À l’issue de la procédure ouverte par le décret D/2019/0194/PRG/SGG du 13 juillet 2019, portant lancement de l’appel d’offre pour l’attribution d’un titre minier sur les gisements de minerai de fer des blocs 1 et 2 de Simandou, la Guinée, a affiché ainsi, sa détermination à enterrer tout espoir relatif au retour desdits blocs dans le portefeuille des partenaires historiques du projet Simandou.
Pourtant, le 24 octobre 2018, le cabinet Orrick, avait dans le cadre de son assistance
au gouvernement guinéen, entamé la reprise du projet d’exploitation des ressources en fer du Mont Simandou par Chinalco.
Il avait clairement indiqué que les plus grandes compagnies ayant pour activité l’exploitation du minerai de fer, Rio Tinto, BHP Billiton et FMG ne semblent pas avoir d’intérêt significatif pour les blocs de Simandou nord.
Quant à Vale, la situation est plus complexe. Les permis de recherche BSG-Resources leurs ont été retirés unilatéralement par l’État guinéen. Si un contentieux est en cours devant le CIRDI à l’initiative de BSG-Resources, aucune disponibilité d’informations sur le possible renouveau de l’intérêt de Vale pour les blocs Simandou nord.
Ajoutant que Chinalco, qui démontre un intérêt pour les blocs Simandou nord en plus
des blocs Simandou sud, n’a pas d’expérience ni d’actifs dans le secteur du minerai de fer. Or, le développement du Mont Simandou nécessite des connaissances pointues dans tous les domaines de l’exploitation des mines de minerai de fer. Sur sa liste des compagnies qui ne seraient pas intéressées, Orrick a mentionné Vale, Rio Tinto, BHP Billiton, Fortescue Metals Group, Anglo Ameriacan, ArcelorMittal, Cleveland Cliffs et MetalloInvest.
Le Cabinet Orrick soutient, qu’«à première vue, les grandes compagnies pouvant avoir le poids financier, nécessaire au développement des blocs Simandou nord ne sont pas intéressées par ce projet, à l’exception éventuellement de Vale, voire des sociétés américaines. Parmi les plus petites compagnies, l’intérêt potentiel paraît donc limité. Sur le plan international, l’abandon du projet par une société de premier plan comme Rio Tinto aura également nécessairement pour effet de rendre les investisseurs potentiels plus circonspects ».
Si cette position du Conseil de la Guinée était acquise, qu’est-ce qui justifierait cet
appel d’offre ? Au regard des frais de retrait du cahier des charges fixés à 300 000 $US
et remboursables en cas d’échec aux 2/3. Ne faudrait-il pas craindre un arrangement préalable à l’ouverture officielle de la procédure ? Serait-il nécessaire d’accorder une attention particulière à des intérêts brésiliens, suisses, mauritaniens, russes ou indiens ?
Le conseil de la Guinée croit savoir que « les compagnies minières chinoises centrées sur
la production de minerai de fer n’ont pas, à notre connaissance, la capitalisation nécessaire pour supporter un projet comme Simandou, à fortiori si les quatre blocs sont à nouveau réunis. Elles ont, en outre, une faible connaissance des investissements miniers dans
les marchés émergents ».
Et comme on devrait le savoir, depuis le 17 août 2012, lors d’une mission gouvernementale au Brésil, des officiels guinéens seraient en contact avec des investisseurs brésiliens, tels que BTG Pactual, B&A exploitation minière, AGN Investment et AOS. Sans oublier que par ailleurs, la société Énergie, Environnement et Mines (E2M) du mauritanien Taleb Abdivall, était devenue influente dans le secteur énergétique du pays. L’administration guinéenne, par cet appel d’offre, se réconcilierait-elle avec la société AIOG, détentrice d’un accord de financement des infrastructures de Simandou, jamais appliqué.
La comédie dans l’arène de Simandou ? Le 5 juillet 2016, peu après l’annonce par
M. Jean-Jacques Sébastien, de la décision de Rio Tinto de geler le projet de minerai de fer de Simandou sud, le ministre des mines et de la géologie, M. Abdoulaye Magassouba a écrit
au directeur général de Rio Tinto Mining & Exploration Limited, au directeur général
de Simfer S.A et au secrétaire du conseil d’administration de Simfer S.A, pour leur signifier
« sa vive préoccupation suite aux récentes déclarations du Chief executive of officer de Rio Tinto Plc ». Rappelant les obligations de Rio Tinto contenues dans le contexte « du cadre d’investissement » signé le 26 mai 2014, M. Magassouba a exigé, la poursuite du projet Simandou sud, dans le respect du calendrier contractuel, pour atteindre la date cible de
la première production commerciale.
