Avec la nomination du Premier Ministre, en l’occurrence, Mohamed Béavogui, l’ameublement du Cabinet Présidentiel par la nomination du Colonel Amara Camara au poste de Ministre Secrétaire Général et de Djiba Diakité à celui de Ministre Directeur de Cabinet à la Présidence de la République ainsi que la structuration du Gouvernement, le Président du CNRD, le Colonel Mamadi Doumbouya, semble amorcer la Transition dont les grandes lignes sont clairement définies dans sa déclaration de prise du Pouvoir, le 05 septembre, et dans son discours d’installation, le 1er Octobre 2021, après avoir prêté serment.
Pour atteindre ses objectifs, qui expliquent et justifient aujourd’hui l’adhésion, le soutien quasi unanime des Guinéennes et Guinéens à leur nouveau Président, le Colonel Mamadi Doumbouya ainsi que sa popularité au niveau des populations sur toute l’étendue du territoire, le respect et l’admiration qu’il suscite hors des frontières Guinéennes, le Président de la Transition et son Premier Ministre sont condamnés à s’entourer d’une équipe composée de cadres sans doute compétents, mais aussi et surtout de moralité hors de tout doute, encore moins trempés dans de sordides scandales et affaires qui ont malheureusement émaillé la Gouvernance de ce pays, durant les 20 dernières années.
Le changement constitutionnel de mars 2020 et le 3ème mandat, du mois d’octobre de la même année, issu de ce tripatouillage sont assez récents pour que l’identification des initiateurs, concepteurs, acteurs, promoteurs et autres propagandistes de ce meurtrier projet soit facile. Nul doute, et il a parfaitement raison avec sa volonté de réconciliation et de recoudre le tissu social déchiré par la démagogie et l’opportunisme des cadres prêts à tout pour des intérêts personnels égoïstes, que le recueillement au Cimetière de Koloma, où reposent une partie des centaines de Guinéens massacrés à travers le pays pour atteindre la funeste détermination de conservation du Pouvoir et des intérêts, ainsi que la compassion aux familles de toutes ces victimes, expriment chez le nouveau Président une extrême douleur d’un père de famille sensible et meurtri par la longue liste de ses sœurs et frères tombés pour la défense de la Constitution. En plus de la liste du FNDC, le Président Doumbouya, le CNRD et son Premier Ministre devraient aller encore plus loin pour dénicher, écarter et même traduire devant les tribunaux tous ceux qui ont, de près ou de loin, participer, contribuer à ces tueries impardonnables d’un autre âge.
Mais, un autre crime tout aussi douloureux pour le pays et qui mérite une attention de premier ordre chez le nouveau Président est d’ordre socio-économiques avec la gabegie financière, les malversations de tous genres dont se sont livrés certains cadres contre la Nation. Sur ce terrain, le Colonel Mamadi Doumbouya a déjà donné le ton de l’intransigeance et de la fermeté lors de ses rencontres avec les Chefs de division administrative et financière (DAF) et les responsables des régies financières et autres établissements publics, tous désormais soumis à des restrictions comme les membres du défunt Gouvernement.
À ce niveau également, il convient d’aller encore plus loin, au delà des flagrances de ces 11 dernières années.
Il serait très important que le Président Mamadi Doumbouya et son Premier Ministre s’intéressent à des dossiers d’Etat qui fait l’objet de beaucoup de bruits dans de nombreux secteurs comme les Travaux Publics, la Santé, l’Éducation, les Mines ou le Transport.
Au niveau de ce dernier département, l’on se souvient qu’un des plus gros scandales a éclaté, en 2008, quand, ironie du sort, l’actuel secrétaire général, Cheick Touré, ministre intérimaire, était ministre des transports. Il s’agit précisément des soubresauts liés à la cession du Terminal à conteneurs du Port Autonome à Getma International par une Convention signée le 22 septembre 2008 par le ministre des Transports de l’époque, Cheick Touré. Le Contrat de cette scandaleuse concession impliquant l’actuel ministre intérimaire des Transports, Cheick Touré, et de nombreux cadres du département trempés dans ces malversations avait été pourtant dénoncé à l’époque par les successifs Gouvernements Guinéens.
D’abord par la Présidence de la République sous Lansana Conté.
En effet, dans une lettre datée du 4 décembre 2008, le ministre secrétaire général d’alors, Alpha Ibrahima Keira, a fait part à Cheick Touré, le ministre des Transports, des « insuffisances » du contrat de concession signé, à peine deux mois plus tôt, avec l’opérateur portuaire. Cette lettre dénonçait surtout le fait que le ministre Cheick Touré signe une concession, contrairement à ce qui a été discuté et autorisé par le Conseil des Ministres et portant uniquement sur le terminal à conteneurs, qui offre l’ensemble du port à Getma International. Le courrier de la Présidence de la République pointe également le fait que « le monopole qu’engendre cette convention entraînera pour l’État une perte énorme et certaine, en termes de recettes ». Avant d’intimer :
« Au regard de ces réserves et sur instruction de l’autorité, je vous demande de suspendre l’application de cette convention en vue de sa refonte totale ». Mais, le ministre Cheick Touré et ses collaborateurs passent outre et entraîne même Alpha Ibrahima Keira dans leur camp. Ils empochent, en contrepartie, la moitié des 14,201,096 € frais du ticket d’entrée. Et offrent le Port à Getma International.
