Cette contribution est adressée à Monsieur Kassory Fofana, Premier Ministre, Chef du Gouvernement, à M. Moustapha Naité, Ministre des Travaux Publics, le Gouvernement entier et aux autres acteurs concernés dans la gestion des ordures dans notre pays. En tant que Coordinateur d’une Organisation de la Société Civile (COPE-GUINEE) et surtout Directeur d’un Cabinet de sondage d’opinions et organisateur à trois éditions du forum sur l’Assainissement et la Sécurité civile en Guinée. Il est hyper-important de contribuer à cette question sensible de la gestion des ordures à Conakry surtout en cette période hivernale.
Le Défi majeur dans la sauvegarde de la santé publique et le bien-être des citoyens est le déficit fondamental dans le système de gestion des déchets solides. Actuellement, les 2 millions d’habitants de Conakry produisent plus de 1.200 tonnes de déchets quotidiennement dont seulement 35% sont ramassés. La fébrilité des petites et moyennes entreprises (PME) (charrette à traction humaine pour la plupart), le disfonctionnement des services de transfert et de gestion de la décharge, le refus d’abonnement et de paiement par certains ménages constituent des maillons faibles du dispositif de gestion mis en place à Conakry ayant pour conséquence :
- L’apparition des dépôts sauvages dans la ville.
- La décharge principale non aménagée et envahie par les habitants.
- L’incinération pratiquée à décharge à grande échelle polluant la ville
- La Prolifération des mouches, moustiques, insectes, rats et souris source de maladies.
Le manque d’assainissement a été l’une des principales causes de la dégradation de l’état de santé et du bien-être des populations en Guinée, et en particulier dans la capitale Conakry. Le choléra est cyclique en Guinée avec plus de 7351 cas enregistrés dont 4268 à Conakry. Le nombre de cas de décès est établi à 128 dont 24 à Conakry. La diarrhée affecte environ 16% des enfants guinéens de moins de cinq ans. Le taux de mortalité infantile encore plus alarmant, est de 81,2 pour 1.000 naissances vivantes.
Le Système de gestion des déchets à Conakry fondé sur la Synergie « Secteur Public-Secteur Privé » est divisé en deux maillons principaux : le premier maillon comprend la pré-collecte et la collecte. Ce maillon était privatisé où 48 PME travaillaient dans 44 zones de collectes. Ces PME se faisaient rémunérer directement auprès des ménages bénéficiaires de leurs prestations. Le deuxième maillon était représenté par le secteur public où intervenait le defunt Service de transfert des déchets (SPTD) qui a été remplacé par une Agence Nationale de l’Assainissement et de la Salubrité Publique (ANASP) ; qui d’ailleurs avouons-le fait son mieux pour arriver au bout de cette lourde tâche aussi complexe que difficile. Le rôle de ce deuxième maillon consiste au transfert des déchets des points de regroupement à leur mise en décharge. Avant la création de l’agence nationale de l’assainissement, le Gouvernorat de la ville de Conakry finançaient les activités de transfert des déchets des points de regroupement à leur mise en décharge. Les communes, elles intervenaient sur les voies et places publiques en ce qui concerne le balayage et le désherbage le long des voies et places publiques. Le budget communal finançait cette activité. La Division Contrôle de la Propreté (DPC) assurait le contrôle de la ville et veillait au respect de la réglementation en vigueur.
En 2000, le système de gestion des déchets comptait 75 points de regroupement dont 40 aménagés. Compte tenu des difficultés ; certains conteneurs n’étaient pas régulièrement enlevés causant des nuisances aux riverains et entrainant leur destruction par la population en colère. Par conséquence, plusieurs points de regroupement ont été supprimés. Il ne reste aujourd’hui que 10 points de regroupement fonctionnels. Le nombre d’emplois permanent créés par les PME à considérablement diminué passant de 2843 en 2004 à 675 en 2013 soit une baisse de 76%. Le taux de pénétration des PME dans les ménages est aussi passé de 78% en 2003 à 35% en 2013.
Aujourd’hui, en dépit des efforts consentis par les uns et les autres, il existe encore plusieurs faiblesses dans le système de gestion des déchets à Conakry dont la non maitrise compromettra surement les chances de réussite du système actuel, notamment :
- -La fourniture inadéquate et insuffisante des services de ramassage de déchets en faveur des communautés ;
- Le faible taux de paiement des frais de collecte des déchets ;
- Le manque de gouvernance adéquate au niveau des PME et des services publics de gestion à tous les niveaux.
- Le manque de sensibilisation à l’hygiène et à la salubrité des ménages et des lieux publics ;
- L’absence de dialogue entre les élus locaux, les PME et les citoyens autour des questions d’hygiène et de salubrité ;
- L’inexistence de système de tri et de la valorisation des déchets, source potentielle de revenu.
HYPOTHESES DU PROGRAMME ET DE LA THEORIE DU CHANGEMENT :
L’analyse du programme repose sur 3 hypothèses principales :
i)-l’insalubrité de la ville de Conakry découle de la défaillance du système de pré-collecte, de transfert et de mise en décharge des ordures ménagères ;
ii)-face à cette défaillance les populations ont développé des comportements inciviques.
iii)-les déchets solides ménagers produits possèdent une grande quantité de matières organiques dont la décomposition peut entrainer la pollution de l’environnement donc des problèmes de santé et les mêmes matières organiques peuvent aussi jouer un rôle positif dans la restauration des terres pour une agriculture durable.
En rapport avec ces hypothèses, le but de ce programme est de créer un environnement sain et salubre qui améliore l’état de santé des populations des 5 Communes de Conakry. Ces pistes de solutions agiront sur trois axes. D’abord redresser le système de collecte et renforcer le partenariat public-privé. Pour réussir à cet objectif, il est impératif de redynamiser une campagne de sensibilisation des citoyens de Conakry sur l’hygiène et la salubrité visant au changement de leurs comportements qui impérativement être réalisé. Pour ce faire, il faudrait développer des séances d’animation/information qui viseront la réduction des ordures ménagères ou en œuvrant à convaincre les citoyens de la nécessité d’avoir un environnement sain pour diminuer les maladies. En outre, il faut intégrer les activités liées non seulement aux déchets mais aussi à la santé, à la création d’emplois et à la restauration des sols.
PAUL KAMANO
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