En séjour de travail à Londres, le président du conseil national de la transition s’est prononcé sur plusieurs questions d’actualité en Guinée. Dr Dansa Kourouma qui a accordé un entretien à votre quotidien en ligne et à un journaliste d’un média sur place a dit les raisons de sa présence dans la capitale du Royaume-Uni, les menaces terroristes qui guettent la sous-région ouest-africaine, le délai de deux ans de transition conclu avec la CEDEAO ainsi que plusieurs sujets qui défraie la chronique en Guinée. Dr Kourouma répond aux questions de Mohamed Bangoura.
Mosaiquguinee.com : Bonjour Monsieur le Président du Conseil National de la Transition ? Quelles sont les raisons de votre présence à Londres, la capitale du Royaume-Uni ?
Dr Dansa Kourouma (Président du CNT) : D’abord en tant que parlementaire, nous avons l’obligation de veiller à ce que la politique sécuritaire de l’Etat soit réfléchie et élaborée de commun accord avec toutes composantes de la population afin que toutes les menaces actuelles et potentielles soient prises en compte et les mécanismes de réponse globale et structurée de l’Etat soient apportées. Donc, le parlement veille à ce que la politique de sécurité du pays soit conforme à la volonté des citoyens et que cette politique ne soit pas conçue de manière unilatérale, que ça soit réfléchie en tenant compte de toutes les couches de la population.
La deuxième chose, c’est que nous veillons à ce que le budget de l’Etat soit attribué en prenant en compte le besoin réel de l’Etat. Aujourd’hui, la Guinée est un pays qui est entouré par des menaces potentielles notamment le terrorisme dans le sahel avec le Mali qui est un pays limitrophe à la Guinée, le Burkina, actuellement le Niger, la Côte d’Ivoire et le Togo. Tous ces pays côtiers sont aujourd’hui touchés par le terrorisme. Donc, le terrorisme n’est plus un problème du sahel, c’est devenu une menace générale. C’est pourquoi en tant que parlement, nous veillons aussi à ce que les lois qui sont votées, qu’elles tiennent compte des véritables préoccupations et de la hauteur mais aussi la menace auxquelles le pays est exposé.
Pensez-vous que la transition est une occasion pour corriger la situation politique et sécuritaire de la Guinée ?
Le coup d’Etat qui s’est passé en Guinée, c’est pour rectifier une situation politique globale qui avait plus de menaces que d’opportunités pour le pays. Donc, la transition est une opportunité pour mieux redéfinir la base de nos relations et structurer celles-ci dans le cadre des questions de défense et de sécurité au sein de l’Afrique de l’Ouest. La sécurité ne peut pas être le problème d’un État, c’est un problème qui dépasse la compétence des États, il faut une collaboration entre les États. Et cette collaboration exige à ce qu’il y ait une certaine solidarité. L’un des problèmes qui font aujourd’hui que la sécurité globale est menacée, c’est parce qu’il y a une certaine asymétrie dans la gestion des conflits. Les renseignements sur les terroristes sont détenus par les occidentaux, ils les donnent aux pays qu’ils veulent et donnent les informations qu’ils veulent. Tant que les informations ne sont pas partagées avec sincérité entre les pays développés et ceux en développement, on ne peut pas maîtriser le terrorisme. Si les terroristes finissent avec les pays sous-développés, ils vont faire face à ceux développés, et vice-versa. Ça demande une collaboration sincère, un partage de risque, de ressources, de moyens technologiques pour combattre le terrorisme.
Pour faire face au défi sécuritaire en Guinée tout comme en Afrique, quel est la place des nouvelles technologies ?
La technologie est un mal nécessaire aujourd’hui. Le monde se dématérialise, il s’intègre, la population mondiale augmente. Donc, la technologie qui est un mal nécessaire, doit être consommée de façon rationnelle pour éviter qu’elle ne nous contrôle. Nous devons contrôler la technologie, l’utiliser pour faciliter la connectivité mondiale, la collaboration mondiale. Mais elle ne doit pas être utilisée tel un moyen pour remplacer l’être humain.
Aujourd’hui, il y a une nouvelle génération qui dirige la Guinée. Depuis deux ans, elle a pris les rênes du pouvoir. Quelles sont les avancées qui ont été enregistrées ?
Vous parlez chaque fois de transition, mais je dois rappeler encore une fois que la transition est une opportunité, tous les pays du monde ont connu la transition. Certains ont connu plusieurs transitions avant d’être des pays développés et sécurisés. Nous, nous sommes une opportunité parce qu’il y a une nouvelle génération qui a pris les destinées du pays et le pays est en train d’être conduit dans le respect des valeurs et des principes démocratiques. Ce qui est important de souligner, jamais les droits n’ont été respectés comme ils le sont actuellement, jamais la corruption n’a été combattue comme elle l’est aujourd’hui, jamais la politique de l’Etat n’a été efficace comme elle l’est aujourd’hui. Nous ne voulons pas perdurer dans la transition, mais nous voulons saisir l’opportunité de la transition pour poser les bases d’un développement socio-économique durable, un processus de développement qui tient compte des ressources de la Guinée, des menaces et qui tient à asseoir une certaine justice et une répartition équitable des ressources de l’Etat pour qu’elles profitent à tout le monde.
On va parler à présent du délai de deux ans de transition conclu avec la CEDEAO. Ce délai sera-t-il respecté ?
La Guinée a convenu un accord avec la CEDEAO, mais un accord qui doit s’adapter aux défis de la transition, mais pas l’inverse. Ce n’est pas le délai qui commande l’action, mais l’action qui commande le délai. Parce que chaque action doit se mettre en place dans un délai, et c’est l’ensemble de ces délais qui font un chronogramme. Nous n’allons pas du tout accepter que le délai soit imposé aux actions. Nous veillons à ce que les actions qui seront posées pendant cette transition, soient des actions efficaces, intelligentes et appropriées pour ne plus que la Guinée retourne dans cette situation d’insécurité globale. Encore une fois, ce n’est pas le délai qui commande les actions, mais les actions qui commandent le délai. Nous allons veiller à ce que nos actions soient respectés à deux niveaux : le regard de la communauté nationale et internationale sur le pays et notre volonté à être efficace par rapport à la conduite de la transition.
Quelle est votre prochaine destination après Londres ?
Après ici, je retourne en Guinée pour continuer mon travail. D’ailleurs, ça sera le travail qui consiste à écrire la nouvelle Constitution qu’on doit parachever rapidement et aussi le travail qui va consister à examiner le budget de l’Etat, à travers la loi de finances. Nous avons tellement de choses à faire en Guinée qu’on ne peut pas se donner le luxe de rester longtemps en Europe. L’Europe est déjà développée, nous allons venir ici pour voir ce qui est bon et aller l’implémenter en Guinée, pour que la Guinée soit plus développée que l’Europe.
Merci à vous Dr Dansa Kourouma !
Interview réalisée par Mohamed Bangoura