Chaque jour, matin et soir, sans aucun répit, la bauxite de Guinée est en route pour les différents ports miniers du pays, destinée à l’étranger, car la Guinée, après plus de 60 ans d’indépendance, ne dispose d’aucune véritable industrie de transformation locale sinon que l’usine Russal Friguia dont la relance, ne fait pas forcément tâche de bonheur comme à l’ancienne.
Arrivée en Guinée en 2017, une amie française, journaliste avait titré pour libération :
En Guinée, la bauxite ruisselle à sens unique, ici: https://www.liberation.fr/planete/2017/11/21/en-guinee-la-bauxite-ruisselle-a-sens-unique_1611645.
Cette situation telle que décrite dans ce récit bien équilibré, de mon point de vue, demeure une préoccupation majeure des populations de zones minières qui restent encore à l’attente d’un bonheur qui tarde à venir.
Pourtant, des prouesses, il y en a :
Bien que controversé, le ministère des mines et de la géologie affiche des résultats concluants. Des séries de formations pour les cadres du département, des équipements, la révision du code minier, les retombées financières locales et nationales sont entre autres de véritables succès à relater pour le grand public.
Rien qu’en 2017, selon le rapport ITIE, le secteur minier a mobilisé plus de 500 millions de Dollars US dans l’économie du pays.
En plus de ces paramètres, l’autre élément de comparaison est le nombre important d’emplois créés dans les zones minières comme Boké, Boffa, Télémélé même si certains dénoncent les conditions de travail dans certaines sociétés minières ou dans celles de la sous-traitance.
Le secteur minier guinéen a porté haut le drapeau du pays par la vitrine commerciale qu’il a suscitée notamment avec plusieurs dizaines de milliards en US, annoncés dans les investissements actuels et futures. L’on pourrait affirmer que le secteur est resté dynamique durant la dernière décennie.
Les populations locales attendent toujours
Avoir de l’eau potable, jouir du courant électrique et bénéficier des services de santé qualifiés, restent une équation à plusieurs inconnues.
L’État est visiblement absent, tel que le décrit ce jeune diplômé en Mines à l’Institut de Boké.
« Je suis triste pour mon pays, matin et soir, les camions et les trains ne s’arrêtent pas. Ils transportent autant qu’ils peuvent notre terre. Serait-il un deal idéal pour les responsables du haut lieu ? nos parents sont ici depuis des années dans la misère et la souffrance ».
Mamadou Oury Diallo, estime que l’État est faible, du reste ce qui justifie cette situation terrible selon ses mots.
Les taxes sont payées par les sociétés, or, aucune véritable trace de développement. L’essentiel pour certaines villes est de se satisfaire par les édifices réalisés par les actions communautaires et volontaires des sociétés. Dommage !
En réplique à toutes les récriminations de la part des populations, l’État a décidé de créer l’agence nationale de financement des collectivités, ANAFIC. Il a aussi initié le Fonds de Développement Économique Local, FODEL, tant attendu.
En attendant de savoir l’effectivité des projets annoncés pour le développement local à travers ces structures, la population continue à espérer un lendemain meilleur.
La bauxite, un service public est bien possible
Faire de la bauxite une richesse partagée, un bien public est bien possible. Il s’agit de gouvernance, donc de volonté politique. Que le ministère des mines continue à encourager les investissements, que les autres ministères, énergie, santé, agriculture et élevage, travaux publics…, utilisent les retombées minières pour faire valoir eux aussi des acquis dans toutes ces zones.
Ceci serait le résultat d’actions collectives au service du public. Tout est cependant le fruit d’une action forte du sommet pour asseoir une gouvernance plus participative et efficace.
Enfin, il faudra compter sur les jeunes, forces de la nation pour éviter de tout saccager lors des manifestations. Ceci serait au cas échéant, un recul du développement attendu.
Abdoulaye Keita