Je deviens de moins en moins panafricaniste. Plusieurs de mes lecteurs et admirateurs risquent d’en être choqués et déçus. Je m’explique donc.
La Guinée, de par son histoire, a fait le choix le plus difficile. En 1958, pour l’Afrique, au détriment de ses intérêts, dans une circonstance particulière, elle a arraché- non pas une accession comme dans les autres pays francophones d’Afrique- à l’indépendance.
Pour la Guinée, reprenant la formule de Jacques Rabemanajara, <<la race des béni oui ne devrait plus plastronner>>. Le mot lustral lâché à la face du Général de Gaulle, initiateur de la Communauté et fondateur de la cinquième République en France, devait appeler à l’ablution les peuples africains qui avaient été souillés par des siècles de domination étrangère.
La Guinée a fait son choix comme le disait son leader, Ahmed Sékou Touré, <<le choix du piment avant le sel>>. Elle ne s’arrêta pas là. Elle ira, une fois encore au détriment de ses intérêts nationaux, soutenir les mouvements de libération en Afrique.
Cette lutte farouche contre l’envahisseur étranger lui a valu les courroux et les foudres de l’impérialisme. Déjà son ancienne puissance colonisatrice veille, en usant de tous les subterfuges, à tourner en échec ce qu’il convenait d’appeler à l’époque <<l’expérience guinéenne>>.
La Guinée s’engage dans une diplomatie militante au service exclusif de ce qu’elle appelait <<la patrie africaine>>. Pendant cette période active de sa diplomatie pour l’Afrique, d’autres pays du continent signaient des accords avec les puissances étrangères en dépit de certaines résolutions de l’OUA, notamment sur le problème sud-africain.
Consciemment ou inconsciemment, la Guinée sacrifiait son développement pour certains pays qui ne lui sont pas redevables aujourd’hui. Le rôle historique de la Guinée lui fait des jaloux sur l’échiquier africain, surtout avec ses voisins directs.
Malgré tout, cette Guinée sacrifiait ses intérêts nationaux pour l’Afrique. Une aube de mars 1984, Sékou Touré meurt des suites d’une rupture d’anévrisme. La Guinée est effondrée. Sékou Touré est inhumé avec tout le prestige de son pays.
La Guinée change totalement d’orientation. Il ne faut pas épiloguer sur cet épisode car vous devinez clairement ce qui s’en suivra. La Guinée, au terme des efforts consentis pour l’Afrique, est passée à l’opprobre par certains pays d’Afrique et surtout ceux de la sous-région ouest-africaine.
A écouter les prises de position de certains voisins, elles dénotent une satisfaction face à l’actuelle situation complexe de la Guinée. La Guinée, c’est le bon samaritain auquel il a été infligé une gifle ingrate. Non seulement conspuée de ses voisins sans conscience africaine, elle voit ses citoyens massacrés dans certains pays qu’elle a contribué- pour ne pas dire qu’elle a – libéré.
Les âmes conscientes se demandent bien quel intérêt à servir de cobaye pour l’Afrique. Pour revenir à mon cas, je suis désormais pour que la Guinée pense à elle-même, à son développement économique.
Elle ne doit plus prendre position pour un quelconque pays africain tant que ses intérêts économiques courent un risque. Elle est assez riche et lui il faut peu de temps pour se développer. Certaines prises de position de frères africains m’ont révolté.
Elles m’ont poussé à me lancer un défi qu’il faut vaille que vaille relever: faire de la Guinée la vitrine de l’Afrique de l’Ouest- sinon de l’Afrique. Je me suis juré de relever un jour ce défi historique de croissance. La Guinée doit penser à elle-même maintenant. Nous sommes pour l’Afrique, mais la Guinée d’abord!
Dramane Dede Diawara
Etudiant guinéen en France.