Dans un entretien accordé à la rédaction de Mosaiqueguinee.Com, le Secrétaire général de l’UGDD s’est prononcé sur les grands sujets qui font l’actualité. Qu’il s’agisse de la crise à la constitutionnelle, des aveux d’Etienne Soropogui, de l’affaire des 21 millions ou du retard de l’installation des conseils communaux, Nestor Kagbadouno ne passe pas par mille chemins pour donner son avis.
Interview.
Quelle lecture faites-vous de la crise à la Cour constitutionnelle ?
La Cour Constitutionnelle est une institution cruciale pour la démocratie guinéenne. Parmi toutes les institutions républicaines, c’est à elle qu’est conférée la charge d’être « la gardienne de la constitution ». Cela suppose qu’elle doit être le rempart qui protège la constitution contre toute sorte de violation pouvant émaner des autres organes de l’Etat.
C’est bien regrettable que cette institution soit le théâtre de ces interminables conflits qui ne devaient absolument pas avoir lieu. La crise qui la secoue actuellement est purement artificielle. Elle illustre l’une des caractéristiques fondamentales de l’administration publique sous la direction de M. Alpha CONDE : la prédominance du système clanique au sein de toute l’administration publique.
C’est pourquoi, moi je suis convaincu que tout ceci relève des manœuvres divisionnistes du régime de M. Alpha CONDE car la meilleure stratégie de gouvernance instituée par celui-là est celle du chao.
Cinq mois après les élections, les conseils communaux ne sont pas mis en place. Qu’en dites-vous ?
Ce retard ne doit pas être regardé comme un simple blocage dû à une difficulté de résolution du contentieux électoral local. Par contre, il s’agit d’une stratégie politique longtemps mûrie par la majorité présidentielle dans le seul but d’influencer le calendrier des élections législatives et par ricochet celui des présidentielles. Les manœuvres dilatoires constituent l’une des armes politiques les plus redoutables de M. Alpha CONDE. Il a usé des mêmes moyens en 2010 entre les deux tours, il a fait la même chose pour l’élection législative et même pour l’organisation des élections locales.
Il est temps que l’opposition sorte de son sommeil pour prendre au sérieux les agissements de ce gouvernement. Les conseils locaux jouent un rôle crucial dans le développement socio-économique de notre pays ainsi que la consolidation de la démocratie à la base. En outre, ils constituent la colonne vertébrale de l’administration électorale à la base car leur implication est fondamentale avant, pendant et après les élections. Si leur installation retarde, c’est notre système démocratique qui en souffre et l’opposition n’a aucun intérêt à en bénéficier.
Est-ce que la sortie d’Etienne Soropogui, confirmant que le rôle nocif de certains magistrats ayant falsifié les résultats dans les CACV vous réconforte ?
Pour moi, cette sortie dénote du désordre qui existe au sein de nos institutions républicaines en général et la CENI en particulier. L’UGDD, à l’instar d’autres partis de l’opposition, a toujours dénoncé le manque de transparence et de crédibilité des conditions dans lesquelles ces élections locales ont été tenues. Ces aveux qui viennent d’être faits par M. SOROPOGUI ne font que confirmer le manque de crédibilité que nous avions incessamment dénoncé dans le passé.
Si la sortie de M. SOROPOGUI est qualifiée de non professionnelle et inopportune, elle n’est tout de même pas dénuée d’intérêt pour les acteurs du processus électoral en général et les partis politiques de l’opposition en particulier.
En effet, elle consiste un appel à la conscience professionnelle des magistrats guinéens qui doivent savoir mettre à profit leur indépendance et éviter de falsifier les résultats sortis des urnes.
Pour l’opposition, il s’agit d’une information à prendre au sérieux pour pouvoir entrevoir dans l’avenir des mesures plus sûres visant à assurer la transparence des conditions d’organisation des élections mais aussi l’intégrité des résultats sortis des urnes. Donc l’opposition n’a aucun intérêt à condamner ces propos ; par contre, elle doit les prendre comme enseignent.
L’affaire des 21 millions de dollars qui auraient été détournés dans le circuit de la BCRG, comment l’avez-vous perçue ?
C’est avec indignation que j’ai appris ce scandale. En réalité, les scandales de détournement ou de tentatives de détournement sont monnaie courante dans notre pays. Cette nouvelle affaire rend compte, on ne plus clair, de l’état mafieux de la gouvernance au sein de notre administration publique.
Puisqu’aucune responsabilité n’a encore été établie à l’issue d’une procédure judiciaire, moi je demande à l’Agence nationale de la Promotion de la Bonne gouvernance et la Lutte contre la Corruption de s’activer pour ouvrir les investigations et dans le cas échéant, mettre en mouvement l’action publique contre les autorités et agents publics contre lesquels existent de réels soupçons d’actes de corruption.
Interview réalisée par Thierno Amadou M’Bonet Camara (Rescapé N04)