L’insécurité, un sujet de préoccupation de premier ordre pour les guinéens. Malgré la foultitude d’unités et de services de tout genre, le grand banditisme ne recule guère. Au contraire, le phénomène tend à s’amplifier.
Chaque jour suffit son lot de vies humaines passées à la trappe, chaque jour suffit des âmes arrachées à notre affection, chaque jour suffit des cadres, des compétences fauchés, chaque jour son torrent de larmes de colère, d’indignation, de déception et de révolte. Ma révolte est sans limite, ma colère noire face au drame de l’insécurité qui engloutit chaque jour nos vies. Le crime se propage, se banalise et se révolutionne.
Il faut désormais se le farcir, pour toujours et encore plus supplicier leurs victimes, une nouvelle race de criminels fait irruption avec des modes opératoires tout aussi innovants, les tueurs à gaz, ça vous dit ? Une famille s’est vu crucifiée des heures durant par une horde de sans cœur le week-end écoulé, avec à la clé les derniers outrages subis par une fillette de 15 ans qui finira par en mourir. Le crime se répand, l’insécurité devenue comme une fatalité guinéenne. Comme une fidèle compagne, elle ne nous quitte plus d’une semelle sous aucun prétexte. Elle fait partie de notre miséreux quotidien, on se lève et se couche avec elle, elle nous colle comme une seconde peau. Rien n’y fait, c’est un long couloir de mort sans issue, le piège qui se referme irrémédiablement sur tout ce qui bouge, il n’y aucune échappatoire. Le constat est amer comme du chicotin, les différents gouvernements qui se sont succédé à la tête du pays se sont tous cassés la margoulette sur cette sorte de réverbère soit par inaction ou par manque de stratégie solidement charpentée.
De tout le temps, le guinéen a vécu la venette au ventre, manquant de refuge, ébranlé dans son être, l’esprit taraudé par la permanente hantise que le piège ne se referme sur lui. Voyant tous les jours quantité de concitoyens se faire la peau par une horde de sans foi ni loi qui ont fini de prendre notre république en otage, Ghussein, un autre cadre des finances, après Madame Boiro, vient de tomber dans le traquenard géant, la terreur est à son comble, chaque jour que Dieu fait, le guinéen turlupiné, se questionne à quand son tour de croiser l’inéluctable funeste destin, de tomber dans le mystérieux cul de sac. Car en réalité, nul n’est à l’abri, nul n’y échappe, c’est un peu comme une chape de plomb qui s’abat sur tout le monde. Aujourd’hui, cela tombe sous les sens, le sentiment d’insécurité du guinéen n’a jamais été aussi grand, la peur d’être à son tour une proie de la flamme dévoreuse du grand banditisme a atteint les cimes de l’inimaginable. La tête prise dans ce torrent dévastateur qui emporte tout sur son passage, l’âme dégoulinante d’incertitudes, on nous maltraite les tympans de concepts creux, on nous gave de plans, de stratégies à même de nous délier des fers incandescents de la géhenne. On nous vante la trouvaille sortie des escarpins de Madifing Diané, cette fameuse police de proximité, on nous parle de potion magique pour exorciser l’éternel démon. Nous voulons bien y croire, mais notre méfiance est si grande, notre foi en un environnement de vie sûr à court terme, si infinitésimale. Pourtant annoncé comme l’homme providentiel qui venait nous délivrer de cet enfer, Madifing Diané traîne encore à nous montrer toutes les tours qu’il a dans sa besace.
Malgré une profusion d’unités de tout acabit, CMIS, Bac, escadrons mobile, que sais-je et maintenant la police de proximité en gestation, l’ardeur des hors la loi n’a jamais été contenue, que d’assassinats au fil des jours qui se suivent et qui se ressemblent pour nous depuis de longs mois, que de braquages, que de véhicules arrachés à leurs propriétaires, que de commerces dévalisés, que de magots emportés, que d’années de labeur engloutis…parfois sous l’œil complice de ceux qui sont censés nous protéger et nos biens. Ils prétendent le faire, en laissant nos bourreaux agir, le plus généralement munis d’armes et en tunique provenant d’eux, c’est le serpent qui mord sa queue. Et lorsqu’il nous arrive de savoir que le grappin a été mis sur quelques poignées de ces énergumènes, notre joie est si grande, mais une joie, la plupart du temps éphémère. Les mêmes se retrouvant dehors aussitôt, leur ardeur à commettre plus de crimes et leur capacité de nuisance décuplées. Voilà qui nous laboure le crâne, fend nos âmes, et remplit nos cœurs de déception et de colère. Déception et colère face à cette trahison, cette perfidie. Au lieu de penser à savoir comment arrêter la spirale dévoreuse, au lieu de mutualiser leurs énergies pour nous sortir d’épaisseur, nos unités et nos corps ne trouvent pas mieux à faire que de se flinguer, que de se tirer dans les pattes les unes des autres. Carton rouge !