas victimes de bavures, que des ONG de défense des droits humains attribuent à nos forces de défense et de sécurité. L’autre facette de cette tragi-comédie est le chiffon rouge qu’on agite sur les cadres subalternes. Des sous-préfets et autres agents protecteurs de la nature dont la mise sous éteignoir est brandie comme des trophées de guerre, dans la lutte contre la corruption. De quoi saper le moral de l’opinion, quand on sait que les véritables bandits à col blanc mènent grand train. Et que c’est plutôt le menu fretin qui paie le pot cassé, en lieu et place des fossoyeurs de notre économie.
Monsieur le président, pour « Gouverner autrement », il faut débarrasser d’abord la Guinée de son talon d’Achille, qu’est la justice sélective. Autrement, ça ne serait qu’un slogan creux. Un de plus.
Mamadou Dian Baldé