Le ministre Magassouba a rappelé à la direction générale de Rio Tinto, qu’il lui incombe de mobiliser les investisseurs pour le financement des infrastructures, au lieu d’annoncer
la réduction des investissements et de l’effectif du projet.
Dans ce contexte et conformément aux obligations contractuelles des partenaires privés, M. Magassouba a ainsi, insisté dans sa lettre, « je vous enjoins d’une part, de remettre à l’État dans les plus brefs délais, les versions complètes et en langues françaises, de l’étude de faisabilité bancable de la mine et de l’étude de faisabilité bancable des infrastructures, afin de permettre à nos services et consultants d’en prendre connaissance et d’autre part, d’organiser au plus vite, une réunion afin que vous puissiez présenter à l’État les résultats de vos études (…) ».
Le ministre Magassouba n’a pas exclu, la mise en évidence des solutions alternatives appropriées, afin que le projet surmonte les obstacles, tout en exigeant le respect du calendrier convenu. Il a pour la circonstance été catégorique « dans cette attente, je vous mets en demeure de renforcer vos moyens humains et financiers afin d’être en mesure de respecter vos engagements contractuels et de vous abstenir de toutes déclarations publiques et décisions contraires à nos accords, aux lois et règlements en vigueur en République de Guinée (…) ».
Du 12 au 16 mars 2018, le gouvernement guinéen accompagné de la Société Guinéenne de Patrimoine Minier (Soguipami) et le groupe Chalco ont ténu une série des réunions à Paris en France, pour négocier la convention minière afférente au projet de bauxite de Boffa sud et nord dont la réussite conditionnerait la relance du développement du projet d’extraction du minerai de fer de Simandou sud.
Selon un membre de la délégation guinéenne, « ces réunions sont une suite des rencontres précédentes, entre la Guinée et la partie chinoise, à Pékin en Chine, du 25 au 31 janvier 2018 » et « aux commentaires des avocats de Chalco sur les 47 points en suspens, pour la conclusion rapide de la convention minière du projet de Boffa qui, conditionne la reprise du projet Simandou sud qui est, la seconde partie du partenariat stratégique sino-guinéen ».
Selon une version du procès-verbal de cette réunion consultée par l’enquête, « durant ces négociations, il a été discuté, du régime fiscal et douanier ainsi que des modalités de mutualisation du fleuve Fatala/Rio Pongo. Le groupe de travail est parvenu à un accord sur la quasi-intégralité du régime fiscal et douanier à l’exception de la durée de la stabilisation de 25 ans, demandée par Chalco en lieu et place de celle de 15 ans prévue par le code minier en vigueur. Chalco souhaite que le champ d’application dudit régime de la convention s’applique à toutes les sociétés partenaires comme Cosco et Yantai Port ».
Les parties aux négociations à Paris ont décidé de quelque chose d’étrange, notamment en matière de transparence. Précisant qu’« une fois l’ensemble des étapes ci-dessus réalisées, le secrétaire général du ministère des mines et de la géologie se rendra à Pékin, pour rencontrer, en tête-à-tête (sans avocats ni équipes de support et sans autre personne qu’un interprète indépendant), le PDG de Chalco et, trancher l’intégralité des points laisser en suspens ».
De son côté, M. Magassouba, Ministre des mines et de la géologie qui avait toujours refusé de renouveler, pour une année de plus, le protocole d’accord axé sur la relance du projet Simandou, signé sous l’égide du Chef de l’État guinéen en octobre 2016, était en Chine pour, affirme une source proche du dossier, « discuter de Simandou avec la direction de Chalco ». Cette source confirme que « durant la période du 21 au 29 mars 2018, le ministre Magassouba devrait rencontrer, à Singapour le PDG de Chalco. Tout comme M. Magassouba y rencontrerait M. Sun Xiushun, PDG du consortium SMB-Winning et Madame Wu Wei, PDG de la société TBEA Guinée ».
En septembre 2018, des hauts cadres de l’administration guinéenne étaient également mobilisés, à Conakry et Paris, pour l’analyse technique du rapport d’étude final réalisé par Orrick, dans le cadre de « l’assistance au gouvernement de la République de Guinée pour la reprise du projet d’exploitation des ressources en fer du mont Simandou par Chinalco ».
