Par RFI
La tension s’ajoute à l’attente après les législatives de samedi, en Guinée. L’opposition dénonce en chœur des fraudes dans le processus de décompte et de centralisation des résultats. Avant même la proclamation des résultats, dix de ses chefs se sont réunis lundi 30 septembre, affirmant qu’ils ne laisseraient pas commettre un «hold-up électoral». Accusations rejetées par le parti au pouvoir.
Avec notre envoyé spécial à Conakry,
«L’important n’est pas de savoir qui vote, mais qui compte les bulletins», disait avec cynisme Joseph Staline. Cette maxime, l’opposition guinéenne la reprend à son compte et dénonce d’ores et déjà des « tripatouillages », pour reprendre le mot de Sidya Touré.
L’opposition dénonce un risque de « hold-up électoral »
«Notre constat aujourd’hui est consternant. De la forêt en passant par la Haute Guinée, au Fouta (Djalon, ndlr) et en Basse Guinée, il y a eu des tripatouillages de tous genres», assure Sydia Touré, président de l’Union des forces républicaines (UFR), interrogé par RFI. « Le constat le plus alarmant que nous avons dans la capitale, après que l’opposition ait gagné les cinq communes, c’est la volonté déterminée du pouvoir de proclamer des résultats qui ne sont pas conformes à ce qui est en train de se faire dans les bureaux de centralisation », continue-t-il. Et Sidya Touré de se faire menaçant : « L’opposition républicaine n’acceptera pas les résultats de tripatouillage électoral tel qu’on est en train de le vivre ! »
Les opposants, réunis lundi autour de leur chef de file, Cellou Dalein Diallo, estiment que le vote a été « entaché de graves irrégularités dans toutes les régions du pays » et que « le pouvoir prépare un hold-up électoral ». Une stratégie pour le moins osée, alors qu’aucun résultat officiel n’a encore été annoncé.
Pour le RPG, l’opposition n’a « jamais été dans une dynamique électorale »
D’ailleurs, le Rassemblement du Peuple de Guinée (RPG), le parti au pouvoir, s’est empressé de souligner le paradoxe qui veut que l’opposition crie à la fois à la victoire et à la fraude. « L’opposition radicale n’a jamais été dans une dynamique électorale », estime Moustapha Naïté, porte-parole du RPG. « Elle ne souhaitait pas ces élections législatives. Et avant même que les résultats ne soient donnés, l’opposition crie à la fraude. (…) C’est paradoxal quand, d’une part, on crie à la victoire, et que de l’autre côté on crie à la fraude », note-t-il.
« Je voudrais bien savoir qui fraude en ce moment. Nous (au RPG, ndlr), nous disons qu’il faut continuer à avoir confiance en cette Céni. Nous allons attendre les résultats », pose-t-il, insistant sur la déclaration de l’Organisation internationale de la Francophonie et de l’ambassade des Etats-Unis, selon lesquelles « il n’y a rien de nature à impacter la sincérité du scrutin ». « Nous (au RPG, ndlr) en appelons à nos frères de l’opposition de savoir raison garder, et de ne pas, avant même que les résultats ne soient proclamés, brandir quelque menace que ce soit. »
La crainte d’une réédition de 2010
Tout cela trahit la tension latente qui règne, alors que l’étape cruciale de la compilation au niveau des circonscriptions bat son plein et que la commission électorale sera dans quelques jours chargée de valider ou d’invalider ces résultats. L’expérience de 2010, où la Céni avait invalidé des centaines de milliers de votes, a laissé des traces dans les esprits. Pour l’heure, l’opposition ne menace pas de relancer les marches, ni même de rejeter les résultats du scrutin, mais elle envoie un message sans ambiguïté.