Deux semaines après son incarcération pour »vol d’un téléviseur, « jamais prouvé », Alhassane Bangoura dit »Grand Rooy » décède à la maison centrale de Conakry, dans des conditions non encore élucidées.
Profondément affectés par la disparition tragique de leur frère, les jeunes de Yattayah réclament désormais justice pour ce dernier.
Face à la presse ce jeudi, ces jeunes, accompagnés de certains membres de la famille du défunt, notamment ses enfants et en présence de leur avocat, ont invité la justice à éclairer la gouverne de l’opinion sur les circonstances de la mort d’Alhssane Bangoura.
Dans sa communication, Me Sékou Koita, avocat du défunt, a déclaré que son client est plutôt mort pour des raisons pécuniaires et non juridique.
Dans cette procédure qui défraie la chronique, l’avocat au barreau de Guinée a relevé plusieurs manquements dont les conditions d’interpellation du défunt.
D’après lui, c’est le 18 février dernier que le défunt Alhassane Bangoura a été arrêté à Yattaya par la Brigade Anti-Criminalité (BAC) pour une affaire dit-il de vol de télé. Il a été ensuite conduit au commissariat de Nongo où il a été soumis aux enquêtes préliminaires. Il sera plus tard placé sous mandat de dépôt à la maison centrale de Conakry le 28 février 2022 (jour du mariage de l’une de ses filles), avant de rendre l’âme le 14 mars dernier soit deux semaines après son incarcération, laissant derrière lui, une veuve et six enfants, dont quatre filles.
Aux dires de son avocat, qui se trouvait être son patron, le défunt bien que n’étant plus de ce monde, n’était pas un voyou, contrairement à ce qu’on fait croire à l’opinion.
« M. Bangoura était considéré par les jeunes de Yattaya comme un modèle. Nous savons tous ici à Conakry, lorsqu’on attrape un voleur, il est lynché. Alors si on se lève tous comme un seul homme pour défendre le décès d’un individu, c’est qu’il a une utilité pour la communauté. Feu Bangoura en plus d’être mon client, j’ai partagé avec lui l’habitation de ma maison pendant plus de 04 ans. Comment vous pouvez imaginer qu’un avocat de mon état, qu’un universitaire de mon état vive pendant plus de 4 ans avec un malfrat ? C’est inimaginable, ce n’est pas possible », a lâché l’avocat
Me Sékou Koïta a aussi relevé des manquements dans la procédure. Au niveau de la juge d’instruction en charge du dossier, l’avocat persiste et signe qu’une forte somme d’argent a été demandée pour la mise en liberté provisoire d’Alhassane Bangoura.
« Demander de l’argent pour une mise en liberté provisoire n’est pas illégal. On appelle ça la caution. C’est aussi une garantie. Si vous n’avez pas d’avocat, pas de domicile identifié, le juge d’instruction peut dire de payer une caution qui va être votre garantie. Là où le bât blesse c’est qu’il s’agit d’une caution de télé, une procédure où vous avez un avocat, où vous avez un domicile identifié. Par conséquent une affaire dans laquelle il n’était pas nécessaire de demander une caution. Mais nous avons accepté le principe de payer la caution. Personnellement, j’ai discuté avec la juge d’instruction pour lui dire, accepter ma demande de mise en liberté, elle m’a dit de demander à la famille. Je lui ai dit depuis quand on négocie avec la famille quand il y a un avocat ? La caution doit être discutée avec l’avocat que je suis. Elle m’a dit que le frère du défunt a décidé de payer dix (10) millions de francs guinéens. J’ai rigolé en lui disant mais on parle de vol de télé là. Vous avez accepté à la famille de payer dix millions ? Je lui ai dit qu’on ne peut pas payer dix millions mais de me proposer une caution raisonnable. Elle a dit 8 millions GNF j’ai dit non, 5 millions GNF j’ai dit non. On a fait une contreproposition de 3 millions GNF…Le jour de son décès, on nous dit que c’est ce jour (14 mars 2022) qu’on devait le mettre à notre disposition c’est-à-dire le libérer. Mais Dieu a rendu la justice autrement. C’est comme cela que je qualifie sa mort », a-t-il souligné.
S’agissant des conditions dans lesquelles son client a rendu l’âme, l’avocat martèle qu’il attend les résultats de l’autopsie avant de se prononcer à cet effet. Toutefois, il précise que celui-ci n’avait aucun antécédent en ce qui concerne son état de santé jusqu’à son interpellation.
La famille, affaiblie par cette mort, dit attendre le résultat de l’autopsie et la remise du corps pour qu’elle fasse l’enterrement de celui-ci dans la dignité.
Alhassane Fofana