D’un besoin prévisionnel de 4500 enseignants à recruter en qualité d’enseignants contractuels en 2018, on s’était retrouvé avec 7807 à un moment donné, puis 11587 et enfin 16358 enseignants contractuels en 2019. Ce dossier fut classé sans suite en dépit des instructions données par le président de la République le professeur Alpha condé visant à les engager et renforcer leurs capacités.
En Décembre 2021, le Ministre Guillaume Hawing de l’enseignement pré-universitaire et de l’alphabétisation avait mis en place une commission quadripartite (MEPUA- fonction publique- Syndicats – coordination des enseignants contractuels) en vue de travailler sur le dossier et sortir une liste propre. On s’était retrouvé avec près de 25000 enseignants contractuels communaux.
Finalement il avait été décidé de prendre uniquement en compte la liste déposée par la coordination des enseignants contractuels. Un acte d’affectation a été pris dans ce sens par le Ministre le 12 janvier 2022 affectant 8703 enseignants contractuels principalement à l’intérieur du pays dont 198 à Conakry.
De contestation en contestation, le Ministre a rapporté son acte sine die. Et le dossier fut classé pour une seconde fois sans suite.
Le Ministère de l’administration du territoire et de la décentralisation, sur la foi du transfert de compétences que lui confère le code des collectivités locales révisé 2017 notamment dans les domaines de l’éducation et de la santé, et en tenant compte bien entendu du besoin exprimé en enseignants, le Ministère de l’enseignement pré-universitaire et de l’alphabétisation, avait lancé un avis de recrutement de 15 415 enseignants contractuels communaux à l’intérieur du pays assorti de signature de contractuels et entièrement pris en charge par les collectivités locales.
D’un besoin initial de 15 415 on se retrouve avec 18628 enseignants contractuels communaux qui ont travaillé sans salaire pendant 6 mois. Comme pour amuser la galerie, le Ministère de l’administration du territoire sort un communiqué le 2 janvier 2023 annonçant le démarrage des opérations de paiement des arriérés de salaire suivi d’un recensement biométrique. En lieu et place de ces deux opérations, c’est un simple recensement qui avait été fait. Ce n’est qu’au mois de mars 2023 qu’une équipe mixte composée de l’inspection générale des finances, MATD, inspection générale de l’éducation, syndicat national de l’éducation, coordination des enseignants contractuels communaux et collectif des professionnels de l’éducation s’était rendue à l’intérieur du pays pour payer un (1) mois et pour procéder au contrôle physique de présence des contractuels dans les salles de classe. Cette mission avait payé 17 468 enseignants contractuels communaux et recalé 1 160 considérés comme absents, fictifs ou en situation irrégulière.
Ce résultat, aux yeux du MATD paraissait insuffisant et s’attendait à 10 000 enseignants contractuels communaux qui pouvaient être retrouvés sur le terrain.
Une seconde mission s’était rendue à l’intérieur du pays pour payer 1273 autres enseignants contractuels en situation de classe mais qui n’étaient pas dans le fichier des 18628. Finalement on s’était retrouvé avec 18741 enseignants contractuels communaux payés sans oublier les 27 de kassa et 52 omis de Dongol Touma dans Pita.
C’est à la suite de cette mission que le MATD a décidé d’envoyer l’ANAFIC ( l’agence nationale de financement des collectivités locales ) pour payer deux (2) mois d’arriérés prétextant que les frais de mission de la première mission était trop élevés. Ironie du sort L’ANAFIC avait déployé ses agents comptables de Conakry vers l’intérieur du pays pour travailler avec ses antennes régionales ( les mêmes dépenses). Cette mission a payé certains parmi ceux qui n’avaient pas été payés lors de la première paie et a omis beaucoup parmi ceux qui avaient été préalablement payés ( le retour à la case de départ) parce qu’elle ne maîtrise pas ce dossier . On ne change pas d’équipe en plein match.
Aujourd’hui l’ANAFIC est incapable de produire un rapport et nous dire exactement le nombre de contractuels qu’elle a trouvé sur le terrain. Elle a montré ses limites et doit être déchargée de ce dossier.
