A l’instar des autres pays de la sous-région, la Guinée est confrontée à la problématique de la sécurité sanitaire des aliments et aux maladies d’origine alimentaire.
Selon les estimations de la FAO, chaque année au niveau mondial, plus de 600 millions de cas de maladies d’origine alimentaire enregistrées. Dans les mêmes estimations, 420 000 personnes meurent chaque année après avoir consommé un aliment contaminé. Cela démontre que la sécurité sanitaire des aliments est un sujet préoccupant non seulement à l’échelle nationale, mais aussi à l’échelle internationale, ayant un impact négatif très élevé sur la productivité, la croissance économique et par conséquent, limite la capacité des gouvernements pour s’occuper des secteurs, tels que la santé, l’éducation et les programmes de développement.
Dans le cas de la Guinée, il a été constaté qu’un certain nombre des facteurs freinent encore la prise en compte de la santé des consommateurs guinéens, entre-autres :
- Sur le plan cadre institutionnel, le sujet SECURITE SANITAIRE DES ALIMENTS n’est pas une priorité dans la politique gouvernementale. En revanche, plusieurs institutions ont été créées sans pour autant répondre à la problématique. C’est le cas de CNC (Comité National du Codex), créé pour faciliter les échanges d’informations scientifiques et la relation de travail efficace entre le comité du codex alimentarius et les autorités guinéennes. Cependant, ce comité national n’a pas pu atteindre ses objectifs escomptés, dû aux disfonctionnements liés au manque des moyens financiers et aux qualifications nécessaires pour mener à bien cette mission.
Les mêmes constats sont effectués également au niveau des autres institutions, comme l’Office National de Contrôle Qualité (ONCQ), ONSPA, l’Institut National de la Normalisation et de la Métrologie. Aussi, nous constatons une absence d’une institution clef, l’Office National de l’Assurance Qualité au niveau alimentaire.
L’ANAQ existant a pour rôle actuellement d’évaluer les institutions scolaires et universitaires. Donc, son domaine d’application est très limité.
Les constats effectués ont démontré clairement la faiblesse de ces institutions, soit parce que la structuration et le budget ont été mal définis, soit par l’insuffisance des qualifications nécessaires du personnel.
- Sur le plan juridique, comme indiqué précédemment, la sécurité sanitaire des aliments n’est pas une priorité dans la politique gouvernementale. L’appareil judiciaire et législatif n’a pas d’organes chargés de la législation alimentaire. Cette insuffisance a conduit à la mise en place de plusieurs entreprises d’importation et d’exportation, ainsi que des entreprises de production qui, au demeurant, leurs produits ne répondent pas aux exigences règlementaires et normatives. C’est pourquoi, les produits fabriqués en Guinée font face, aujourd’hui, au rejet de la plupart des pays développés.
- Sur le plan scientifique, il existe aujourd’hui quelques institutions universitaires spécialisées en alimentation. Cependant, elles ne sont pas associées dans les décisions relatives au secteur alimentaire. Ensuite, les étudiants ne sont pas généralement acceptés dans les entreprises. Parmi ces institutions, nous pouvons citer l’Institut Supérieur des Sciences et Médecine Vétérinaire, Université Gamal Abdel Nasser et l’Université Catholique de l’Afrique de l’Ouest. Nous constatons une absence significative de partenariat entre les entreprises et les institutions universitaires, provoquant ainsi une faible valeur ajoutée au niveau scientifique et technologique. Ainsi, la Guinée ne fait pas partie des plus grands pays africains qui publient des articles dans le secteur alimentaire.
- Sur le plan technologique, les méthodes agricole et d’élevage, les techniques de transformations et commerciales sont fortement artisanales, poussant donc le pays à la traine des pays sous-région aux. De même, les matériels utilisés ne sont pas adéquats dans la plupart des entreprises. Ensuite, les technologies de production, de transformation et de commercialisation ne tiennent pas compte des exigences du plan de maîtrise sanitaire (PMS). Les normes sont presque méconnues en Guinée, faute de publication par les autorités concernées.
- Autres facteurs : le manque d’éthiques et de professionnalisme des acteurs de production, de transformation et de commercialisation conduit aux crises alimentaires, dues à l’utilisation des substances interdites (les additifs, les auxiliaires technologiques, pesticides, insecticides,…), ou aux pratiques illicites (fraudes alimentaires) qui, finalement, provoquent des conséquences très élevées sur la vie des consommateurs et sur l’image du pays.
Au vu de toutes ces situations, nous invitons les autorités guinéennes, notamment, le Président de la République et les ministères concernés (Agriculture, Industrie, Pèches, Santé,…) à se saisir de ce sujet préoccupant à dimension nationale et internationale, afin de mettre en place moyens de maîtrise.
IL N’Y A PAS DE SECURITE ALIMENTAIRE SANS LA SECURITE SANITAIRE DES ALIMENTS.
KEBE SALIMOU
CONSULTANT EN AGRO-ALIMENTAIRE ET EN GESTION DE PROJET