Le 12 mars 2020, la Guinée enregistrait le premier cas notifié du nouveau coronavirus sur son sol.
Une année jour pour jour, le directeur général de l’agence nationale de la sécurité sanitaire (ANSS) Dr Sakoba Keita, a fait le bilan d’étape à l’an 1 de la lutte contre la covid-19 en Guinée.
C’était au cours d’une interview qu’il a accordée à mosaiqueguinee.com, à son siège à Kaloum.
Lisez plutôt !
De la première réponse de l’ANSS suite à la notification du premier cas de covid-19 ?
C’est vraiment un triste anniversaire, cette maladie a débuté en Guinée le 12 mars dernier 2020. Dès que les guinéens ont appris qu’il y a recrudescence dans les pays asiatiques et principalement en Europe, on a donné un délai de fermeture de nos aéroports. Mais il y avait déjà des citoyens qui étaient déjà venus et ont commencé à développer la maladie, mais on ne savait pas. C’est ainsi qu’au cours des examens, on a eu une personne Belge qui a été testée positive, cela a été le premier cas confirmé. Le même mois avant la fermeture de l’aéroport, il y a eu les 3 derniers convois qui avaient des personnes infectées depuis l’Europe et qui ont constitué les premiers patients de notre centre d’isolement qui est à Nongo. Nous avons ainsi adopté les mesures classiques de l’Europe et l’Asie.
C’est à dire, les frontières ont été fermées, les mosquées ont été fermées, les écoles, la limitation du nombre de personnes à bord des véhicules, la distanciation et le port obligatoire de masques, les kits de lavage des mains ont été distribués à la population, les cérémonies et regroupements ont été interdits. Même le déplacement des corps d’une préfecture à une autre, a été interdit. Ensuite, le gouvernement a mis des mesures de contrôle en place, on a ouvert des CT-EPI, nous avons recruté du personnel, tous les premiers cas ont été détectés, la capacité de nos laboratoires qui ne pouvaient pas faire plus de 300 tests par jour, ces laboratoires ont pu faire plus de 3000 tests par jour. Nous avons même introduit des tests rapides pour pouvoir rendre populaire ces tests dans toutes les préfectures. Ce qui a énormément contribué à la mobilité de certains chauffeurs et passagers qui voulaient se rendre à l’intérieur du pays. Ont suivi une mobilisation sociale et la communication avec les agents communautaires sur les méfaits de la covid-19.
2- De l’impact des mesures sanitaires implémentées par l’agence nationale de la sécurité sanitaire (ANSS) ?
Cela a aidé notre pays a freiné l’évolution de cette pandémie. Vers le mois de décembre, on a vu que le taux de positivité était très faible. Le taux était autour de 2%, donc il y a eu allègement de certaines mesures.
3- De l’explosion des cas confirmés de covid-19 ?
Malheureusement, les gens ont confondu l’allègement à l’arrêt de la contamination. La deuxième vague qui a eu lieu en Europe et en Asie, a fini par toucher la Guinée. Depuis le mois de janvier 2021 nous constatons une grande recrudescence. Mais avec les recherches faites sur cette maladie et les vaccinations dans les pays européens, en Chine et autres pays d’Asie, les résultats de ces vaccinations sont en train de contribuer à la réduction du nombre de cas. La Guinée aussi, depuis le 30 décembre, a commencé à vacciner avec des échantillons. La grande campagne de vaccination a été lancée le vendredi dernier, pour qu’on puisse vacciner à terme plus de 2 millions de guinéens d’ici la fin de l’année.
4- De la cohabitation Ebola-Covid-19 ?
L’expérience d’Ebola nous a servi, mais il faut que les guinéens comprennent que la maladie Ebola n’est pas égale à Covid-19. La covid-19 se transmet essentiellement par voie aérienne par la bouche où à travers les éternuements. Alors que Ebola c’est à travers les fluides corporelles touchées. Ebola est moins transmissible que Covid-19. On a plus de 16 mille cas de Covid-19 en une année, alors qu’avec Ebola, c’est 3 mille et quelques cas pour tout le pays pendant 2 ans. Cela dénote que la Covid-19 est plus transmissible.
5- De la problématique liée à la prise en charge au sein des centres de traitement épidémiologique du pays ?
On est conscient qu’avec l’augmentation du nombre de cas, on a aujourd’hui un taux d’occupation qui frôle les 90%. Actuellement on est en train d’essayer deux axes, c’est d’augmenter les capacités de certains axes qui sont déjà là, en mettant en place des chapiteaux. L’autre axe c’est d’ouvrir le centre de Sonfonia qui a 200 lits. Mais il faut savoir qu’avec l’augmentation du nombre de cas quotidien, on sera obligé de développer de nouvelles stratégies de confinement même à domicile pour les cas moins dangereux. Je veux parler des cas asymptomatiques. Avec un rythme de 100 nouveaux cas par jour, la Guinée n’a pas la capacité d’ouvrir un centre de 100 lits par jour. La réparation du centre de Sonfonia a pris plus de 6 mois, il n’y a que 200 lits. Avec ce rythme actuel, en 48 heures le centre de Sonfonia risque d’être plein. Même si on procède à la réouverture du centre de l’hôpital Donka, c’est 450 à 500 lits, 5 jours seulement ça va être rempli. On risque de loger même dans les amphithéâtres comme certains pays l’on fait. Ils ont transformé les stades en centre d’isolement. J’ai peur qu’on ait recours à notre stade pour y héberger des malades, si le comportement guinéen ne change pas.
6- De son appel à l’endroit des populations ?
Je dirais aux guinéens d’avoir espoirs que la vaccination qui est entamée c’est le remède pour nous aider à mettre un terme à cette maladie qui est hautement transmissible. J’invite les uns et les autres à se mobiliser pour recevoir cette vaccination. Durant les trois prochains mois, avec l’accélération de cette vaccination, le nombre de cas peut diminuer.
Interview réalisée par Saidou Barry