Du 3 au 4 septembre 2018, plusieurs chefs d’État et gouvernements africains ont participé à Beijing, « aux travaux du forum sino-africain sur la coopération » ; parmi lesquels, le guinéen Alpha Condé. Mais ce séjour en Chine du chef de l’État guinéen, n’avait rien changé dans les relations tendues entre l’administration guinéenne et les partenaires, Rio Tinto et Chinalco, tous engagés dans la mise en œuvre de la restructuration de l’actionnariat de Simfer Jersey, qui est le véhicule d’investissement du projet d’extraction du minerai de fer de Simandou sud.
Une source rapporte que « la rencontre entre Alpha Condé et une équipe de Chinalco conduite par Ge Honglin a été assez courte, car le président Condé avait compris qu’il ne pouvait rien obtenir de nouveaux, de ces investisseurs chinois ». Cette source informe que
« le ministre Magassouba était si fâché contre Chinalco, que le 10 septembre 2018, il a adressé une lettre commune aux actionnaires de Simfer pour leur annoncer que la République de Guinée ne peut que marquer son désaccord ». Quant aux affirmations comme quoi, Simfer S.A serait en conformité stricte avec ses obligations, Simfer S.A est et demeure, à ce jour, en défaut par rapport à ces obligations prévues par le cadre d’investissement et, plus récemment, sur la caractérisation de plusieurs des cas de retrait de la concession prévue par le code minier applicable au projet de Simandou sud.
Cette source qui a consulté cette correspondance de Magassouba avec pessimisme mettant en exergue la colère du ministre et, qui est parvenue à la conclusion qu’« au-delà de toute posture, l’état actuel du projet manifeste indiscutablement une défaillance des actionnaires privés de Simfer S.A et, la Guinée estime avoir fait preuve, dans ce dossier, de toute la patience et de l’esprit constructif requis pour une exécution de bonne foi de nos accords ».
- Magassouba, cité par un de ses collaborateurs a noté, non sans amertume que, « par ailleurs, Simfer S.A et ses actionnaires ont à nouveau pris le parti de ne pas donner suite aux demandes formulées dans mon précédent courrier quant à la fourniture de certains documents essentiels, à la ténue des discussions éclairées sur le développement ultérieur de ce projet ».
Pour un autre collaborateur de Magassouba, suite à la déception consécutive aux rencontres de Beijing suivie d’une concertation entre le ministre Magassouba et le Premier ministre Ibrahima Kassory Fofana, le gouvernement a convenu qu’« un tel comportement, s’il devait perdurer, ne pourrait qu’être analysé comme manifestant une volonté de blocage du processus de développement du projet Simandou sud, dans l’intérêt de seules parties privées et en violation des engagements envers la Guinée ». Le gouvernement guinéen cité par notre source, trouve qu’« il n’est en effet pas convenable, que des discussions entre actionnaires sur la modification de l’actionnariat d’une société minière aboutissent à un blocage complet de toute activité sur le terrain pendant près de deux ans. Il n’est pas davantage concevable qu’un actionnaire repreneur, qui figure au capital social de Simfer S.A depuis des nombreuses années, refuse d’initier des discussions avec l’État sur les futures modalités de développement du projet repris, avant d’avoir effectivement signé avec son coactionnaire des accords de reprise ».
Le gouvernement guinéen semblait désormais résolu à affronter les actionnaires de Simfer sur la base des clauses compromissoires, par le fait qu’il soit déterminé à mettre un terme aux droits découlant du cadre d’investissement signé avec le groupe Rio Tinto. Selon une lettre aux partenaires du Simandou du ministre des mines et de la géologie, « la Guinée maintient ainsi intégralement sa position, selon laquelle, elle n’aura pas d’autre choix que de mettre un terme aux droits accordés à Simfer S.A en contrepartie d’engagement qui n’ont pas été ténus et en considération de capacités techniques et financières dont Simfer S.A ne dispose plus en pratique, si un accord global
et définitif satisfaisant pour la Guinée n’est pas trouvé très rapidement au plus tard le
28 octobre 2018 sur la reprise du développement du projet Simandou sud ».
