Dans le conflit qui oppose la Cour d’appel et le Conseil de l’Ordre, il faut rappeler que pour être déclaré à l’examen d’entrée au Barreau, il y a une condition de moyenne et une condition de nombre.
Le nombre d’avocats à admettre est défini par le Conseil de l’Ordre. D’après le barreau, le conseil de l’ordre ne partage cette attribution avec aucune autre institution en vertu de son autonomie.
Même si le principal reproche fait à l’ancien Conseil de l’Ordre est d’avoir pris une résolution pour faire passer le nombre d’avocats stagiaires à admettre de 15 à 35 mais aucune disposition du décret organisant le CAPA n’interdit cela, martèlent ces avocats qui font remarquer que la situation aurait été préjudiciable si le nombre avait été plutôt réduit.
Selon eux, il est bien possible que le Conseil de l’Ordre se soit trompé dans l’application ou dans l’interprétation du décret. Mais ils relèvent que le litige étant porté devant la Cour suprême, il fallait plutôt laisser cette juridiction trancher.
Si elle estime que le Conseil de l’Ordre a violé le décret, elle n’aurait qu’à confirmer l’arrêt de la Cour d’appel et le Conseil de l’Ordre n’aurait d’autre choix que de s’incliner expliquent-ils.
Mais ce qui est inadmissible aux yeux des avocats, c’est le fait pour la Cour d’appel de penser qu’un avocat peut prêter serment sans avoir été présenté par le Bâtonnier conformément à la loi sur la profession d’avocat.
Ce qui est indéniable, c’est le Barreau, à travers le Conseil de l’ordre, qui organise la prestation de serment d’un avocat.
C’est cette règle que la Cour d’appel aurait violée en fixant elle-même la date de prestation de serment des onze postulants, mettent en cause plusieurs avocats.
Sur le plan des principes, expliquent-ils, la Cour ne pouvait qu’ordonner au Conseil de l’Ordre d’organiser la prestation de serment de ses derniers. Et en cas de refus ou de résistance, ils pouvaient dans cette hypothèse attraire en justice le Barreau qui pourrait être condamné à leur payer des dommages-intérêts du fait du préjudice résultant de l’inaction de la corporation.
La décision de la Cour ordonnant au Barreau d’organiser la prestation de serment pouvait même être assortie d’une astreinte, évoquent ces avocats.
Mais en aucun cas, la Cour d’appel ne pouvait organiser elle-même la cérémonie de prestation de serment d’avocats en les faisant présenter non pas par le Bâtonnier mais…par un huissier de Justice, tranchent-ils.
C’est un précédent très dangereux que les avocats veulent combattre à tout prix, a-t-on appris.
Autre inquiétude exprimée par ces avocats, ils craignent que désormais, les magistrats de la Cour d’appel ne s’arrogent le droit de modifier tout procès-verbal d’un jury d’examen d’entrée au Barreau et de faire prêter serment à tout postulant sans y associer le Barreau.
Ce serait ainsi, préviennent-ils, la fin de la maîtrise du Tableau de l’Ordre que les avocats ont obtenue de haute de lutte à travers la loi 04 du 26 mai portant organisation de la profession d’avocat.
Cette question dépasse aujourd’hui le dossier des onze postulants qui ont prêté serment récemment puisse que l’un des piliers fondamentaux de la profession d’avocat semble être en danger.
Ils estiment que les onze postulants auxquels la Cour d’appel a fait prêter serment sont dans une posture qui les dessert eux-mêmes en ce sens qu’ils vont accéder à une profession dont l’indépendance est fortement remise en cause.
En fin de compte, ils seront dans un Barreau affaibli et soumis au bon vouloir des magistrats. C’est là que se trouve l’enjeu de toute cette affaire, ont alerté ces avocats.
D’après eux, si l’organisation de l’examen d’entrée au Barreau, la prestation de serment et l’inscription d’un avocat au Tableau de l’Ordre des Avocats ne sont plus du ressort des institutions de l’Ordre, il n’y a plus de Barreau. Chaque examen pourrait être donc, contesté par les candidats qui pourraient contester cela devant la Cour d’appel pour devenir avocats et contre la volonté du Barreau.
Les avocats doivent comprendre que c’est la question de l’existence même de la profession qui est en jeu, interpellent ces hommes en robe noire.
Selon leur entendement, le combat ne devrait pas être un combat entre le Barreau et les postulants. Mais celui de la profession d’avocat contre certains magistrats de la Cour d’appel qui voudraient, accusent-ils, l’agenouiller. Ils invitent donc leurs confrères avocats, à ne pas, pour des intérêts partisans, contribuer à scier la branche sur laquelle ils sont assis. Ce serait, à leurs yeux, une catastrophe pour la profession en Guinée.
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