Dans une interview accordée à la rédaction de mosaiqueguinee.com, ce dimanche 11 avril 2021, le président du MNPD a passé au scanner la situation sociale et politique de la Guinée.
De la déclaration de politique générale du gouvernement, au déguerpissement, en passant par l’éventuelle augmentation du prix du carburant, Siaka Barry a touché à tout.
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Mosaiqueguinee.com : le chef du gouvernement, Dr Kassory Fofana a affirmé que ni lui ni le président de la République, personne n’a donné l’ordre de détruire des maisons lors de l’opération de déguerpissement. Qu’en pensez-vous ?
Siaka Barry : Nous avions des familles vulnérables qui ont été victimes injustement de ces casses à grande échelle, des opérateurs immobiliers ont également été injustement victimes de ces casses à outrance. De façon très assumée, des agents de l’État étaient accompagnés par des forces de l’ordre devant tout le monde. Donc, un premier ministre et un président de la République, qui viennent affirmer que toutes ces casses qui ont créé beaucoup de remous dans notre cité ont été faites sans leur ordre. Cela nous fait craindre à deux niveaux : premièrement, il y a eu cacophonie au sommet de l’État, ce qui traduit la déliquescence de notre système administratif qui ne répond plus aux normes venant d’une administration et d’un État modernes. Deuxièmement, cela signifie que les pauvres citoyens n’ont plus sur qui fondé leur espoir pour leur propre sécurité. Tout cela constitue un plan très raté de la sortie du PM
La semaine précédente à Tormèlin, Alpha Condé a annoncé l’augmentation du prix du litre de carburant à la pompe dès après le ramadan en Guinée. Quelle est votre réaction ?
Je crois qu’au-delà de toutes ces explications que le président a données concernant cette déclaration, en s’appuyant sur des arguments qui ne tiennent pas la route d’autant monsieur le président ce qu’il ne dit pas à la population, c’est l’érosion de notre monnaie. Cette érosion-là qui fait perdre aux guinéens son pouvoir d’achat. Et cette érosion n’est pas d’ordre externe, c’est une érosion qui a été induite par des mauvaises politiques économiques intérieure et par la mauvaise gouvernance. Donc, voilà les explications qu’on ne donne pas à la population guinéenne. On veut simplement dire à la population de serrer la ceinture. Serrer la ceinture dans ce cas signifie que la population doit recoller les morceaux. L’augmentation du prix des produits pétroliers, c’est une souffrance de plus. Pendant 10 ans, ils nous ont toujours dit d’accepter la souffrance que le bonheur viendra. Le bonheur n’arrive et la souffrance ne fait s’accroître. L’augmentation du prix carburant est soutenue aujourd’hui par un argument qui ne tient pas la route. Ce n’est pas la comparaison des prix entre la Guinée, le Sénégal et la côte d’ivoire qui peut soutenir une telle argumentation. Ce qui peut soutenir une telle argumentation, c’est de comparer le revenu moyen du guinéen au revenu moyen du sénégalais ou l’ivoirien. Les pays qui ont le triple de notre revenu, on ne devrait pas nous comparer à eux.
Depuis plusieurs mois, les frontières entre la Guinée, le Sénégal et la Guinée-Bissau sont t fermées. La commission de la CEDEAO en mission en Guinée a plaidé auprès de l’Etat pour la réouverture de celles-ci. Qu’en dites-vous ?
Les frontières de la Guinée-Bissau, du Sénégal et de la Sierra Leone ont été fermées à cause des humeurs. Des gens évoquent des fondements sécuritaires. Fondements sécuritaires par rapport à quoi. Pourquoi donc, on ouvre les frontières de la Sierra Leone et maintenir celles du Sénégal et de la Guinée-Bissau fermées ? Qu’est-ce qui a changé au niveau de la frontière de la Sierra Leone pour qu’on les ouvre ? Rien a changé, il a fallu simplement une visite du président Sierra léonais pour que ses frontières ouvrent. Il faut qu’on sorte justement de ça. (…) La CEDEAO est dans leur registre. Il ne s’agit pas de recommander seulement, c’est aussi leur imposer surtout. La libre circulation des personnes et des biens dans l’espace CEDEAO, sont quand même le droit fondamental consacrés par tous les textes de la CEDEAO.
Dans un rapport publié, le département d’Etat américain accuse les forces de sécurité, d’être les responsables des violences perpétrées lors des manifestations. Etes-vous d’avis ?
Le département d’État américain a fait un travail propre aux États-Unis, il a rendu donc sa conclusion. Si vous ne faites pas le travail qui vous incombe, d’autres le feront à votre place et vous n’avez plus de droit à la parole, à la critique de ce qu’ils font. Les enquêtes sur les tueries des civils surtouts lors des manifestations en Guinée, ont toujours été des enquêtes qui n’ont jamais abouti. (…) L’Etat guinéen n’a jamais voulu souscrire à une telle démarche. Si d’autres États mènent des enquêtes et nous servent leurs conclusions, moi je ne dirai pas que ces conclusions s’imposeront à nous. Je dirai qu’ils ont profité d’un vite. C’est à l’Etat guinéen de prendre ses responsabilités pour diligenter des enquêtes indépendantes et situer les causes des tueries
Interview réalisée par Mama Adama Sylla