Le gouvernement ne ferme toutefois pas entièrement, les portes à la discussion, ceci étant, « dans un esprit constructif, nous sommes prêts, a écrit M. Magassouba, à vous donner une ultime chance de sauvegarder les droits de Simfer S.A sur le projet Simandou sud, sous réserve que le ministère reçoive, d’ici le 30 septembre 2018, les éléments suivants :
- Un engagement signé par chacune de vos sociétés acceptant la date du 28 octobre 2018 comme date limite à la signature de l’accord final de cession des actions détenues dans le projet par le groupe Rio Tinto ;
- Un projet d’avenant au cadre d’investissement actant le changement d’actionnariat de Simfer S.A ainsi qu’au chronogramme de développement du projet et traitant uniquement de ce qui est strictement nécessaire pour la relance et le développement effectifs du projet ;
- Et, les autres documents visés dans mon courrier du 13 juillet 2018 ».
Quoi qu’il en soit, sur cette lettre du ministre des mines et de la géologie, qui a été consultée par notre source, Magassouba a conclu que « sous réserve de la réception des documents acceptables pour supporter les discussions, les réunions évoquées dans votre dernier courrier pourront alors être organisées dans les plus brefs délais possibles, étant précisé que, les partenaires et les établissements financiers avec lesquels Chinalco indique avoir signé un accord de partenariat seront tenus d’y être représentés en sus de Simfer S.A et
ses actionnaires».
Une rencontre de dernière chance avait été prévue en septembre 2018, à Beijing, entre le gouvernement guinéen et la société chinoise chinalco qui négociaient la reprise du projet d’exploitation de minerai de fer de Simandou sud. Selon une source travaillant au bénéfice du ministère des mines et de la géologie, « les deux parties ne sont pas loin d’une rupture de dialogue, qui matérialiserait, malheureusement, un nouvel échec de ce mégaprojet intégré, qui pourrait révolutionner l’économie guinéenne ». Cette source cite, en plus « le contenu » d’une lettre du 10 août 2018, signée du président de Chinalco M.Ge Honglin qui n’aurait pas été tendre « envers le ministre Magassouba ».
Il n’est pas sûr que M. Ge ait accordé « une grande importance aux problèmes soulevés par la lettre du 23 juillet 2018 du Ministre Magassouba » relatifs « à la nécessité des mesures urgentes », conditionnant le maintien et la poursuite du projet Simandou sud. Le chef de file des partenaires chinois, M. Ge avait déploré dans son courrier réponse du 10 août 2018,
« les propos qui font état de l’arrêt des activités du projet Simandou » et qui soutenaient que « les activités du projet simfer S.A fonctionnent normalement tandis que les parties continuent conjointement, de promouvoir la cession, pour respecter leurs engagements. Il n’existe donc pas de blocage de fonctionnement de Simfer S.A ».
Selon les propos d’un des collaborateurs du ministre Magassouba, M. Ge avait rappelé
qu’« en 2015, Simfer S.A avait finalisé une étude de faisabilité bancable du projet Simandou, qui fixe le processus de développement du projet et qui continue de servir de base pour les activités ». Chinalco a proposé sur la base de cette étude de faisabilité bancable de 2015, un plan d’optimisation du développement accompagné d’une feuille de route indicative. Et d’insister, que « la base fondamentale de tout ceci est la signature du Mémorandum Protocole d’entente entre la Guinée et Chinalco ». Cette source qui évoque aussi, les termes de la lettre réponse de M. Ge, les partenaires chinois ont exprimé leurs vives inquiétudes, sur le fait que « la partie guinéenne estime que ce protocole d’accord entre la Guinée et Chinalco ait expiré, nous en sommes désolés. Ce protocole est la manifestation de votre part, en faveur de la reprise du projet Simandou par Chinalco. Qui favorise la viabilité économique et la stabilité du projet ainsi que l’attractivité des investisseurs ».
Toutefois, M. Ge avait conclu, sur une note d’espoir, sur le futur promoteur du projet Simandou, « nous espérons que ce protocole d’accord entre nous pourrait être renouvelé avec une éventuelle prorogation du Mémorandum entre Rio Tinto et Chinalco. Et nous
avons peur que cette inquiétude n’influence négativement la reprise effective du projet ». Concernant la remise au gouvernement guinéen des copies « conformes » des contrats signés entre Chinalco et ses partenaires relativement au projet Simandou sud, M.Ge avait été catégorique, sinon amère, « nous faisons grand cas de la préoccupation de la transmission des accords de partenariat dont j’en ai déjà expliqué dans mon courrier du
28 juin avant le Conseil d’administration de Simfer S.A. Notamment en matière de divulgation desdits accords. Tous nos actes devraient se limiter au cadre de la loi. J’espère que cela ne constitue pas une entrave à l’avancement du projet ».
