(Ce contenu n’est pas une position de la rédaction de Mosqueguinée.com. C’est une opinion) J’éprouve le sentiment de révolte quand je visite, comme c’est le cas toutes les semaines, les zones minières de la région de Boké, particulièrement. L’impression première qui se dessine, c’est l’abandon de l’Etat. On ne peut pas faire investir des millions de dollars par des étrangers et que les populations de ces zones ne ressentent pas la présence de l’Etat, c’est une insulte.
Le schéma a été inversé
L’histoire de notre pays sur le plan des investissements miniers reposait sur le schéma standard, la logique étant de faire une étude profonde, les approches, les infrastructures, la construction, le transport et le traitement même à une échelle locale ou primaire.
Aujourd’hui, c’est du fait de la pression économique mondiale, je suppose que les pays africains pauvres comme la Guinée ne sauraient obligatoirement passer plus de 7 ans avant de lancer un projet minier car j’estime que nous avons suffisamment l’expérience et l’expertise de réduire le timing des projets en tenant compte du fait que les matières premières ont des coûts volatiles et non maitrisés par le tiers monde. De ce fait, j’imagine mal la Guinée refuser une opportunité nouvelle d’investissement même si les promoteurs actuels sont la plupart des cas, des chinois. Ors, ils sont reconnus pas bon élèves en matière d’engagement sur le respect des normes environnementales et sociales. Une équation sérieuse solvable.
Le non-respect des normes environnementales, la faiblesse de l’Etat
Nous devons avoir en mémoire que si nous exploitons nos richesses à date, c’est bien parce qu’elles ont été gérées et réservées par les gouvernants antérieurs. C’est obligatoire pour nous nous autres de penser aux générations futures à travers l’intégration de valeurs sociales et environnementales dans toutes les dimensions des projets miniers, des plus petits aux plus vastes.
Tout simplement, nous pouvons satisfaire nos projets dans l’exploitation car la terre n’a de valeur que lorsqu’elle est exploitée, soit à travers l’agriculture, soit à travers les travaux miniers ou par les deux.
Bien que critiquées, les entreprises minières et les chinoises payent toutes les taxes, tous les impôts. Une parmi elles a au titre des taxes de défrichement, fait un paiement de plus de 11 milliards GNF à l’Etat seulement en 2017. Combien en 2016 ? Et combien de ce montant aura servi à reboiser par l’Etat les zones déboisées des villes qui sont touchées ?
Autre dimension, quelles sont les capacités de restrictions mises en place lorsque par exemple, les inspections environnementales sont effectuées et que le constat soit alarmant comme c’est le cas des rapports 2016, 2017 et même du premier trimestre 2018 pour certaines entreprises ? On ne doit pas monnayer certaines considérations légales par la protection des intérêts égoïstes, c’est malheureusement le comportement de certains cadres impliqués dans la gouvernance minière sur toute sa dimension.
L’exportation de la bauxite à outrance, Alpha Condé n’a pas fait un mauvais choix !
Chaque politique repose sur une vision, celle de la 3ème République est de faire de la Guinée, le premier exportateur de bauxite au monde. Ce n’est pas un mal en soit. La maitrise des flux des capitaux et la capacité d’orientation des ressources tirées de l’exportation conditionnent le déclenchement du progrès que la politique vend au peuple.
Plus que des verbes, le Gouvernement aurait mieux pu orienter les fonds des Industries Extractives vers d’autres secteurs porteurs et plus promoteurs de stabilité, d’emploi mais aussi de respect des valeurs d’éthique sociale et environnementale. Comme au Botswana, le secteur des mines renforce l’éducation, l’agriculture, l’énergie, le transport.
Il fut avoir une vision, chez nous elle ne manque pas, le président l’annonce chaque fois. Mais dans la pratique, il peine à l’apprivoiser. La notion de secteur minier transversal est mal cernée. Dès qu’on parle de mines, on pense que c’est le ministre des mines le seul acteur. Non, il y a l’environnement, l’éducation, l’agriculture, l’administration, l’économie, le transport…
Lorsque le Président de la République saura assainir le secteur en ayant le contrôle sur les revenus actuels des miniers et savoir projeter ceux futurs, on saura que le fait d’avoir choisi l’ouverture du secteur extractif est plutôt une bonne décision.
Abdoulaye Keita