Mais, le décès du président Lansana Conté, le 22 décembre 2008, fait suspendre le contrat. Et son successeur, Moussa Dadis Camara, en brandit la menace dès janvier 2009 avant que Blaise Compaoré n’envoie à Conakry, Gilbert Diendéré, son bras droit, défendre les intérêts de Getma. Victime de l’accident, Capitaine Moussa Dadis Camara est remplacé par le Général Sekouba Konaté. Ce dernier nomme Jean Marie Doré comme Premier Ministre et Mathurin Bangoura ministre des transports.
À la nouvelle équipe du ministère des transports ainsi qu’à d’autres hauts cadres qui ont refusé que l’argent soit payé au Compte du Trésor Public et exigé le cash, Getma International verse l’autre moitié des 14,201,096 €.
Il faut attendre l’arrivée d’Alpha Condé au pouvoir, fin 2010, pour qu’en mars 2011, Getma soit définitivement chassé des quais au profit du Groupe Bolloré. Mais, si le Président Guinéen nouvellement élu rompt le scandaleux Contrat de Getma International, il nomme à la surprise générale, le principal responsable de la rocambolesque cession, Cheick Touré au poste de secrétaire général du ministère des Transports.
Cette réhabilitation de son allié, donne les armes de la contre-attaque judiciaire à Getma International à l’égard de la brutale décision du Président Alpha Condé.
Ainsi, le 29 avril 2014, le Tribunal de l’OHADA rend un Arrêt et condamne la Guinée à indemniser la société GETMA International SAS du préjudice subi du fait de la résiliation, qui se décompose ainsi :
- Une indemnité forfaitaire de résiliation de 20,884,966 € ;
- Une indemnité de résiliation relative aux biens concédés de 3,234,995 € ;
- Le montant non amorti du Ticket d’entrée de 14,201,096 € ; et une indemnité relative aux stocks non restitués de 210,070 €.
Par rapport à cette condamnation, le Président Alpha Condé, dans une de ses sorties plus spectaculaires que décisifs, s’était montré très menaçant contre les auteurs de la cession à Getma International.
Devant ses nouveaux DAF, confrontés aujourd’hui à leurs calamiteuses gestions et les jeunes du RPG, le 03 mai 2014, Alpha Condé avec la même fougue parfois rythmée d’ironie, a dénoncé le contrat préalablement attribué à Getma et s’était réjouit par ailleurs, de la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire devant porter la lumière sur le dossier.
Il se trouvait, comme le signalait mosaïqueguinée, que les principaux acteurs de ce deal mal ficelé etait des proches collaborateurs du Président Alpha Condé
Il s’agit notamment de Cheick Touré à l’époque ministre des transports, aujourd’hui secrétaire général du même département et Ibrahima Keira, un des conseillers du Président et membre du bureau politique national du parti qui a porté au pouvoir ce dernier.
Lui aussi, était à l’époque, tout puissant secrétaire général de la Présidence.
Il se raconte partout, dans tous les milieux, tous unanimes là-dessus, que l’argent a coulé à flot dans le but de favoriser Getma-Necotrans dont l’offre paraissait dérisoire.
Ces dignitaires du pouvoir renversé, qui ont le génie d’être au devant de la scène dans tous les régimes, et qui étaient, les principaux concernés dans l’attribution du contrat à une société qui s’est révélée défaillante, n’ont jamais été inquiétés. Alpha Condé, comme d’habitude, a été détourné de son chemin, à cause des calculs politiques et a maintenu Cheick Touré jusqu’à sa chute, le 05 septembre 2021 en toute impunité.
En dépit de lourds préjudices causés à l’état Guinéen.
Cité également dans l’échec du Projet de Chemins de fer Conakry – Kankan – Kerouané avec le Groupe VALE du Brésil, Check Touré a également fait perdre à la Guinée une autre opportunité de même nature.
En effet, dans un partenariat commun, les chefs de gouvernements du Mali et de la Guinée envisagèrent d’unir leurs forces en introduisant une requête auprès du gouvernement Chinois pour la construction de la voie ferrée Conakry – Kankan – Bamako. Sous l’impulsion d’un grand cabinet d’infrastructures, une lettre d’intention ferme de financement des banques chinoises fut obtenue par l’un des plus grands Consortiums au monde en la matière, en l’occurrence CRCC(China Railway Corporation) qui fut reçu en grande pompe par Alpha Condé, qui leur offrît un dîner la veille de la signature du Protocole avec le ministre des Transports d’alors, Aliou Diallo.
Mais, coup de théâtre dès le lendemain de cette réception présidentielle. Alors que salle de conférence du ministère des Transports était pleine de monde qui attendait la signature salvatrice pour la réalisation d’un projet si important, le ministre annonce à l’assistance l’impossibilité pour lui d’engager l’Etat sous le prétexte du coût, alors que les études n’étaient pas à leur terme et le montant n’était nullement mentionné dans ledit document. Comme avec VALE, le secrétaire général, Cheick Touré a encore soufflé à l’oreille du président Alpha Condé pour le plus grand malheur de la Guinée.
Cependant, Cheick Touré n’est pas le seul sur la liste des hauts fonctionnaires guinéens qui agissent contre la Nation. Plus que jamais, le Président Mamadi Doumbouya est obligé à l’enquête de moralité des cadres. C’est à ce prix que la Transition répondra aux exigences des Guinéens.
Mohamed Kourouma Fakoly