Comme pour laisser une porte de sortie au gouvernement guinéen, M. Ge a invité, en marge du sommet du forum sino-africain sur la coopération, en septembre 2018, le ministre des mines et de la géologie à une rencontre en ces termes, « nous attendons de vous rencontrer à Beijing pour discuter sur certains aspects de notre coopération ».
Une autre source en fonction à la présidence de la République certifie, « une délégation guinéenne conduite par le Ministre des mines et de la géologie, Magassouba comprenant plusieurs hauts cadres de l’administration publique dont le conseiller à la présidence de la République chargé des mines et pétrole, avait été dépêchée à Paris, à partir du 15 novembre 2018, pour assister à une réunion tripartite, des parties prenantes du projet de minerai de fer de Simandou ». Ensuite, une source membre de cette délégation guinéenne explique, « nous avions mandat d’assister à une autre réunion, des partenaires du projet, le 20 novembre 2018, à Paris. Cependant, sauf changement de directives de dernière minute, notre délégation ne prendra pas la parole, elle se contentera d’écouter et de noter les positions des partenaires privés ».
Un autre haut responsable du ministère des mines et de la géologie atteste que « l’annonce de Rio Tinto de ne pas céder ses parts à Chinalco dans le projet Simandou sud, ne surprend guère ceux qui ont une bonne connaissance de ce dossier, elle obéi à sa stratégie de ne pas perdre le Simandou ».
Un Conseil du gouvernement guinéen avait estimé que ces partenaires privés auraient une stratégie de récupération des blocs 1 et 2 de Simandou, droits miniers exclusifs de BSG-Resources, contestés par le gouvernement avec lequel BSG-Resources est en arbitrage devant le CIRDI. Cette source ajoute avoir compris la seconde alternative qui pourrait être sollicitée par les partenaires privés, consistant à évacuer le minerai de fer de Simandou par le Liberia, afin d’atténuer les coûts d’investissement dans le projet.
De l’affirmation d’un ingénieur géologue guinéen, la géologie du sud-est du pays, et précisément la zone Beyla – N’Zérékoré où se trouve la concession minière de Rio Tinto, a connu des fortes activités géologiques, qui ont favorisé la formation d’importantes minéralisations en oxyde de fer couvrant de vastes superficies. Pour cet ingénieur qui pense que Rio Tinto n’a jamais été très « honnête » avec les gouvernements guinéens, poursuit ses déversions « Rio Tinto en est bien consciente, car elle a effectué des travaux géologiques approfondis, dont elle n’a pas livré à la partie guinéenne, tous les résultats. En effet, en 2017, lors de la présentation du projet aux partenaires chinois de Chinalco sur le site de Kanga (Beyla), un géologue de Rio Tinto a dit que le potentiel estimé de cette seule concession est de 7 milliards de tonnes ».
Selon une source proche du dossier, la lettre du 10 septembre 2018, du ministre des mines et de la géologie, aux responsables de Rio Tinto, Chinalco et Simfer, n’avait point retenu l’attention des destinataires et que cela pourrait dénoter un signe de mépris à l’égard des autorités du pays.
Une source travaillant pour le gouvernement guinéen fait savoir, qu’« en mi-septembre 2018, le ministre Abdoulaye Magassouba avait convoqué une réunion avec Chinalco, malheureusement tous les responsables de cette société chinoise étaient absents du pays. Par défaut d’interlocuteur fiable, le ministre à travers ses cadres avait souhaité transmettre, tout son mécontentement, au représentant de Chinalco présent à cette rencontre, dans les locaux du département des mines et de la géologie ».
Le 28 octobre 2018, une réunion regroupant Rio Tinto et ses partenaires dans le projet d’exploitation du minerai de fer de Simandou, avait été convoquée, « pour décider d’un éventuel report de la date de signature du contrat de cession d’actions entre Rio Tinto et Chinalco ».
Une source interne, à la compagnie Chinalco exprime que « notre société n’est pas intéressée à réaliser de sitôt, cette signature de transaction. Et la société Rio Tinto n’est non plus, intéressé à poursuivre le projet Simandou. Si fait, qu’elle souhaite que, si Chinalco ne peut pas payer ses actifs en numéraire, immédiatement, il lui sera possible de le faire plus tard en nature à travers la production future de minerai de fer. Chinalco ne s’était-elle pas posée de série de questions sur les raisons « d’un tel désistement total de Rio Tinto ? ».
