Un mandat d’arrêt international a été émis par la justice guinéenne contre Sekou Koundouno, administrateur de la plateforme Balaie citoyen. Le responsable en charge des stratégies et de la planification du FNDC est notamment poursuivi pour association de malfaiteurs, incendies volontaires, troubles à l’État par le massacre, la dévastation et le pillage, et de participation à un mouvement insurrectionnel. Ce mandat a-t-il une chance d’aboutir ? Quels moyens dont dispose la Guinée pour le faire exécuter ? La France va-t-elle se plier à cette demande la justice guinéenne ? Voilà autant de questions posées ce vendredi à Me Mohamed Traoré dans cette interview exclusive qu’il a accordée à la rédaction de mosaiqueguinee.com.
Mosaiqueguinee.com : La justice guinéenne a émis un mandat d’arrêt international contre Sekou Koundouno. Comment réagissez-vous à cette actualité ?
Me Mohamed Traoré : J’ai dit à l’occasion d’une première intervention sur cette question que je suis très surpris que ce soit presque quatre mois après qu’il a été signé par le juge que ce mandat est rendu public. Et cela intervient comme par hasard au moment où Sékou Koundouno s’exprime sur divers sujets d’intérêt national. D’après le mandat qui le vise, il est poursuivi pour plusieurs infractions pour lesquelles d’autres personnes sont également poursuivies et en détention dans l’attente de leur jugement. Mais curieusement, le procès tarde à s’ouvrir pour des raisons que personne au sein de l’appareil judiciaire n’arrive à expliquer. Pourquoi alors lancer un mandat d’arrêt international contre Sékou Koundouno, si ce n’est, au cas où il serait exécuté, dans le début de le garder infiniment en prison sans jugement ?
Mosaiqueguinee.com : Sekou Koundouno est en séjour en France. Le mandat d’arrêt a-t-il une chance d’aboutir ?
Me Mohamed Traoré : Je reste convaincu que ce mandat n’a aucune chance d’être exécuté. Le monde entier sait que les faits qui sont reprochés à Sékou Koundouno sont liés à des évènements politiques, l’organisation du référendum constitutionnel et l’élection présidentielle de 2020. On ne peut donc détacher les infractions mises à la charge de Sékou Koundouno de ces événements politiques. Il est certain que les poursuites judiciaires visant Koundouno sont guidées par des considérations purement politiques. En la matière, les États respectueux des droits de l’homme rechignent à exécuter des mandats contre des personnes qui sont persécutées dans leurs pays à cause de leurs positions ou de leurs opinions sur le plan politique.
Mosaiqueguinee.com : Quels sont les moyens dont dispose la Guinée pour amener la France à l’exécuter ?
Me Mohamed Traoré : Tout ce que la Guinée peut faire, c’est de saisir peut-être Interpol qui, si elle estime que ce mandat mérite une attention, va publier une notice rouge pour informer ses États membres qu’un mandat d’arrêt est émis par la Guinée contre Sékou Koundouno et leur demander de le localiser et de l’arrêter éventuellement. Cela dit, la Guinée n’a aucun moyen de contrainte sur Interpol qui, de son côté, ne dispose d’aucun moyen de contrainte contre ses États membres pour les amener à exécuter un mandat d’arrêt. Par ailleurs, ce n’est pas Interpol qui enverra des policiers arrêter une personne contre laquelle un mandat d’arrêt a été délivré. Il appartient à l’État où se trouve cette personne de juger de l’opportunité de l’arrêter ou ne pas l’arrêter. En clair, l’émission d’un mandat d’arrêt même abusivement qualifié d’international ne signifie pas arrestation et extradition de Sékou Koundouno. Entre le lancement de ce mandat d’arrêt et une éventuelle arrestation et plus grave, une extradition de cet activiste très engagé du FNDC, il y aura une véritable bataille. En ce qui nous concerne, nous avocats de Sékou Koundouno, il n’est pas exclu que nous entrions en contact avec nos confrères français qui défendent le FNDC pour leur fournir les informations dont ils pourraient avoir besoin sur le cas Sékou Koundouno.
Mosaiqueguinee.com : Que peut faire Sekou Koundouno au cas où la France déciderait de le livrer au pouvoir de Conakry ?
Me Mohamed Traoré : Sékou Koundouno comme tous les autres membres de FNDC et le FNDC lui-même ont des avocats aussi bien en Guinée qu’en France. Je pense que ces avocats ont sans doute été approchés pour préparer un dossier et se tenir prêts pour faire face à toute éventualité. Par ailleurs, il est parfaitement possible que Sékou Koundouno bénéfice d’une protection au plan international, si ce n’est le cas, en raison des risques qu’il encourt s’il était extradé en Guinée.
La rédaction de Mosaiqueguinee.com