Le gouvernement doit six mois d’arriérés et 3 mois de salaires de vacances aux enseignants contractuels communaux et 12 mois d’arriérés de primes d’incitation. Puisque cette prime est mentionnée sur les contrats de travail signés par les maires et qui engagent le MATD. Et pendant ce temps les comptes bancaires de beaucoup de communes sont gelés et l’ANAFIC est une coquille vide sans budget orienté vers le paiement des salaires de ces contractuels communaux. Il a fallu des acrobaties pour parvenir à payer ces trois mois. Et c’est dans ce contexte on nous vend l’idée de création d’une fonction publique locale bancale .
Paradoxalement , l’État guinéen a investi trois milliards de dollars américains dans la construction des barrages hydroélectriques et 5000 milliards de nos francs dans la construction des routes et des ponts et il ne peut pas trouver 240 milliards de nos francs pour payer 12 mois de salaire des enseignants contractuels communaux oubliant qu’il n’y a de ressources que d’hommes. Et ces hommes sont formés dans les écoles. Ce sont ces ressources bien qualifiées qui peuvent transformer nos ressources naturelles en opportunités de développement et nous éviter l’importation de la main-d’œuvre experte.
Le budget accordé aux trois sous-sectieurs de l’éducation ( MEPUA, MESRI – METFP), 13 à 15% , montre à suffisance que l’éducation n’est pas encore une priorité dans ce pays.
L’école de la République a aujourd’hui un manque de près de 30000 enseignants titulaires. 19492 en 2019 selon le bureau de stratégie et de développement du Ministère, 8000 enseignants titulaires admis à faire valoir leur droit à la retraite de décembre 2021 à 2022 sur la base des listes publiées par le Ministère du travail et de la fonction publique. Plus de 2000 enseignants redeployés sur le terrain par le MEPUA mais presque tous malades et inaptes à enseigner . Et au soir du 31 décembre 2023 , des centaines d’enseignants titulaires seront admis à faire valoir leur droit à la retraite.
On met des milliers d’enseignants à la retraite et on ne recrute même pas un enseignant. Quel paradoxe. Est-ce que l’éducation est une priorité dans ce pays ?
Sur le dossier des enseignants contractuels, on peut l’évacuer en procédant à leur engagement direct à la fonction publique.
1- Payer les 9 mois d’arriérés de salaire des 18941 enseignants contractuels communaux et les deux ( 2) mois de salaire des omis de la 2ème paie .
2- Payer les 12 mois d’arriérés de primes d’incitation à tous les 18941 enseignants contractuels communaux tel que prévu dans le contrat de travail. Car les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
3- Publier le résultat de l’authentification des diplômes dans les institutions d’enseignement supérieur ( IES) et les écoles normales d’instituteurs).
3- . Procéder au recrutement au poste en fonction des besoins exprimés par les écoles.
4- Organiser un contrôle écrit et oral portant sur les compétences didactiques , pédagogiques et académiques .
5- Procéder aux évaluations diagnostique ,formative et sommative des contractuels en pratiques de classe. On reconnaît le bon maçon au pied du mur.
6- Procéder au classement en trois catégories :
– les tiers faibles ;
– les tiers- moyens ;
– les tiers forts.
7- Engager directement les tiers forts à la fonction publique sans concours.
8- Renforcer les capacités des tiers moyens soit en formation initiale ou en formation continue en leur accordant un contrat d’essai de 6 mois et puis les reverser directement dans les effectifs de la fonction publique.
9- Remercier purement et simplement les tiers faibles .
10 – Procéder à la signature d’un engagement décennal par chacun comme pour dire que pendant 10 ans il ne changerait de département ministériel et rejoindra son poste d’affectation.
NB: Le statut général des Agents de l’État soutient que lorsque le nombre existant est inférieur à l’offre de recrutement il n’y a pas de concours. 18941 enseignants contractuels communaux existants et un besoin sur le terrain pour près de 30000 enseignants titulaires. Surtout que les tiers faibles seront retirés dans les 18941 enseignants contractuels communaux.
Un peu de volonté politique et de diligence et surtout faire de l’éducation la priorité des priorités.
Michel Pépé Balamou