Pour un autre contact au sein de l’équipe de Chinalco, « tous les présidents indépendants de Chinalco ont conclu, dans leurs différents rapports relatifs à l’évaluation du projet Simandou sud, sur des doutes persistants quant à la fiabilité des réserves de minerai de fer déclarées par la compagnie Rio Tinto, dans ses multiples documents techniques ».
Ces directeurs indépendants veulent, plus de temps pour l’authentification des réserves déclarées « prouvées » par Rio Tinto, l’investisseur historique du projet Simandou. Un travailleur de Chinalco a fait noter d’ailleurs que, « les dirigeants indépendants de la compagnie ne peuvent pas valider, auprès du Conseil d’État, un investissement de près de 20 milliards de dollars US, sans avoir, au préalable authentifié, les ressources en minerai de fer, sur lesquelles porte cet investissement ».
Parfois, des parties en négociation, peuvent paraitre menaçantes, antagoniques, suivant cette tradition, le gouvernement guinéen avait été, selon diverses sources, prêt à affronter juridiquement Rio Tinto et Chinalco, « si toutefois le contrat de rachat d’actions de Rio Tinto par Chinalco n’était pas signé le 28 octobre 2018. Et ne serait favorable, à aucun report de date de signature du contrat de cession des actions et/ou proposition de nouvelle date de signature ultérieure ».
La compagnie Chinalco avait été perçue, comme étant un partenaire « peu honnête dans ses discussions avec le gouvernement guinéen ». Cette opinion avait été largement partagée
par des techniciens du secteur minier. Un travailleur de Chinalco, basé dans la sous région affirme « notre société semble être préparée à cette éventualité d’attaque judiciaire » et d’ailleurs « cela s’explique par le fait que le personnel de la partie de Chinalco dédiée au projet d’exploitation de minerai de fer de Simandou est très réduit. Ceci expliquerait partiellement l’état d’esprit de la compagnie vis-à-vis de la Guinée ».
Curieusement, en lieu et place de la signature du contrat d’achat des actions de Rio Tinto dans la société Simfer par Chinalco, le 28 octobre 2018,
le gouvernement guinéen et la société Chalco Iron Ore filiale de Chinalco (CIOH) avaient plutôt procédé, « au lancement des activités de construction des infrastructures du projet de bauxites de Boffa opéré par Chalco Guinea Company (Filiale de Chalco HK) ».
Et c’est le premier ministre guinéen, M. Ibrahima Kassory Fofana « qui avait présidé cette cérémonie de pose de la première pierre, de ce projet chinois ». D’autres sources avaient dit que, le ministre des mines et de la géologie, « absent à cette cérémonie avait été représenté officiellement, par son homologue de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique M. Abdoulaye Yéro Baldé ».
La stratégie de Chinalco avait été de trouver un évènement, « qui puisse remplacer l’obligation de signature du contrat d’achat des actions de Rio Tinto. Et pour ce jeu-là, le premier ministre Kassory a été d’un grand support à Chinalco ».
Aussitôt, l’annonce avait été faite par Rio Tinto, « de la fin de validité du protocole d’entente sur la vente des actifs de Rio Tinto », le ministre des mines et de la géologie a indiqué à une frange de la presse locale, que « toutes les voies restent ouvertes à la Guinée » pour défendre ses droits dans ce partenariat visant la mise en valeur du projet Simandou.
La réponse, du berger à la bergère ne tarda pas, la compagnie Rio Tinto, avait à son tour publié sur son Site internet, un communiqué annonçant la caducité du contrat de vente d’actions qu’elle avait signé avec Chinalco, le 28 octobre 2016.
Des sources concordantes avaient indiqué que, « le gouvernement basera sa réflexion à la fois, sur la responsabilité de Chinalco qui, dans une correspondance du 10 août 2018, avait donné des garanties, sur ses engagements, à relancer le projet Simandou ».
