Les conseillers nationaux sont de retour à Conakry après avoir passé quelques jours à Mamou dans le cadre d’une session plénière délocalisée. Quel est le constat fait sur le terrain et quel bilan faut-il tirer de cette immersion. Mohamed Bangoura a interrogé l’ancien Bâtonnier Me Mohamed Traoré, conseiller national.
Interview !
Mosaiqueguinee.com: Me Traoré, quel bilan faites-vous de votre séjour à Mamou dans le cadre de la session plénière délocalisée du CNT ?
Me Mohamed Traoré : Sans être le porte-parole du CNT, je peux dire que le bilan, par rapport aux activités qui étaient inscrites à l’agenda, est très satisfaisant. En ce qui concerne ses activités législatives habituelles c’est-à-dire l’examen et l’adoption de lois, le CNT a voté trois lois d’autorisation. Il s’agit de la loi autorisant l’adhésion de la Guinée au Centre Ouest-Africain de Recherche et de Services scientifiques sur le changement climatique et l’utilisation adaptée des terres (WASCAL), l’autorisation de ratification de l’accord de prêt entre le Fonds africain de développement (FAD) et la République de Guinée, dans le cadre du projet de production alimentaire d’urgence (PPAU) ainsi que la loi d’autorisation de ratification de conventions de financement de l’Agence Française de Développement (AFD), dans le cadre du projet de structuration l’aval de la filière de gestion des déchets solides de Conakry- CTE Baritodé.
Quelles sont les activités qui ont été réalisées sur le terrain ?
Il y a eu d’autres activités qui s’inscrivaient encore dans le cadre de la célébration de l’an 1 de l’installation du CNT. C’est ainsi que des conseillers nationaux ont été déployés dans les établissements d’enseignement pour échanger avec les élèves sur des thèmes concernant notamment le civisme et la citoyenneté. Des conseillers nationaux issus des rangs des Forces de défense et de sécurité (FDS) ont été également mis à contribution pour discuter de questions liées au droit international humanitaire (DIH) avec leurs frères d’armes. Il y a eu une autre activité non moins importante, c’est la consultation gratuite au niveau de l’hôpital de Mamou. Près de 400 personnes malades ont eu droit à une consultation et à des médicaments gratuits. Avec des médecins généralistes et des médecins cardiologues, diabétologues notamment. Je n’oublie pas cette autre activité qui a consisté à peindre, par les conseillers nationaux eux-mêmes, l’école Boubacar Biro Diallo. Une centaine de drapeaux achetés par les conseillers nationaux ont été également distribués à plusieurs établissements d’enseignement. Ce qui m’a le plus marqué, c’est le fait qu’à l’occasion de cette plénière délocalisée, de nombreux citoyens ont eu l’occasion de voir comment l’institution parlementaire exerce son rôle d’adoption des textes de lois.
On apprend que vous aviez effectué un déplacement à la maison centrale de Mamou, dites-nous l’état dans lequel se trouve cette maison d’arrêt ?
Un groupe de conseillers nationaux auquel j’appartenais s’est rendu à la Maison centrale de Mamou afin de voir les conditions de détention et de vie des détenus. Cette activité se situe dans le cadre du rôle du CNT en matière de promotion et de protection des droits de l’homme. En effet, la situation des personnes privées de liberté est au cœur de la question des droits de l’homme. Sur ce plan, le tableau n’est pas reluisant comme dans toutes les autres préfectures de la Guinée.
Des conseillers ont rencontré doyen Boubacar Biro Diallo dans son village. Quel est le sens de ce déplacement ?
À l’occasion de cette plénière délocalisée, un hommage mérité a été rendu à l’honorable El hadj Boubacar Biro Barry, un des anciens présidents d’Assemblée nationale. Un homme qui, à un moment donné, a essayé tant bien que mal à faire de l’Assemblée nationale une institution véritablement indépendante du pouvoir exécutif.
Quelles sont les conditions dans lesquelles les détenus se trouvent ?
On a constaté l’insuffisance et l’inadéquation des infrastructures, le manque de personnel qualifié. Le manque d’eau et de médicaments a été également noté par tous les conseillers nationaux présents. Comme dans la plupart des prisons en Guinée, il n’y a pas de séparation entre personnes en détention provisoire, c’est-à-dire en attente d’être jugées et personnes condamnées, entre mineurs et adultes. Des personnes porteuses de maladies contagieuses comme la tuberculose sont » mélangées » à des détenus non malades dans des cellules d’à peine quelques mètres-carrés où il y a plus cinquante détenus.
Quelles solutions préconisez-vous pour pallier à ces difficultés et manquements ?
Je pense qu’il est temps de nommer des juges d’application des peines au niveau de nos juridictions afin qu’ils suivent l’exécution de leurs peines par les personnes condamnées. En effet, un juge d’application des peines peut prendre beaucoup de mesures permettant de désengorger les lieux de détention. De l’autre côté, la détention provisoire doit rester l’exception comme l’indique la loi. Cela permettrait aussi de réduire la surpopulation carcérale, avec tous les problèmes que cela crée, en attendant d’avoir des établissements pénitentiaires appropriés.
Quelle est la prochaine préfecture à l’agenda du CNT pour une session plénière délocalisée ?
Je ne sais pas si une autre plénière délocalisée est prévue et quelle préfecture ou région aura l’honneur de l’abriter. Ce que je sais, c’est que cette première à Mamou a été très appréciée dans cette préfecture. Il y avait quatre membres du gouvernement et quasiment toutes les autorités administratives et religieuses de la région. Dans tous les cas, il n’y a rien de mauvais à aller au contact des populations.
Interview réalisée par Mohamed Bangoura