En effet, dans cette correspondance signée de M. Ge Honglin on peut lire « (…), toutes
les activités de Simfer S.A fonctionnent normalement, tandis que les parties continuent conjointement de promouvoir la cession et respecter leurs engagements, en d’autres mots,
il n’existe pas de blocage du fonctionnement de Simfer S.A ». Toutefois, selon nos informations, il reviendra, une fois de plus, au cabinet Orrick, « d’identifier, au bénéfice du gouvernement, des pistes d’actions possibles, pour le futur du projet d’exploitation du minerai de fer de Simandou et de celui du minerai de fer de Nimba ». Il est d’un constat partagé, que, depuis l’arrivée du président Alpha Condé au pouvoir, « le cabinet Orrick est devenu le conseil attitré du pays dans le secteur minier ». Ce succès d’Orrick (France) avait été expliqué par plusieurs sources, « par l’amitié de longue date qui lie, le juriste Saadou Nimaga, secrétaire général du ministère des mines et de la géologie à l’avocat associé M. Pascal Agboyibor ».
Il avait été rapporté, plusieurs fois, que le ministre Magassouba ne semblait plus « être à l’aise » suite à l’attitude, des partenaires, dans la mise en valeur du projet simandou. De manière « qu’il ne serait plus disposé à discuter avec ces partenaires chinois au sujet de Simandou. De sorte que la délégation de chinalco venue à Conakry, assister au lancement de travaux de constructions des infrastructures du projet de bauxite de Boffa, ait quitté Conakry sur la pointe des pieds ».
Tout de même, le gouvernement guinéen était, selon des sources techniques locales, « dans l’hésitation de s’engager dans une bataille juridique contre Rio Tinto, car il s’exposerait à la rigueur de l’accord transactionnel du 22 avril 2011 ».
En effet, en cas d’expropriation totale ou partielle, la somme de 700 millions $US versée par Rio Tinto à la Guinée, devient remboursable (article 1 alinea 5). Mais une seconde lecture de la situation, a fait référence à l’acte notarié, portant « disposition additionnelle de l’accord transactionnel » entre la République de Guinée et Rio Tinto, qui stipule d’ailleurs qu’« afin de se conformer à l’esprit de l’accord transactionnel, Simfer S.A s’engage à ne plus réclamer de déduction d’impôts pour les 700 millions $US ».
Aux couloirs du ministère des mines et de la géologie, la compréhension de cette disposition avait été toute autre. Un cadre interrogé en ce sens pensait « qu’il est désormais plus utile de revenir à l’ancienne formule qui veut que Rio Tinto, en sa qualité de partenaire historique soit l’interlocuteur privilégié du gouvernement ». Ce qui ne serait pas l’option d’un des conseils du ministre des mines et de la géologie, qui pensait plutôt que
« le combat juridique doit être orienté contre Rio Tinto et cela avec tous les arguments juridiques appropriés ».
Les stratèges des différents acteurs du projet Simandou, avaient continué à affuter leurs armes de diversion. La Guinée avait, une fois encore, sollicité l’intelligence de son conseil Orrick.
« Un développement intégré des quatre blocs, semble plus logique et moins risqué, à la fois techniquement et commercialement. Dès lors qu’il est certain que, le transfert des blocs Simandou nord à Chinalco améliore la rentabilité et réduit les risques du projet Simandou sud. L’État guinéen est fondé à demander l’obtention, d’une part de la valeur ainsi créée par la Guinée. Des contreparties adéquates devront alors être proposées par Chinalco », telle a été la proposition de Orrick, du 30 novembre 218.
En clair, « la piste sur laquelle la Guinée concentrait ses réflexions, dans le cadre des, probables prochaines séances de négociations avec les parties prenantes ». Toutefois, le gouvernement guinéen avait été sous le choc, que lui avait causé « la lettre conjointe de Rio Tinto et de Chinalco, du 12 octobre 2018 », adressée au ministre des mines et de la géologie Magassouba, dans laquelle on
peut lire « (…) l’absence d’engagement, à date, d’investisseurs de référence pour les infrastructures du projet Simandou n’équivaut pas à une violation d’une des obligations de Simfer ». Rio Tinto et Chinalco, à travers cette lettre, avaient invité la Guinée, à plus de coopération et de responsabilité, en ces termes, « Simfer et le gouvernement guinéen avaient tous deux, l’obligation de coopérer de bonne foi et de considérer les options de financement et de construction de l’infrastructure nécessaire au projet ».
Et, aux partenaires privés de rappeler que, le dispositif applicable en matière de résiliation
« prévaut sur le code minier », ainsi que les dispositions du code minier, relatives à la révocation de titres miniers qui ne s’appliquent pas. Car, « en aucun cas, Simfer ne s’est retiré du projet et nous en voulons pour preuve les efforts continus déployés pour avancer notamment à travers la recherche de financement. Simfer dispose encore, également, de l’ensemble des capacités financières et techniques requises ». Une source au ministère des mines et de la géologie affirme, « cette lettre ne semble pas être respectueuse, de sorte que la Guinée ait refusé de participer à la dernière réunion que ces partenaires dans le projet avaient planifiée, à Paris, en novembre 2018 ». Cette source soutient que la Guinée semblait pourtant être prête « à des compromis majeurs pour la relance du projet Simandou sud ».
En effet, un Consortium de Cabinets conseils du gouvernement guinéen, sous le leadership de Orrick, dans la composante 3 de sa mission, en faveur de la Guinée avait préconisé
qu’ « il est recommandable que la Guinée fasse preuve de transparence dans ses discussions avec Chinalco ».
Un large public de scientifiques croyait que la Guinée ait sollicité du gouvernement chinois, l’implication d’une ou de plusieurs compagnies minières et des banques de financement chinoises susceptibles d’être intéressées à la mise en valeur du projet Simandou. En tout cas, les Cabinets conseils de Conakry en avaient été favorables, comme on peut le lire dans leurs rapports conjoints cité plus haut qu’« il est recommandable à la Guinée d’envisager d’octroyer dès à présent à la Soguipami (ou idéalement à une des filiales de cette dernière) des permis de recherches promotionnels sur les blocs de Simandou nord afin d’envoyer un signal fort à Chinalco ». Comme quoi « la Guinée n’attendra pas éternellement que Chinalco soit prête à initier des discussions sur les blocs de Simandou nord ». Il avait été proposé par ce Consortium de cabinets, « que la Guinée résiste à toute demande éventuelle de Chinalco, portant sur l’octroi d’un titre minier sur les blocs de Simandou nord ».
Mais ce qui devrait avoir plus perturbé le gouvernement du président Alpha Condé, dans son différend avec BSG-Ressources avait été le fait que, cette plateforme de cabinets soit parvenue à l’assertion suivante : « la réparation intégrale du préjudice causé par le fait internationalement illicite, prend la forme de restitution d’indemnisation et de satisfaction, séparément ou conjointement aux dispositions du présent chapitre. L’État responsable du fait internationalement illicite à l’obligation de procéder à la restitution constituant au rétablissement de la situation qui existait avant que le fait illicite ne soit commis (…) ».
D’ici la fin de cette comédie, la Guinée et son partenaire chinois Chinalco Iron Ore Holdings Ltd (CIOH) filiale de Chinalco, avaient discuté des termes d’une convention cadre portant sur les modifications des accords pertinents devant remplacer le cadre d’investissement du Simandou du 26 mai 2014 signé entre Rio Tinto et la Guinée, mais aussi, le protocole d’entente de Beijing d’octobre 2016.
On peut lire des surprenantes « exigences », dans un projet de convention du 6 mars 2017, transmis au ministre des mines et de la géologie, M. Abdoulaye Magassouba par M. Liu Caiming, le vice-président de CIOH. Ce document enseigne que les parties conviennent de négocier de bonne foi et agir de façon raisonnable pour signer les modifications avant le
28 septembre 2017 ou 30 jours avant la date de closing de la cession des parts de Rio Tinto.
CIOH avait proposé, que conformément au protocole d’accord et à la lettre de l’État adressée à Chinalco le 31 octobre 2016, que l’État attribuera un titre minier couvrant les blocs 1 et 2 à Simfer SA. Et que compte tenu des allégations actuelles contre Rio Tinto, l’État délivrera un nouveau titre minier couvrant les blocs 1, 2, 3 et 4 à Simfer S.A(tout Simandou). En plus, CIOH avait sollicité que la Guinée abroge ou amande toutes les lois lui obligeant d’attribuer les blocs 1 et 2 par voie de procédure d’appel d’offre ou vente aux enchères publiques.
Conakry, le 22 juillet 2019
Akoumba Diallo
Journaliste
Analyste au cabinet Mineral Merit SARL
Ancien membre de l’ITIE-Guinée
Je ne pense pas que l’exportation de nos minerais soit une solution pour le développement de la Guinée. Je pense qu’il serait avantageux pour notre pays d’investir directement dans nos mines à travers les infrastructures et les ressources humaines. J’aimerai voir à moyen terme une fonderie autour de ce gisement de Simandou entretenu par des guinéens.C’est possible! Il faut juste commencer quelque part. Ces commerçants internationaux ne sont nullement la solution. Ils sont dans leurs droits de défendre leurs intérêts. A la Guinée et au Guinéen d’en faire autant.